Les événements d'Israël ne relèvent pas seulement du domaine de la politique ; pour la plupart des Juifs, Israël n'est pas tout à fait un État comme les autres. Il est évidemment pour les Juifs croyants un centre spirituel : ils voient dans sa résurrection l'ébauche de la réalisation des prophéties bibliques. Pour les autres, Israël est tantôt un dénominateur commun, tantôt une civilisation pilote, tantôt un foyer et un refuge pour leurs frères.

Se regrouper

Aussi la guerre des six jours a-t-elle fait passer un souffle nouveau sur les communautés juives. De ce point de vue, deux facteurs méritent de retenir l'attention.

Tout d'abord, ces derniers mois ont vu les communautés juives se renforcer. De par leur situation de minorités, les communautés étaient traditionnellement soumises à des forces centrifuges extrêmement puissantes ; en fait, de nombreux Juifs n'adhéraient pas aux diverses institutions communautaires et ne participaient que rarement à leurs manifestations.

En suscitant un immense élan de solidarité, les événements d'Israël ont donné à ces Juifs l'occasion de se rattacher à leur communauté. Ils se sont d'ailleurs trouvés confrontés à des problèmes nouveaux, à des polémiques concernant la nature de leur rattachement à Israël et l'identité du judaïsme contemporain. Ces débats se prolongent encore.

Le second facteur concerne les structures des communautés. Devant l'importance de l'assistance matérielle et morale qu'elles se sentent tenues d'apporter à Israël, elles ont été amenées à se regrouper et à mettre sur pied des organismes centralisateurs. C'est le cas notamment en France, où un Comité de coordination des œuvres juives fonctionne depuis le mois de juin ; d'autre part, les divers organismes de collecte qui font face aux besoins de la vie religieuse, culturelle et sociale se sont fondus en un seul : l'Appel juif unifié.

Il est dans le monde des communautés sur le destin desquelles les événements d'Israël se sont répercutés d'une manière moins positive. Les Juifs vivant dans des pays arabes se sont trouvés dans une situation plus difficile que précédemment. Certaines communautés peuvent être considérées comme ayant, du fait de l'exode, pratiquement disparu au cours de l'année. C'est le cas de la Libye notamment.

Le Mur de Jérusalem

Outre les conquêtes politiques, la guerre des six jours a donné à Israël le contrôle des Lieux saints : le Mur occidental ou Mur des lamentations. Pour les Juifs, cela s'est traduit par la possibilité d'aller y prier (depuis 1948 et la partition de Jérusalem, l'accès de ces lieux, situés en territoire jordanien, était refusé aux Juifs de toutes nationalités, ainsi qu'aux Arabes israéliens).

Le Mur occidental est le véritable nom (en hébreu, Kotel Maraavi) qu'a toujours porté pour les Juifs le dernier vestige du temple d'Hérode, le second Temple. Comme de nombreux Juifs avaient l'habitude, depuis des siècles, de venir y prier pour la fin des souffrances juives, et qu'ils y pleuraient souvent, les observateurs avaient fini par lui donner le nom de Mur des lamentations.

La valeur particulière que les Juifs attachent à ce Mur provient tout d'abord de ce que le Temple de Jérusalem joue un rôle central dans les rapports qui unissent Dieu et Israël. Il est considéré comme une sorte de foyer commun à Dieu et à l'homme ; aussi bien sa destruction apparut-elle comme une véritable catastrophe et un signe de désunion entre Dieu et les Juifs.

Une ancienne tradition veut que la présence divine, chassée du Temple, se soit concentrée dans le Mur occidental. Ainsi s'explique la vénération que les Juifs portent à ce lieu. L'unification de Jérusalem a donné un caractère particulier à ce qui fut le grand événement de la vie religieuse juive : la Conférence mondiale des synagogues Ashkénazes et Sépharades, qui s'est tenue du 7 au 11 janvier 1968.

Du monde entier

Il s'agit d'une sorte de synode qui groupe 1 500 délégués venus de presque tous les pays. Seules manquaient quelques communautés juives de l'Est, en particulier les représentants de l'importante communauté juive de Russie (3 000 000 d'âmes), la seconde par son importance numérique, après les États-Unis et avant Israël ; néanmoins, la Roumanie était représentée par le grand rabbin Rosen.