Pour la télévision en couleurs, c'est finalement le groupe Thomson-Brandt qui construira la lampe française (à grille) en série industrielle et non le groupe Sylvain Floirat. Ce dernier a cédé, le 15 septembre 1969, à Thomson sa participation (90 %) dans France-couleur (Journal de l'année 1967-68 et 1968-69). L'usine où seront produites ces lampes aura une capacité de 1 000 petits écrans par jour à compter de la fin de 1971. Elle est en cours de construction à Romilly-sur-Seine (Aube).

Dans l'électronique, le fait le plus notable a été l'annonce, fin mai 1970, du passage de Bull des mains de General Electric à celles d'Honeywell. Cet échange d'une firme française entre deux firmes américaines montre bien la domination de celles-ci dans le secteur des ordinateurs. General Electric a cédé toutes ses activités liées à l'informatique ; il recevra environ 10 % du capital d'Honeywell.

Une bonne cadence

En matière de production, la construction électrique continue à se développer à une excellente cadence : au cours des six premiers mois de 1970 (par rapport à la même période de 1969), la production a augmenté au rythme annuel de 9 à 10 % ce qui correspond à la tendance à long terme de la profession. Le chiffre d'affaires hors taxe des industries électriques et électroniques françaises a été de près de 23 milliards de francs en 1969 (+ de 16 % par rapport à 1968). Le secteur des biens d'équipement (la moitié du chiffre d'affaires) a connu l'évolution la plus favorable. En revanche, le secteur des biens de consommation durables (électroménager et radiotélévision) a ressenti l'effet des mesures restrictives du crédit : sa production est en diminution sensible depuis six mois.

L'augmentation des effectifs (223 000 salariés) de la construction électrique, qui a été de 4 % pour 1969, a porté essentiellement, pour la première fois depuis longtemps, sur le personnel ouvrier. La hausse des salaires horaires a été supérieure à 9 %.

La balance commerciale des industries électriques et électroniques reste déficitaire, malgré une hausse de 30 % des exportations. Ces dernières ont atteint 4,2 milliards de francs en 1969, soit environ le cinquième du total des ventes de la profession. Les principaux pays destinataires sont en premier lieu les États membres du Marché commun (1,5 milliard de francs) et les pays de la zone franc (717 millions de francs). Les importations ont aussi beaucoup augmenté (+ 45 % en un an) ; elles se sont élevées à 4,5 milliards de francs.

Pour la durée du VIe plan (1971-1975), les experts ont proposé un taux de progression de la construction électrique et de l'électronique françaises de l'ordre de 12 %. Il atteignait 7,70 % par an, en moyenne, au cours des dernières années. Plus généralement, bien que le potentiel de production des entreprises françaises de la branche soit dix fois inférieur à celui des États-Unis, les taux de progression moyens annuels sont sensiblement équivalents (7,7 % et 7,5 %). L'Allemagne vient derrière, avec 7,2 %. Toutefois, la construction électrique française, dont le taux de progression est croissant, n'a qu'une part relativement faible de l'ensemble des industries de transformation (France, 6,2 % ; Allemagne, 9,3 %).

Bâtiment

Absence d'une véritable politique

L'année 1969 a mal fini et 1970 mal commencé pour les entreprises du bâtiment, dont plusieurs parmi les plus importantes et de nombreuses parmi les moyennes et petites rencontraient des difficultés considérables pour faire face à leurs échéances.

Depuis mai 1968, les dépôts de bilan se sont multipliés : une entreprise sur 23 globalement, et même une sur 15 pour les entreprises moyennes.

Ce marasme se traduit par une forte baisse des mises en chantier (– 13 % au cours du premier trimestre de 1970, par rapport au premier trimestre de 1969). Diminution d'autant plus inquiétante que l'objectif fixé par le Ve plan pour 1970 (480 000 logements) ne paraît pas, au vu des résultats de 1969, en passe d'être atteint.

La crise

Pour les professionnels du bâtiment, la crise résulte de quatre facteurs convergents :
– un hiver trop long, qui, dans certaines régions, l'Est par exemple, n'a permis que quelques jours de travail en janvier et février ;
– un crédit trop serré, qui, au niveau des entreprises, provoque de grosses difficultés de trésorerie, les banques refusant souvent leur concours ; tandis que l'élévation brutale des taux d'intérêt (les charges de remboursement se sont alourdies de 225 % depuis mai 1968) décourage les acquéreurs de logements ;
– le blocage des crédits budgétaires, provoquant une réduction des commandes de l'État, alors que les délais de plus en plus longs des paiements de l'Administration aggravaient encore les problèmes de trésorerie des entreprises ;
– un blocage des primes, qui se répercute sur les prêts du Crédit foncier.

Une politique accusée

À ces doléances qui s'adressent au ministre de l'Économie et des Finances s'ajoutent les critiques visant le ministre de l'Équipement et du Logement. Les professionnels accusent d'abord la politique d'Albin Chalandon, insistant pour que l'aide de l'État aille en priorité aux constructeurs qui acceptent une certaine discipline et aux lauréats des concours lancés par le ministère.