La production ne pourra suivre le nouvel essor de la demande intérieure, influencée par les facteurs psychologiques liés à l'incertitude politique et à la persistance du climat de défiance à l'égard de la monnaie.

Ainsi, les importations se gonflent sous l'effet de la demande, mais aussi d'achats spéculatifs faits en prévision d'une modification des taux de change ; cela est particulièrement prononcé du côté des biens de consommation. Les exportations montrent une tendance ferme, mais ne peuvent se développer au rythme voulu, car les capacités de production se trouvent limitées dans plusieurs branches industrielles.

De janvier à juillet 1969, les importations progressent deux fois plus vite que les exportations. Entre le premier et le second trimestre, le déficit mensuel corrigé des variations saisonnières de la balance commerciale avec les pays hors zone franc s'élève ; il passe de 700 à 1 200 millions de francs.

La dévaluation

C'est pour rétablir la situation, marquée notamment par le déséquilibre inquiétant des échanges extérieurs, l'excès de la demande sur l'offre et la menace d'une crise monétaire internationale, que le gouvernement dévalue le franc de 11,11 %, le 8 août 1969.

En août et septembre, on assiste à un certain flottement du commerce extérieur : les résultats sont médiocres. On s'attendait à cette évolution.

Le quatrième trimestre de 1969 est placé sous le signe d'un redressement spectaculaire de la balance commerciale : le solde négatif des échanges avec les pays hors zone franc est ramené à 2 620 millions de francs (contre un déficit de 3 507 et 3 338 millions respectivement aux 2e et 3e trimestres). Le taux de couverture remonte à 89 %, il était de 83 % et 82 %.

Dès octobre, les achats à l'étranger se stabilisent, pour effectuer ensuite un repli sensible en novembre. Le fléchissement est surtout accusé pour les biens de consommation. En revanche, les achats de matières premières augmentent fortement en valeur, essentiellement en raison d'une hausse très importante des cours internationaux (du cuivre en particulier).

Le freinage de la demande intérieure et l'arrêt des achats spéculatifs provoquent la décélération du rythme d'accroissement des importations : + 3,8 % seulement au quatrième trimestre par rapport au troisième trimestre, sur la base des résultats bruts désaisonnalisés. Mais, pour les exportations, le taux s'établit à + 9,7 %. Élément particulièrement dynamique de la conjoncture, les exportations sont stimulées par la demande étrangère. La dévaluation du franc et, fin octobre, la réévaluation du Deutsche Mark de 9,29 % leur redonnent un coup de fouet.

Un excellent dernier mois

Décembre est un mois record pour les ventes à l'étranger : 7 131 millions de francs. Il confirme la tendance vers l'équilibre des échanges, déjà assez nettement perçue le mois précédent.

La propension à exporter tenait aussi aux profits plus élevés réalisables sur les marchés étrangers après la dévaluation. Les exportateurs français ne baissèrent que peu leurs prix en devises.

Ainsi, l'année 1969 s'est caractérisée par un développement exceptionnel du volume des échanges, dans la ligne de l'expansion du commerce mondial. Malgré un renversement favorable en fin d'année, le bilan d'ensemble reflète finalement la très forte détérioration du commerce extérieur français.

Les résultats de 1969 illustrent, d'autre part, la grande sensibilité des importations françaises à une croissance élevée de la production intérieure, phénomène désormais observé dans presque tous les pays industrialisés.

Doublement du déficit

Les entrées de marchandises ont atteint au total 90 022 millions de francs, les sorties 77 759 millions. Par rapport à 1968, nos achats toutes zones ont augmenté de 30,1 % et nos ventes de 23,8 %. Le taux de couverture s'est établi à 86,4 % (contre 90,8 % en 1968). Le déficit apparent de la balance commerciale globale a presque doublé, passant de 6 350 à 12 264 millions de francs. En termes réels de paiement, cela représente une perte en devises de quelque 6 milliards de francs.