Journal de l'année Édition 1968 1968Éd. 1968

Matières premières

Le marché mondial

Le ralentissement de l'expansion dans la plupart des pays industriels, exception faite de l'Italie et du Japon, ainsi que la hausse générale des taux de l'intérêt qui a incité les grands utilisateurs de matières premières à entretenir des stocks minimaux, ont pesé, du printemps 1967 jusqu'au début de l'été 1968, sur un grand nombre de marchés de matières premières.

Les événements qui ont bouleversé au mois de mai 1968 la vie politique, économique et sociale en France n'ont eu aucune répercussion sur les marchés. La Bourse de commerce de Paris a continué de fonctionner normalement, avec, toutefois, un volume d'affaires plus réduit. Les indices généraux ont varié de façon divergente. L'indice londonien Reuter (moyenne géométrique pondérée de 21 articles, en fonction de l'importance dans le commerce mondial) a passé de 434, au début de juillet 1967, à 490, en fin juin 1968, soit un progrès comparable au taux de dévaluation du sterling. L'indice new-yorkais Moody's (moyenne arithmétique pondérée de 15 marchandises importantes à New York et spéculatives) qui a passé dans le même temps de 372 à 367, a accusé une baisse de l'ordre de 2 %.

Métaux non ferreux

Les conflits sociaux aux États-Unis ont paralysé, pendant huit mois, la production de cuivre et causé la perte d'au moins 1 250 000 t de métal, soit 25 % de la production du monde libre. Au-delà, c'est toute la situation des métaux non ferreux aux États-Unis qui a été profondément marquée par ce conflit. Seul, l'aluminium a fait exception. Par contre, la dévaluation de la livre sterling n'a pas eu de répercussion spectaculaire sur les métaux, car les grands producteurs de cuivre, de plomb, de zinc et d'aluminium échappent à l'influence de la livre et s'inscrivent dans l'orbite du dollar (Congo-Kinshasa, Zambie, Australie, Canada).

Cuivre

Les cours, qui étaient de £ 360 par tonne au début de l'été 1967, se sont établis en juin 1968 à £ 520, après avoir atteint £ 690 en février. Parmi les causes du raffermissement du marché, on peut retenir la recrudescence de la guerre au Viêt-nam, le ralentissement de la production zambienne et, surtout, la grève aux États-Unis.

Plomb et zinc

La faiblesse du plomb, notable du 1er juillet 1967 à la fin de juin 1968, s'explique par la disparition du déficit mondial. En conséquence, à la bourse des métaux de Londres, le cours du plomb n'a pas reflété immédiatement la marge de dévaluation de la livre. Alors que ce métal se traitait entre £ 82 et £ 86 par tonne avant la dévaluation, le cours s'est situé à £ 94 environ au début de l'année. Il ne dépassait £ 100 que fin juin. La situation est, cependant, différente aux États-Unis, où les conflits sociaux ont touché 75 % de la capacité de production des fonderies et 42 % de celle des raffineries. Pour le zinc, la situation a été similaire : diminution de la consommation, augmentation de la production et grèves aux États-Unis.

Étain

Les cours de l'étain à Londres, qui étaient d'environ £ 1 200 par tonne avant la modification de la parité du sterling, s'établissaient en juin à £ 1 310, la hausse (un peu plus de 90 %) ne reflétant que partiellement le taux de la dévaluation. Encore convient-il de signaler que les cours n'ont pu être maintenus que grâce à d'importants achats de soutien du stock régulateur. De fait, le marché a été caractérisé par un surplus des approvisionnements ; alors que des déficits, d'ailleurs couverts par les ventes du stock stratégique américain, avaient été notés durant les dernières années, la position statistique devait tendre vers un meilleur équilibre en fin d'année, grâce, notamment, à la reprise de la consommation.

Nickel

La consommation n'a été, en 1967, que de 374 000 t longues dans le monde non communiste, en baisse de 1 % par rapport à l'année précédente. Ce déclin est dû à la pénurie de métal : les approvisionnements ont été inférieurs à la demande en 1967, alors qu'en 1966 l'équilibre avait pu être réalisé grâce à la liquidation des stocks. Ferme tout au long de l'année 1967-1968, le marché du nickel devrait maintenir cette position, en raison notamment des besoins en métal de la défense américaine.

