Emploi

Diminution sensible du chômage mais la qualification professionnelle demeure le problème majeur

En augmentation constante jusqu'en juillet 1968, les demandes d'emploi non satisfaites n'ont cessé de diminuer depuis lors. Parallèlement, les offres d'emploi non satisfaites, qui se situaient à 29 000 (données corrigées des variations saisonnières), ont augmenté régulièrement, pour atteindre plus du double à la fin de l'hiver.

Cette reprise — rompant spectaculairement avec la tendance établie depuis près de trois ans — a été, pour une part, le résultat mécanique des événements de mai reconstitution des stocks et réduction de la durée du travail. C'est dans les secteurs très liés à la consommation (automobile, électroménager) et là où les horaires moyens étaient faibles (textile, habillement, cuir) que l'augmentation de la durée du travail et le niveau des embauches ont été les plus élevés.

Dans l'enquête de conjoncture de fin d'année 1968, les experts de l'INSEE pouvaient écrire : « Pour la première fois depuis quatre ans, les industriels constataient une progression sensible de leurs effectifs et indiquaient qu'elle se poursuivrait. »

Chômage des femmes

La progression des offres d'emploi non satisfaites, signe d'un déséquilibre dans les entreprises, apparaissait plus inquiétante.

Cette progression semble due essentiellement à des offres émanant de l'industrie et concernant particulièrement les métiers de la métallurgie (production et utilisation des métaux), les demandes d'emploi ayant beaucoup diminué dans ce groupe.

La progression demeure moins forte dans d'autres groupes comme le bâtiment et la production et l'utilisation des tissus. Il est curieux de remarquer que, pour les emplois de bureau, les offres d'emploi ont également nettement augmenté, bien que les demandes d'emploi non satisfaites soient restées très nombreuses.

Contrastant avec l'amélioration lente, mais générale, la situation s'est aggravée pour les jeunes et les femmes ; phénomène de portée structurelle, puisque les premiers résultats du recensement de 1968 devaient révéler une progression du chômage (entre 1962 et 1968) de 38 % chez les hommes de moins de 18 ans et de 145 % chez les hommes ayant entre 18 et 24 ans, tandis que chez les jeunes femmes les pourcentages respectifs étaient de 21 % et de 120 %.

Problèmes du tertiaire

Le recensement devait également permettre de constater l'aggravation des disparités régionales : les variations de l'emploi total s'échelonnent d'une diminution de — 4 % (par rapport à 1962) dans le Limousin, à une stagnation pour la Bretagne, la région Midi-Pyrénées, la Lorraine et le Nord, et à une augmentation de 8 % pour la Picardie et la Haute-Normandie, et de quelque 13 % pour la Provence - Côte d'Azur. Mais, là encore, le fait significatif demeure la non-concordance entre l'évolution des demandes et celle des offres non satisfaites.

La distorsion qualitative des demandes et des offres a tendance à s'accentuer dans de nombreuses régions où l'expansion de l'activité économique a déjà permis de réaliser le reclassement de la main-d'œuvre dont les capacités correspondaient le mieux aux emplois offerts.

Il faut noter, dans les régions industrialisées, des situations différentes dans les métiers industriels et dans les activités tertiaires. Ainsi, en Meurthe-et-Moselle, on compte, pour l'ensemble des secteurs industriels, un nombre de demandes inférieur à celui des offres, alors qu'on enregistre, dans le secteur tertiaire, un nombre très élevé de demandes par rapport à celui des offres.

Au total, la situation de l'emploi apparaît comme marquée d'une double caractéristique : reprise saisonnière prolongée d'une part, persistance de la pénurie de main-d'œuvre qualifiée d'autre part, risquant de freiner le développement de l'activité industrielle.

Le nombre, encore élevé, des demandeurs d'emploi rend plus impérieuse la nécessité pour l'Agence nationale de l'emploi de réaliser un effort particulier d'information et de conseil professionnels, afin de mieux orienter les intéressés vers les emplois disponibles et d'éviter ainsi de faire trop largement appel à la main-d'œuvre étrangère.

Le chômage des jeunes

Les chômeurs sont plus nombreux chez les jeunes que chez les adultes. Les jeunes de moins de 24 ans représentaient, en 1968, un peu plus du quart du total des demandes d'emploi non satisfaites, indique le ministère des Affaires sociales.