Un plongeur parisien, André Galerne, fondait, en 1954, avec quatre camarades, une coopérative ouvrière : la Société générale des travaux maritimes et fluviaux ; elle groupe aujourd'hui 150 plongeurs, qui ont effectué 500 000 heures de travail sous-marin sur des chantiers du monde entier.

Jusqu'ici, les travailleurs de la mer étaient essentiellement occupés sur des chantiers de travaux publics, sur des barrages ou dans des ports. Désormais, ils sont appelés par les entreprises qui poursuivent sur toute l'étendue du plateau continental la recherche du pétrole et du gaz.

Les remontées : danger

Pour découvrir ce pétrole, pour l'extraire, les plongeurs en scaphandres autonomes sont indispensables. Voici quelques années, ils n'auraient pu effectuer ce travail à plus de 70 m, limite au-delà de laquelle ils ne pouvaient descendre sans risquer des accidents causés par l'azote dissous dans le sang.

À partir de 1960, imitant le jeune mathématicien suisse Hannes Keller, qui réussit à descendre à 200, puis à 300 m, les plongeurs sous-marins ont reculé les limites de la plongée profonde. Cet exploit a été rendu possible en faisant respirer aux plongeurs un mélange gazeux où l'azote est remplacé par l'hélium, ce qui a supprimé l'ivresse des grandes profondeurs.

Pour que le travail sous-marin soit économiquement intéressant, il a fallu résoudre un autre problème. Lorsqu'il descend, le plongeur doit supporter une pression qui augmente régulièrement. Les gaz qu'il respire ont tendance à se dissoudre dans le sang et à se répartir dans les tissus de l'organisme. Lors de la remontée, la pression diminuant, les gaz dissous s'échappent et forment des bulles qui provoquent des embolies et des lésions graves, dans les centres nerveux notamment.

Pour éviter ces accidents, qui peuvent être mortels, il n'existe qu'une solution : remonter lentement, en respectant des paliers de décompression, au cours desquels les gaz dissous dans le sang peuvent s'échapper normalement, c'est-à-dire par les poumons.

Les paliers

Ces paliers obligatoires sont codifiés sous la forme de tables et varient suivant les mélanges respiratoires utilisés, la profondeur atteinte et la durée du séjour au fond. Une heure à 60 m réclame, par exemple, 3 h 30 de remontée, en six paliers. Deux heures à 100 m : 12 heures de remontée. Dix minutes à 180 m : 6 heures de remontée.

La durée du séjour utile au fond se réduit à tel point par rapport au temps pris par les impératifs de sécurité, que la plongée profonde serait restée un exploit sportif sans intérêt économique, si l'on n'avait trouvé des procédés pour diminuer la proportion des temps morts.

Ces procédés sont fondés sur le phénomène de saturation : quand un plongeur demeure longtemps à une profondeur déterminée, son organisme absorbe les gaz jusqu'à une certaine quantité, après quoi il est saturé. Le temps qu'il devra passer pour remonter en toute sécurité reste alors le même, qu'il passe 10 heures ou 10 jours au fond.

D'où l'idée, appliquée pour la première fois par le commandant Cousteau en 1962, de faire vivre les plongeurs dans une maison sous la mer, où ils peuvent se reposer, manger et dormir — au sec —, mais à la même pression que les fonds marins voisins, où ils travaillent sous l'eau.

À moins 25 m

Les plongeurs des équipes Cousteau ont ainsi vécu une semaine à 10 m de fond en 1962, un mois à 25 m en 1963, et trois semaines à 100 m en 1965. Avec une année de décalage, les Américains ont reproduit ces expériences, dans le cadre de leur programme Sealab. De nouveaux progrès s'annoncent. La nouvelle maison sous la mer du commandant Cousteau sera posée sur un fond de 300 m.

Les Américains organisent l'opération Sealab 3 sous la direction du commandant George F. Bond : cinq équipes de huit plongeurs vont se relayer pendant deux mois au large de la Californie. L'Angleterre prépare, elle aussi, sa maison sous la mer. Baptisée Kraken, du nom du légendaire monstre marin, elle permettra à quatre hommes de vivre plusieurs semaines par 30 m de fond.