Une question demeure pourtant ; les avortements précoces sont-ils plus fréquents chez les femmes ayant pris antérieurement la pilule ? Il est impossible de conclure pour l'instant, mais les gynécologues s'accordent pour recommander un intervalle de trois mois entre l'arrêt de la prise des œstro-progestatifs de synthèse et le début d'une grossesse. Au bout de ce laps de temps, l'ovule vieilli est éliminé et l'appareil génital féminin a recouvré l'ensemble de ses fonctions naturelles.

Mini-pilules et cancer

Autre accusation lancée : certaines pilules favoriseraient le cancer du sein. Cette fois, le cri d'alarme est venu des États-Unis. Les chercheurs des laboratoires Synthex ont constaté que 5 des 50 chiennes Beagle auxquelles on avait administré de l'acétate de chlormadinone à forte dose présentaient, au bout de dix-huit mois, des tumeurs mammaires. Or, il se trouve qu'une pilule contenant ce progestatif de synthèse (à très faible dose il est vrai) était commercialisée en France depuis déjà deux ans (ainsi, d'ailleurs, que deux préparations hormonales non contraceptives) ! De là une certaine inquiétude chez nombre de femmes. Cette mini-pilule, qui ne fait pas grossir et n'agit ni sur l'ovulation ni sur la muqueuse utérine, était d'une façon fréquente préférée aux autres.

Le professeur Netter — chef de service à l'hôpital Necker —, interrogé à la télévision, a assuré que les chiennes Beagle sont très nettement prédisposées au cancer ; l'extrapolation à partir d'une race canine est peu probante. Bien plus, l'action bénéfique des progestatifs de synthèse sur l'évolution de certains cancers de l'utérus et du sein constitue actuellement une des méthodes thérapeutiques utilisables. La spécialité incriminée a été retirée du commerce pour une autre raison. Le Dr Rozenbaum, que le ministère de la Santé a chargé, depuis plus d'un an, d'enquêter sur tous les cas d'accidents survenus sous pilule, s'interroge — sans conclure encore — sur la fréquence relative des grossesses extra-utérines qui se manifestent après contraception par ce produit. Par ailleurs, il semble que ce contraceptif oral à base d'acétate de chlormadinone n'assure pas une infécondité totale. C'est le principal grief qu'on pourrait formuler à son égard.

Pilule et contraception

A-t-on prouvé pour autant la totale innocuité des pilules ? Certainement pas ; mais démontre-t-on jamais l'existence du néant ? On peut tout de même affirmer que l'exemple de Porto Rico, des États-Unis et du Japon, les pionniers de la contraception hormonale, n'a pas mis en évidence une fréquence accrue des cancers ou des monstruosités. Bien au contraire. Au Japon, où la natalité est plus précoce que naguère, le pourcentage d'enfants mongoliens a diminué. Les frottis vaginaux et cervicaux, nécessaires avant toute prescription contraceptive, constituent un excellent moyen de dépistage des cancers génitaux.

Par ailleurs, si, dans certains cas que les intéressées connaissent bien, les œstro-progestatifs de synthèse sont contre-indiqués de façon formelle (prurit ou ictère au cours d'une grossesse précédente, phlébite, obésité, insuffisance hépatique congénitale ou acquise, antécédents dépressifs...) ou relative (diabète, épilepsie, hypertension...), ils permettent, en revanche, de traiter avec succès certaines affections gynécologiques, de régulariser le cycle menstruel et de soulager les femmes qui souffrent de dysménorrhée. Certains dermatologues les utilisent pour combattre l'acné.

Les médecins qui ont adhéré au Mouvement français pour le planning familial (1 800 sur 40 000 praticiens) situent le débat sur un autre plan. Ils sont les premiers à reconnaître qu'il n'existe pas, pour l'heure, de procédé contraceptif parfait, c'est-à-dire immédiatement réversible, efficace à 100 %, d'une innocuité totale et applicable à toutes les femmes. Mais ils s'irritent d'être, bien à tort, « assimilés depuis quatre ans à la pilule ». Certains gynécologues posent d'assez nombreux stérilets ou dispositifs intra-utérins (DIU) et prescrivent plus de diaphragmes que d'œstro-progestatifs. Ils font valoir que le pourcentage d'échecs avec les pessaires est nul lorsque ceux-ci sont convenablement placés par l'utilisatrice et qu'ils n'hypothèquent pas l'avenir puisqu'ils s'opposent à la fécondation par une action purement mécanique. D'autres praticiens reconnaissent que cette méthode rebute bien des clientes. Quant aux D I U, qui accusent un taux d'échecs de 2 à 3 %, ils sont quelquefois mal tolérés.