Dans le même esprit, des mesures ont été prises en vue de libérer les relations entre la place financière de Paris et le marché international des capitaux et de développer l'activité internationale des banques françaises : le régime des emprunts français et étrangers sur les marchés national et international est assoupli, de même que le statut des valeurs mobilières étrangères cotées à Paris.

En outre, il est à nouveau permis aux banques françaises de rémunérer les dépôts effectués auprès d'elles par des étrangers, ce qu'elles ne pouvaient plus faire depuis avril 1963. D'autres mesures facilitent les opérations financières liées aux exportations et à l'implantation commerciale des entreprises françaises à l'étranger.

Toutes ces décisions, bien accueillies par l'étranger et par les milieux d'affaires français, consacrent le retour du franc au rang des grandes monnaies et témoignent, s'il en était besoin, de la volonté de la France de jouer la carte du libéralisme et de la concurrence internationale. Elles constituent un acte de foi — que d'aucuns ont jugé peut-être un peu prématuré — dans la solidité de notre monnaie, et, par conséquent, de notre économie nationale.

Contradictoire

Ces décisions ne sont cependant pas exemptes de dangers, dans la mesure, notamment, où le gouvernement français se démunit des moyens de faire face à des sorties excessives de capitaux, dans une conjoncture éventuellement moins favorable, et où il assume le risque de voir se répercuter au sein de l'économie française, sans aucun garde-fou, les fluctuations plus ou moins saines enregistrées par le marché international des capitaux et, plus particulièrement, pour l'heure, le renchérissement des taux d'intérêt, très accusé au cours de l'année, mais donnant, il est vrai, des signes d'essoufflement depuis le début de 1967.

Tels sont les caractères dominants et les initiatives principales qui auront marqué 1966 sous l'angle bancaire, monétaire et financier. Ils ont confirmé que l'économie française souffre non pas d'une pénurie d'épargne en valeur absolue, mais d'une mauvaise adaptation qualitative de l'offre à la demande de moyens financiers.

Le gouvernement s'est montré conscient de ce problème en promulguant de nombreuses réformes et en exprimant l'intention de ne pas s'en tenir là.

Emprunts d'État

Il est toutefois permis de s'interroger sur le caractère quelque peu contradictoire de certaines de ces réformes qui, de ce fait, risquent de manquer leur but. C'est ainsi que, recherchant une diminution du prix de l'argent, le ministre de l'Économie, talonné il est vrai par la double nécessité de financer les équipements intérieurs et de faire face à la hausse des taux étrangers, a dû recourir à une hausse des taux de rendement des obligations publiques et à un nouvel emprunt d'État d'un milliard et demi, ce qui est, en outre, contradictoire avec les efforts menés depuis trois ans pour réduire les prélèvements du Trésor public sur le marché financier. En juin 1967, l'État a récidivé avec un emprunt de 1,25 milliard de F.

De même, si 1966 a vu se développer, sans aucun doute, l'influence du système bancaire sur notre économie, cela n'a pas été sans aggraver du même coup les difficultés sérieuses du marché boursier. Un effort de réforme appelle désormais un effort de cohérence.

Bourse

Malaise persistant

L'appauvrissement des détenteurs d'actions cotées à la Bourse de Paris s'est effectué, durant le premier semestre de l'année 1967, à un taux annuel de 19 %, correspondant à près de quatre ans de revenus. Leur perte en 1966 avait été de 10 %, correspondant à deux ans de revenus.

Depuis les cours records du printemps 1962, les actionnaires des sociétés françaises cotées ont perdu 45 % de leurs avoirs en francs courants et 50 % en francs constants. Comme le notait un des meilleurs économistes de banque, Pierre Balley, il ne faudrait pas moins qu'un doublement des cours actuels pour que les actionnaires retrouvent l'équivalent de leur pouvoir d'achat de 1962. Leur moins-value correspond à la capitalisation des valeurs cotées, soit 80 milliards de francs.