Leur réaction est très vive et prolongée : pendant près de trois mois, diverses grèves d'étudiants en lettres, gagnant de proche en proche et durant parfois plusieurs semaines, contribuent à détériorer le climat de l'université, tandis que dans de nombreux lycées des grandes villes éclatent des mouvements de grève et de protestation, de plus courte durée.

Les assurances données par le ministre de l'Éducation nationale, sans parvenir à apaiser totalement l'inquiétude des étudiants en langues, désamorcent, à la longue, les grèves, qui s'effilochent au fil des semaines.

Une confusion hâtive

L'affaire provient, en réalité, de la confusion, établie un peu hâtivement par certains, entre le système des options et les matières facultatives. À la base du système optionnel, qui tend à se développer dans la plupart des pays industriels, et particulièrement en Allemagne de l'Ouest, se trouve l'idée que les élèves, en fonction de leurs aptitudes et de leurs goûts, doivent pouvoir se composer eux-mêmes le programme de leur choix. Il n'est pas question de tout rendre optionnel, mais de faire la distinction entre les matières fondamentales (mathématiques, français, première langue) et les autres plus annexes, ce qui ne signifie pas inutiles.

La conception même de l'enseignement secondaire est aussi en question. L'extrême diversité des voies que peuvent emprunter les élèves ne signifie pas pour autant que chacun peut actuellement, à sa guise, choisir une section ou une autre. Les enfants qui sortent de l'école primaire sont dirigés, selon leurs capacités, dans trois directions possibles. Pour éviter que dans le second cycle (à partir de la classe de troisième) les élèves ne soient en quelque sorte bloqués dans une voie déterminée, on s'oriente de plus en plus vers une homogénéisation qui tendrait à supprimer des cloisonnements trop étanches entre les diverses sections.

Dans cette optique, la querelle des langues vivantes prend une signification différente : la décision d'Olivier Guichard supprime l'un des points de séparation entre les élèves des collèges d'enseignement général, qui n'étudient qu'une langue, et ceux des sections de type lycée, sans pour autant interdire l'étude d'une deuxième langue.

ONISEP et CERQ

En même temps qu'il réorganisait l'administration centrale à son ministère, Olivier Guichard tenait enfin la promesse de plusieurs de ses prédécesseurs, en créant l'ONISEP : Office national d'information sur les enseignements et les professions. Son but est de fournir aux parents, aux élèves et étudiants, ainsi qu'aux associations ou groupements intéressés, tous renseignements concernant les filières de formation aux professions et métiers en utilisant les techniques de l'informatique.

L'ONISEP bénéficie de l'expérience et de l'infrastructure administrative du BUS (Bureau universitaire de statistiques) qu'il remplace. Sa mission première est de rassembler toute la documentation possible sur les différents sujets qui intéressent les élèves, mais aussi, et c'est là son originalité, les travailleurs désireux de se recycler ou de connaître de nouvelles filières de promotion.

Première action d'envergure du nouvel organisme : éclairer le choix des bacheliers de 1970. Un dépliant a été remis à chaque candidat, qui doit faire une première sélection parmi les secteurs d'activité proposés et indiquer s'il veut poursuivre des études ou entrer directement dans la vie professionnelle. Muni de ces données, l'ordinateur de l'ONISEP devait répondre à raison de 7 000 lettres par jour.

La tâche d'information de l'ONISEP, dont la création était réclamée depuis des années par les associations de parents d'élèves, ne s'accompagne pas d'une fonction d'orientation.

L'expérience a montré qu'information et orientation devaient être traitées séparément.

L'action de l'ONISEP se trouve complétée par la création, dans chaque district scolaire, de services spécialisés d'orientation dépendant de l'Éducation nationale (leur mise en place sera progressive). Ces services sont confiés à des conseillers d'orientation. À partir d'examens de cas individuels, de discussions avec les enfants et de leur connaissance des aptitudes nécessaires à l'exercice de certaines professions, ces spécialistes pourront exercer une véritable orientation, l'ONISEP se bornant à diffuser une information brute.

Profil des professions

L'ONISEP, dont la direction est confiée à Charles-Pierre Guillebeau, est coiffé par le CERQ (Centre d'études et de recherches sur les qualifications), chargé d'une mission plus analytique et plus prospective. Ses travaux doivent mettre en évidence les circuits de formation nécessaires au développement industriel et technique et fournir aux différents services publics intéressés, particulièrement à l'Éducation nationale, un profil des professions concernant leur avenir. Le ministère de l'Éducation nationale agira peut-être alors moins à l'aveuglette en créant, par exemple, de nouveaux enseignements.

Projet d'implantation du ministère de l'Éducation nationale

Un seul domaine avait jusque-là échappé à la vague de réformes de l'éducation nationale : l'administration centrale. Depuis plusieurs années, pourtant, les méthodes de gestion de ce vaste ensemble que constitue l'enseignement public (près de 750 000 fonctionnaires et plus de 12 millions d'étudiants) ne répondaient plus aux exigences actuelles.