Jusqu'en 1968, pourtant, les camions ne supportaient aucune charge d'infrastructure, situation d'autant plus anormale que les autres modes de transport, le rail notamment, en supportent le coût. Instaurée en octobre 1968, la taxe à l'essieu a pour but de remédier à cette carence. Son apport assez faible (150 millions de francs environ en 1969) ne correspond pas aux besoins.

Pour tenter de limiter les dégâts, de nombreux tronçons de routes ont été interdits aux camions par des barrières de dégel. On sait quel accueil les transporteurs routiers réservèrent à ces mesures. Les hésitations du gouvernement montrent bien son impuissance à mettre en œuvre de véritables solutions. Réduire de moitié le tarif de l'autoroute pour les poids lourds, solution facile, mais contestable, ne résoudrait pas le problème définitivement. Seule, sans doute, la construction accélérée de déviations autour des localités permettrait de concilier les impératifs de la circulation et les droits des citadins.

La solution, la mise hors gel des routes les plus importantes, coûte, elle aussi, trop cher. 400 km de routes sont refaits chaque année ; il en faudrait au moins 3 000.

Pour parer au plus pressé, le Gouvernement décidait, le 18 mars, de dégager immédiatement 380 millions de francs sur des crédits prévus pour le deuxième trimestre ; 250 millions pour mettre en état les chaussées dégradées au cours de l'hiver, et 130 millions pour les opérations décidées à la suite de la Table ronde sur la sécurité routière.

Mais pour sortir de l'impasse, il cherche surtout de nouvelles sources de financement : du côté des transporteurs routiers, des compagnies d'assurance, et, aussi, des départements, qui investissent pour l'entretien des petites routes autant que l'État pour les grandes nationales.

Le prix des routes

Indications données par le ministère de l'Équipement et du Logement, le 21 mars 1970 (travaux en rase campagne et en zones non montagneuses) :
– Autoroute à deux fois trois voies : 4 à 5 millions de francs du kilomètre ;
– Autoroute à deux fois deux voies : 3,7 à 4,7 millions.
– Autoroute à financement privé (bénéficiant de la continuité de réalisation sur une grande longueur) : 3,3 à 3,6 millions.
– Route expresse d deux fois deux voies : 2,3 à 2,9 millions.
– Route à quatre voies : 2,1 à 2,7 millions.
– Route de 7 m à deux voies : 1 à 1,6 million.
– Élargissement de deux à quatre voies : 0,5 à 0,8 million.

Les autoroutes

Mise en chantier de 300 km d'autoroutes en 1970, annonce le Premier ministre dès le 16 septembre 1969. Projet ambitieux qui tranche sur la modestie des réalisations antérieures et des crédits habituellement affectés à ce secteur. D'où vient cette subite largesse ? Le gouvernement fait sienne la politique prônée par A. Chalandon : les entreprises privées prennent en partie le relais de l'État pour le financement et l'exploitation des autoroutes. Le premier contrat de concession est signé le 27 janvier. Le groupe constitué par la Compagnie générale d'électricité (7 entreprises et 2 banques), lauréat du concours lancé en juin 1969, prend en charge les autoroutes Paris-Poitiers et Paris-Le Mans, 476 km au total. Un premier tronçon devrait être mis en service en 1972 et la fin des travaux est prévue pour 1977. Un autre groupe privé réalisera le tracé des autoroutes alpines : 250 km entre Lyon-Grenoble et Annecy, qui devrait être achevé en 1976.

Sécurité routière : deux nouvelles mesures

Sa vitesse limitée, l'automobiliste français sera désormais fiché et classé. Son taux d'alcoolémie sera contrôlé. Les députés ont voté, les 22 et 23 avril 1970, les dernières mesures de l'offensive annoncée par le Premier ministre au lendemain de la Table ronde sur la sécurité routière.

Le fichier du conducteur

Fichés, les conducteurs français l'étaient déjà d'une certaine manière. Les renseignements étaient dispersés en plusieurs services ; ils seront regroupés et traités sur ordinateur : informations administratives d'une part (permis de conduire, pièces exigées pour la circulation des véhicules), informations judiciaires de l'autre (condamnations pénales prononcées pour infractions commises à l'occasion de la conduite ou suspensions du permis de conduire).