Cependant, en maintes occasions, le général de Gaulle s'efforçait de dissiper les appréhensions, d'atténuer les hésitations, de calmer les impatiences. Il se montrait déterminé, tant à sa conférence de presse du 28 novembre 1967 que dans son allocution de fin d'année, à poursuivre l'action entreprise dans la direction où elle était engagée.

Au printemps, le système était étendu aux entreprises nationales, extension d'ailleurs prévue dès l'origine.

La loi foncière

L'urbanisme, l'utilisation des terrains, la spéculation foncière ont fait depuis quelques années l'objet de nombreux débats et controverses.

Les gouvernements successifs ont tous cherché à se donner la possibilité de juguler la spéculation foncière, et en même temps à favoriser le dégel des terrains. Ainsi furent créées les zones à urbaniser en priorité (ZUP) et les zones d'aménagements différés (ZAD). Les effets de ces mesures furent décevants. C'est pourquoi E. Pisani, alors ministre de l'Équipement, songea dès 1966 à une grande loi foncière ; il rédigea ainsi un projet de loi d'orientation foncière et urbaine (dite PLOFU).

Défendre la propriété

Il s'agissait pour E. Pisani « de ne pas permettre aux propriétaires de s'opposer au développement de la cité ». Après le dépôt du projet de loi devant le Parlement, le texte donna lieu à une avalanche de rapports et d'amendements (un peu plus de 1 000).

En juin 1967, l'Assemblée nationale vota le texte en première lecture, l'assortissant de 155 amendements. Les députés avaient notamment modifié le dispositif fiscal prévu par le gouvernement pour freiner la spéculation foncière (taxe d'urbanisation), financer les équipements des zones à bâtir (taxe d'équipement), et imposer les plus-values de cession des sols. Les députés avaient, en outre, accru le rôle des collectivités locales dans la préparation et l'utilisation des schémas directeurs d'urbanisme, et accéléré la procédure de paiement des sols expropriés.

Les sénateurs, eux, présentèrent 119 amendements qui réduisaient considérablement la portée du projet. Soucieux de défendre la propriété privée, le Parlement négligeait le phénomène dominant : la croissance des villes, dont la surface doublera d'ici à 1985. Chaque année, il faut consacrer à l'urbanisation l'équivalent de la surface d'une ville comme Lyon.

Objectifs de la loi

Votée le 15 décembre 1967, la loi d'orientation foncière parut au Journal officiel le 3 janvier 1968 ; elle entend atteindre quatre objectifs :
– Mettre de l'ordre dans l'urbanisation sans la paralyser ;
– Dégager de nouvelles et importantes surfaces de terrains à bâtir ;
– Peser sur le prix de ces terrains en plaçant les propriétaires devant le dilemme : ou bien payer peu d'impôts en déclarant une valeur assez basse, mais avec l'obligation de traiter à cette valeur le jour où ils vendront leur terrain, ou bien se réserver la possibilité de vendre à un prix élevé, mais payer immédiatement des impôts plus lourds ;
– Contrôler de plus près l'action des communes.

Schéma directeur

Dans son titre I, la loi modifie le code de l'urbanisme, et prévoit que les « règles d'urbanisme s'expriment par des schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme, et par des plans d'occupation des sols ». La mise à l'étude des plans d'occupation des sols entraîne la création de plans d'aménagement rural dans les cantons dont la population locale est inférieure à 10 000 habitants.

Certaines communes, définies par les décrets d'application de la loi du 3 janvier, seront tenues de mettre au point un schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme (comme c'était déjà le cas à Paris) et un plan d'occupation des sols, ou bien, uniquement, un plan d'occupation des sols ; les schémas directeurs d'urbanisme fixent les orientations pour l'extension des agglomérations.

Si le quart des conseils municipaux ou bien un ou plusieurs conseils représentant plus d'un quart de la population du territoire concernée par un schéma directeur ou de secteur, font connaître leur opposition, l'approbation ne pourra résulter, d'après la loi, que d'un décret en Conseil d'État.

Plans d'occupation

Les plans d'occupation des sols délimitent les zones d'urbanisation, en prenant en considération la valeur économique des sols, et déterminent leurs zones d'affectation, selon l'usage principal qui doit en être fait.