Ce progrès notable ne devait pas toutefois apporter en 1966 d'améliorations sensibles à la situation du marché immobilier, toujours à la recherche des moyens financiers aussi bien que des méthodes de financement qui lui permettront de sortir du marasme et de faire face à l'immensité des besoins.

Cette évolution s'est accompagnée en 1966 d'une indiscutable extension des activités bancaires dans le domaine du logement, les banques se substituant à de nombreux promoteurs en proie à de graves difficultés de trésorerie.

C'est également pour permettre un meilleur financement de la construction que l'épargne-logement, qui ne devait commencer à être utilisée par les titulaires de comptes qu'à partir de juillet 1967, a été rendue plus attrayante encore, en octobre 1966, par l'autorisation donnée aux caisses d'épargne d'accorder des prêts complémentaires aux acquéreurs de logements dans des conditions extrêmement avantageuses, dont on attendait qu'elles incitent les banques à faire de nouveaux efforts dans le sens d'un crédit immobilier moins coûteux.

La lutte contre l'usure

Le coût du crédit a été, en effet, une préoccupation constante pour les pouvoirs publics en 1966. Le problème était particulièrement aigu pour le logement, mais aussi pour l'ensemble du crédit à la consommation, où les taux réels pratiqués étaient si élevés et si complexes qu'il était le plus souvent impossible à deux experts de s'accorder sur une évaluation du coût définitif d'une opération déterminée. Les taux les plus courants s'élevaient, semble-t-il, entre 17 et 20 %, mais on a pu signaler des officines qui, d'une manière habilement déguisée, parvenaient à prêter à 50 % !

Il est ainsi apparu souhaitable de reprendre la législation concernant l'usure, qui, ancienne, imprécise et fort libérale, était parfaitement inefficace. Le Parlement, saisi d'un projet de loi, l'a adopté en décembre. Cette loi limite le taux d'intérêt maximal à 14,12 % (le double du taux des obligations sur le marché), au-delà duquel le prêteur sera poursuivi comme usurier.

Révision des contrats

La loi a dû, cependant, devant la difficulté de prendre des dispositions précises et uniformes, prévoir une certaine souplesse, admettre que certains frais fixes pourraient s'ajouter à ce taux maximal, et retenir des exceptions. Aussi les avis restent-ils partagés quant à l'efficacité d'un texte qui fixe un maximum fort cher encore par rapport aux taux couramment pratiqués dans les pays étrangers comparables au nôtre, et qui laisse subsister, par la force des choses — car il est techniquement très difficile de faire autrement — de nombreuses échappatoires, le meilleur moyen de combattre l'usure étant sans doute de la rendre inutile.

En attendant, environ 5 millions de contrats en cours concernant des achats à tempérament (automobiles, télévision, machines à laver, etc.), financés par les banques et les établissements financiers, devraient être révisés dans l'optique de la nouvelle loi ; mais les ajustements, qui ne pourraient être qu'en baisse, seront finalement rares et de faible importance.

À dire vrai, l'opinion publique n'a guère réagi à cette initiative, qui la concerne pourtant au premier chef, tandis que les professionnels, affectant, chacun pour son compte, de ne pas être touchés par cette nouvelle réglementation, faisaient, en outre, valoir, sans souci des contradictions, qu'elle serait inapplicable dans la plupart des cas ou que la possibilité de surajouter les frais fixes aboutirait tout naturellement à maintenir les taux pratiqués jusque-là.

Liberté financière

L'ensemble des mesures prises en 1966 dans le dessein d'assainir les marchés monétaire et financier, de moderniser l'appareil bancaire et de stimuler l'épargne à long terme devaient trouver leur couronnement dans la décision prise au Conseil des ministres du 8 novembre d'abolir la réglementation des changes et de rétablir la liberté dans les relations financières avec l'étranger.

Toutes les réglementations de circonstance édictées depuis 1938 se trouvent abolies, l'État se réservant, cependant, des soupapes de sécurité en maintenant un contrôle des investissements étrangers et de l'accès des étrangers aux ressources financières françaises, ainsi qu'en prévoyant le recours à des clauses de sauvegarde en cas de nécessité.