Dans l'entourage du souverain pontife, plusieurs prélats disent tout haut leur approbation ; c'est le cas notamment du cardinal Tisserant. Approbation totale aussi de la part du cardinal Wyszynski, primat de Pologne. Écho très élogieux dans l'Église orthodoxe : le patriarche Athénagoras déclare, à plusieurs reprises, qu'il est « entièrement d'accord » avec le pape.

Les protestants

Certaines réactions sont, à l'opposé, franchement défavorables ou expriment une déception profonde. C'est le cas généralement des milieux protestants et anglicans. Le Dr Eugène Carson Blake, secrétaire général du Conseil œcuménique des Églises (COE), dit sa peine de voir que « l'initiative prise en 1964 de réexaminer le planning familial et le contrôle des naissances semble, avec l'encyclique Humanae vitae, avoir tourné court approximativement là où elle a commencé ».

Le Dr Ramsey, primat de l'Église anglicane, après consultation du comité directeur de Lambeth, regrette que l'enseignement d'Humanae vitae « diffère largement de celui adopté par l'Église anglicane il y a déjà dix ans... ».

Les médecins

Les organismes familiaux, les médecins et les techniciens spécialisés dans les problèmes propres à la contraception réagissent avec force.

Parmi les premiers, la promotrice du Mouvement du planning familial, le Dr M. A. Weill-Hallé, considère que si l'encyclique « contient d'admirables définitions de l'amour conjugal et de la paternité responsable », elle va faire vivre les couples dans un complexe de culpabilité qui, touchant à la sexualité, est « extrêmement dangereux ». Quant au Dr Jean Dalsace, président du Mouvement, il déclare que « l'encyclique marque l'abandon d'une ébauche de morale évolutive pour un retour à la morale figée ».

Crise d'obéissance

L'embarras de l'épiscopat, des théologiens et du clergé masque mal des remous profonds.

Les membres de la commission permanente de la Conférence épiscopale espagnole, dans une courte note, stigmatisent les « opinions déroutantes » liées, en Espagne, à la publication de l'encyclique.

Par contre, le théologien suisse Hans Küng souligne le caractère non infaillible de l'encyclique et constate que la publication entraîne « l'Église catholique dans la plus sérieuse crise intérieure des dernières décennies ».

Troubles en Grande-Bretagne, où la publication de l'encyclique soulève une émotion considérable. Des prêtres qui ont publiquement pris parti contre le document pontifical sont suspendus ; le 15 août 1968, une campagne de prières est lancée par des catholiques « pour une plus profonde compréhension du mariage au sein de l'Église » ; quelques jours plus tard, devant la cathédrale de Westminster, des bagarres opposent partisans et adversaires de l'encyclique.

Aux États-Unis, les archevêques de New York, de Washington, de Boston, de Los Angeles soulignent que tous les catholiques ont le devoir d'accueillir l'enseignement du pape. Cependant, la publication de l'encyclique Humanae vitae aggrave la « crise d'obéissance » dénoncée depuis longtemps par l'épiscopat ; un peu partout, et notamment devant la cathédrale Saint-Patrick à New York, des groupes de catholiques manifestent en faveur du Birth control.

L'Église hollandaise

Remous semblables aux Pays-Bas, où le cardinal Alfrink se fait l'écho du désarroi de son Église quand il déclare qu'« il sera difficile pour le clergé de faire comprendre l'encyclique » et que celle-ci « risque de provoquer de l'hostilité chez certains fidèles ».

Dès le 31 juillet 1968, le professeur C. Sporken, président de la commission Mariage et famille du concile pastoral néerlandais, rappelle que, « depuis des années, les théologiens néerlandais ne font plus un problème des moyens anticonceptionnels ». Quant au Dr Laenen, secrétaire de l'Union catholique des médecins, il déplore le « caractère paternaliste de la décision papale ».

Réaction tout aussi réservée en Belgique. Les évêques belges, réunis en assemblée extraordinaire le 30 août, publient une longue déclaration dans laquelle, tout en s'unissant au souverain pontife dans son appel au respect de la vie humaine, ils affirment que le « jugement sur l'opportunité d'une nouvelle transmission de la vie appartient en dernier ressort aux époux eux-mêmes, qui doivent en décider devant Dieu ».