La mutation affectera les programmes d'enseignement au moins dès le second cycle. En janvier 1969, Edgar Faure, alors ministre de l'Éducation nationale, a annoncé qu'il s'adjoignait un spécialiste chargé de préparer une pédagogie de l'informatique.

D'ici à quelques années on sera abonné à l'ordinateur comme on l'est à l'électricité et au téléphone. C'est d'ailleurs le réseau téléphonique qui reliera les usagers à l'ordinateur. La firme IBM lance sur le marché un matériel mis au point dans un centre de recherches situé près de Nice, et qui s'inspire de la technologie des ordinateurs : cet autocommutateur 2750 constitue à la fois un autocommutateur de réseau téléphonique intérieur très supérieur aux systèmes existants, et un dispositif de liaison de tous les postes du réseau intérieur avec le système d'informatique de l'entreprise.

Les greffes d'organes

À la fois matière et instrument de nos prochains programmes d'enseignement, l'ordinateur fait chaque jour irruption dans des domaines nouveaux et parfois inattendus. Le congrès des notaires de France, qui s'est tenu à Grenoble, s'est engagé dans la voie de l'utilisation des ordinateurs ; décision significative dans une profession où les traditions, sinon la routine, pouvaient sembler particulièrement enracinées.

En médecine, les résistances conservatrices des praticiens attachés aux méthodes traditionnelles de diagnostic sont emportées. La commission d'informatique de la faculté Necker-Enfants malades, animée par les docteurs Laugier et Vermeil, a même organisé, en janvier, un stage d'initiation à l'informatique médicale. Une commission d'informatique médicale vient d'être créée à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). L'ordinateur multiplie extraordinairement les possibilités d'utilisation des examens de laboratoire.

En médecine, par ailleurs, ce sont les greffes d'organes, spécialement les greffes cardiaques, qui continuent à concentrer l'intérêt du public. Les problèmes qu'elles soulèvent touchent, comme pour la mégascience, à la nécessité, souvent cruelle ici, d'une option dans les dépenses, et aussi à la nécessité de vaincre l'obstacle principal : le rejet du greffon. Les spécialistes, et parmi eux le docteur Barnard, se sont réunis en juin, à Paris, pour dresser le bilan d'un an et demi de greffes cardiaques, et préparer l'avenir, notamment, sans doute, par le développement des banques d'organes. En dépit des hésitations et des objections, les pionniers de cette thérapeutique d'avant-garde semblent donc résolus à poursuivre leur marche en avant.

Avec les nouveaux traitements anticancéreux et la victoire sur l'incompatibilité Rhésus, il convient de signaler l'autorisation officielle qui vient d'être donnée, en Suisse et aux États-Unis, à l'emploi généralisé du vaccin antirubéoleux. Lorsqu'il sera étendu à d'autres pays et rendu obligatoire au moins pour la population féminine, la médecine aura triomphé d'une infection par elle-même bénigne, mais dont on sait qu'elle cause, chaque année, la naissance de milliers d'enfants malformés.

Expansion irréversible

Si, dans plus d'une de ses branches, la recherche scientifique et technique présente des symptômes de crise, on peut penser qu'il s'agit d'une phase de réadaptation et de recherche d'un nouvel équilibre, plutôt que d'une menace de stagnation. Les progrès continus des connaissances et de leurs applications pratiques en témoignent. C'est même leur rapidité qui — au moins autant que les difficultés économiques — impose la nécessité de choisir entre les différentes voies de la recherche et de refondre ses structures. La tendance — sensible aux États-Unis, mais surtout en Grande-Bretagne et en France — à favoriser la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale trouvera ses limites dans le fait que la première aura toujours besoin de la seconde, et que, réciproquement, les réalisations pratiques apportent de nouveaux instruments à la recherche pure. Les progrès de l'astronautique, liés à ceux de la technologie des fusées, nous apportent des informations sur les autres astres du système solaire, et bientôt, grâce aux observatoires extraterrestres, des données précieuses pour l'astrophysique et la physique fondamentale. En France, les études publiées par la Délégation générale à la recherche scientifique et technique font prévoir que le nombre total des chercheurs (recherche fondamentale et appliquée) sera de 55 000 à 60 000 l'année prochaine et de 73 000 à 75 000 en 1975, pour atteindre 85 000 à 95 000 en 1980. En dépit des à-coups, celle expansion est irréversible.