– Le taux d'accidents corporels s'obtient en rapportant le nombre total d'accidents au nombre d'unités de parcours (l'unité de parcours est de 100 millions de véhicules X kilomètres) ;

– La gravité des accidents corporels s'apprécie par le rapport entre le nombre de tués et le nombre d'unités de parcours. On peut aussi examiner le nombre de tués par rapport au nombre d'accidents.

Les statistiques montrent qu'avec un taux d'accidents de 69,7 % hors intersections, les routes de 9 m de large (3 voies étroites) sont moins dangereuses que les routes à 2 voies, qu'elles soient de 6 m (71,5 %) ou de 7 m (70,5 %).

En revanche, le taux de tués survenant sur des routes de 9 m de large (12,1 %) est nettement supérieur à la moyenne nationale (8,9 %). D'où une forte probabilité qu'un accident qui se produit sur une route à trois voies étroites soit plus grave que sur toutes les autres. « Sur ce seul point, estime l'ONSER, la mauvaise réputation des routes à trois voies se trouve justifiée ».

Elle ne l'est pas si la route à trois voies mesure 10,50 m. Sur ces routes, le taux d'accidents (67,5) est légèrement inférieur à la moyenne du réseau et le taux de tués (9,2) est très voisin de celui des routes de 7 m (9,4).

Le cas des autoroutes

L'ONSER distingue le cas des autoroutes offrant trois voies de circulation dans chaque sens — ce sont le plus souvent des autoroutes de dégagement des villes — et celles n'ayant que deux voies, normalement des autoroutes de liaison.

– Sur les autoroutes à deux fois trois voies, le risque d'accident corporel est évalué à 65 % du risque moyen sur le réseau ordinaire. En outre, la gravité de ces accidents est bien inférieure a la moyenne générale : la proportion de tués pour 1 000 accidents est de 56 %, inférieure à la moitié de la moyenne nationale (130 %). Pour l'ONSER, ce gain considérable est dû à la suppression partielle des obstacles, ainsi qu'à l'unicité de direction des véhicules ; il est aussi probablement lié « à la faible fréquence des vitesses élevées, conséquence de la congestion assez fréquente de ces autoroutes ».

– Sur les autoroutes à deux fois deux voies, le risque d'accident vaut environ 50 % du risque moyen sur le réseau ordinaire. Le coefficient de tués par accident est plus élevé que sur les autoroutes de dégagement, tout en restant légèrement inférieur à la moyenne des routes nationales.

La bataille des poids lourds

L'hiver 1970 a vu éclater le conflit, latent depuis des années, entre le poids lourd et ses principaux adversaires : pouvoirs publics, automobilistes, riverains des villages traversés, amoureux du chemin de fer.

Pour la première fois, les chauffeurs ont utilisé une arme nouvelle et redoutable : le blocage des routes, des autoroutes ou des sorties des villes.

Ils ont commencé, par dizaines, à Chaumont et à Langres, en février, pour protester contre les barrières de dégel qui leur interdisaient certains itinéraires et les obligeaient à de longs et coûteux détours.

Ils ont continué, par centaines, à Anse et à Villefranche-sur-Saône, où les habitants, perturbés dans leur sommeil, avaient obtenu pour la nuit l'interdiction de la RN 6 aux poids lourds, les rejetant sur l'autoroute à péage ou sur une petite route trop sinueuse et trop étroite.

Enfin, par milliers, à la veille du grand exode pascal, ils ont fait le siège des autoroutes parisiennes et de plusieurs villes de France, parce que les pouvoirs publics avaient négligé de les prévenir à temps de l'interdiction de rouler pendant le week-end des fêtes.

Chaque fois, l'État a dû reculer et faire les concessions exigées : diminution du péage sur l'autoroute Lyon-Mâcon, levée des mesures décidées pour le week-end de Pâques, etc. En même temps, la France découvrait un formidable problème, que les barrages des uns et les capitulations des autres ne suffisent à résoudre : celui de l'équilibre, dangereusement menacé, entre un trafic qui ne cesse de croître et un réseau routier qui ne cesse de se détériorer.

Comme dans tous les grands pays industrialisés — un peu moins vite en France qu'ailleurs, parce que le chemin de fer résiste mieux — le transport routier de marchandises grignote les positions de ses adversaires. En 1958, il ne représentait que 27 % du trafic tonne-kilomètre en France, contre 62 % à la SNCF, 10 % à l'oléoduc et 1 % à la navigation fluviale. Dix ans après, la route (37 %) frôle le rail (41,70 %), tandis que le tube (12,50 %) a dépassé le fleuve (8,80 %).