Argent

Toujours caractérisé par le déséquilibre chronique entre la consommation et la production minière, ce marché a vécu en 1967 une année tout à fait exceptionnelle, situation qui s'est confirmée pendant le premier semestre 1968. Les cours se sont établis au mois de juin 1968, à New York, à 242 cents par once troy, après avoir été maintenus jusqu'au printemps 1967 à 129 cents par once (cours correspondant à la valeur officielle des pièces de monnaie en argent aux États-Unis), grâce aux ventes du Trésor américain qui comblaient le déficit de la production. La hausse a d'abord été provoquée par le revirement de la politique du Trésor (renonciation au maintien du cours à 129 cents l'once, limitation des ventes aux utilisateurs américains à 2 millions d'onces par semaine, suspension des ventes aux utilisateurs étrangers) ; elle s'est ensuite trouvée amplifiée du fait des opérations de spéculation suscitées par les tensions monétaires.

Denrées

Surtout influencés par la situation statistique des produits, les marchés des denrées ont également subi le climat de déflation instauré par la dévaluation de la livre sterling. Ils ont aussi accusé la diminution des achats de la Grande-Bretagne, premier pays importateur mondial de denrées alimentaires.

Sucre

Les cours à Londres ont varié de façon irrégulière depuis l'été 1967. Ils ont passé de £ 16 par tonne en août à £ 25 en février, avant de revenir au plus bas au mois de juin 1968 après l'échec de la Conférence de Genève qui, après six semaines de discussion, n'a pu parvenir à un accord, même partiel. Contrairement à ce que l'on attendait, il est vraisemblable qu'aucune diminution des stocks ne se produira durant la campagne, étant donné l'abondance des récoltes en Europe, non seulement dans les pays de l'Est, mais aussi dans ceux de la CEE. L'Italie, en particulier, dont la production augmentera de près de 12 % par rapport à la campagne précédente, disposera d'un surplus de plus de 200 000 t, qui devra être écoulé à l'extérieur de la Communauté.

Cacao

Les cours à Londres, qui étaient en juillet 1967 de moins de £ 200 par tonne, ont monté presque sans interruption jusque vers la fin de l'année, pour s'établir au niveau encore jamais atteint de £ 293, et fin juin entre £ 270 et 280. Cette hausse s'explique en grande partie par une récolte une nouvelle fois déficitaire pour la campagne 1967-68, du fait, notamment, des troubles politiques qui ont éclaté au Nigeria, l'un des plus importants producteurs mondiaux.

Textiles

Laine

Le marché a été plutôt déprimé pendant l'année 1967 et une forte baisse a été enregistrée pendant les mois d'été. Une petite remontée à l'automne a été suivie, en fin d'année, d'un nouveau repli. La production mondiale doit atteindre, pour la campagne 1967-68, un chiffre record de 3 437 millions de lbs (base lavée), alors que la consommation demeure en retrait dans les pays industriels. En début d'année, une hausse légère a été enregistrée. À la fin du mois de juin, on espère toujours un retournement de tendance provenant justement de la forte baisse qui inciterait la clientèle à acheter à bas prix. On attribue aussi la meilleure ambiance en Grande-Bretagne aux récentes augmentations des prix des fibres artificielles, ce qui donne à la laine un peu plus de champ dans la lutte contre les fibres synthétiques.

Coton

Les cours à New York ont varié irrégulièrement durant le premier semestre 1968 : après avoir passé de 26 à 38 cents par lb durant le dernier semestre de 1967, ils sont ensuite revenus aux environs de 32 cents par lb. Du fait de la faiblesse de la récolte américaine, la production mondiale ne devrait pas dépasser, en 1967-68, 47,3 millions de balles ; elle serait ainsi, une nouvelle fois, inférieure à la consommation, qui s'établirait à environ 52,5 millions de balles. Au 31 juillet 1968, date à laquelle se termine la campagne, les stocks mondiaux ne devraient plus être que de 20,2 millions de balles ; ils étaient de 25,3 millions de balles au 1er août 1967 et de 30,5 millions de balles au 1er août 1966.