De nouveaux facteurs de hausses de prix venaient se substituer ainsi à ceux (dépenses budgétaires) que le gouvernement s'efforçait par différents moyens de faire disparaître.

Ayant beaucoup tardé pour intervenir, le gouvernement dut le faire avec beaucoup de vigueur. Les restrictions monétaires prirent des formes drastiques : c'est ainsi que le taux d'escompte officiel atteignit le niveau record, aux États-Unis, de 6,5 %. Pratiquement, les entreprises ne trouvaient pas d'argent à moins de 9 ou 10 %. On n'avait jamais vu cela. Toute l'économie américaine avait vécu depuis vingt ans sur la base de capitaux abondants et bon marché : voilà qu'ils étaient devenus rares et prohibitifs. Banques et firmes américaines se retournèrent alors vers le marché international des capitaux, où, de ce fait, l'argent devint également très coûteux. Ce qui se répercuta sur toutes les économies nationales. Car les capitaux fuyaient les pays à taux modérés pour se présenter sur un marché international (celui des eurodollars) si rémunérateur. C'est ainsi que l'on a vu l'Allemagne, en mars 1970, contrainte de porter son taux d'escompte à 7,5 % pour enrayer des fuites de capitaux inquiétantes, malgré la solidité du mark. En France et en Grande-Bretagne, le taux d'escompte a touché les plus hauts sommets : 8 %.

Jamais, depuis la guerre, la contamination des virus de la vie économique n'a paru aussi grande. C'est la rançon de l'ouverture des frontières et de l'intensification des échanges internationaux, par ailleurs bénéfiques.

Les eurodollars

Les eurodollars sont nés au début des années 50, après la guerre de Corée, quand les Russes ont cessé de replacer aux USA, dans la crainte d'un embargo, des créances en dollars qu'ils avaient pu gagner dans leur commerce extérieur. Ils les ont placées alors dans des banques européennes, lesquelles les reprêtaient à des entreprises du continent qui pouvaient en avoir besoin, par exemple pour leurs échanges avec les USA. On peut donc définir les eurodollars, en termes simplifiés, comme des dollars détenus par les Européens et prêtés par ceux-ci à des non-résidents aux USA.

Le marché des eurodollars s'est considérablement élargi dans les années 60, sous l'effet notamment du déficit extérieur des USA. Ce déficit a, en effet, gonflé les créances en dollars détenues par les Européens, créances que ceux-ci n'échangeaient pas contre leur monnaie nationale dans la mesure où ils pouvaient les prêter dans des conditions avantageuses à d'autres personnes qui avaient besoin de dollars. Le marché des eurodollars est ainsi devenu le marché international des capitaux à court terme, qui représentent aujourd'hui une masse considérable de capitaux, proche de 40 milliards de dollars. Ce marché international présente l'avantage d'être un marché libre, par opposition aux marchés nationaux. Mais il a l'inconvénient de constituer une monnaie que ne contrôle aucune banque centrale, puisque les banques centrales européennes n'émettent pas de dollars et que la banque centrale américaine n'a rien à faire en Europe. En outre, le marché de l'eurodollar transmet au monde entier les vicissitudes du marché américain et, notamment, les taux d'intérêt très élevés que le gouvernement des USA a dû pratiquer pour essayer d'enrayer l'inflation.

En pratique, à côté du marché des eurodollars au sens strict, qui est le marché des capitaux à court terme, il existe un autre marché, celui des capitaux à long terme, dénommé les euro-obligations. Le processus ne joue pas uniquement pour le dollar, mais aussi, à un moindre degré, pour d'autres monnaies (comme le mark) que des étrangers peuvent vouloir conserver et faire travailler.

L'arsenal habituel

Brochant sur le tout, les peuples ont paru saisis d'une fringale de voitures, de télévision, de logements, de minijupes, comme si les manifestations de jeunes mettant en cause la société de consommation avaient conduit le reste des populations à se précipiter pour en profiter tant qu'elle était encore là. L'ambiguïté des mouvements revendicatifs, dont on voit l'extension à tous les groupes sociaux, bien au-delà des ouvriers, avec le recours à des formes nouvelles d'action (grèves sauvages, barrages de routes...), conduit les autorités à les apaiser par des distributions d'argent, même quand ce sont d'autres aspirations qui les animent.