D'autre part, un fragment de mâchoire supérieure a été trouvé en Tchécoslovaquie. Selon l'anthropologiste Jelinek, la mâchoire appartenait certainement à un néandertalien. Cependant, elle présente aussi des caractères qu'on ne rencontre que chez les hommes modernes : notamment la morphologie des dents, qui annonce nos dentures faibles et légères.

Cette mâchoire vient donc ajouter un élément de plus à la diversité des néandertaliens d'Europe. Elle semble apporter un argument à ceux qui voient dans ces hommes nos ancêtres et non des attardés que nos véritables ancêtres auraient éliminés.

Archéologie

Des « biographies » d'outils reconstitués pour la première fois à Pincevent

La découverte des restes d'un campement magdalénien à Pincevent, près de Montereau (Seine-et-Marne), avait été le grand événement de 1964 pour l'archéologie préhistorique. Deux autres événements ont eu lieu depuis :

D'une part, un second ensemble a été repéré à une centaine de mètres du premier (les sondages avaient d'ailleurs déjà montré la richesse exceptionnelle du site). Sa fouille, commencée à Pâques 1966, poursuivie pendant l'été, a été reprise en mai, juin et juillet 1967.

Au mois de juin 1967, d'autre part, est intervenue la publication de la première fouille, de la première tente de Pincevent.

La fouille du second ensemble a duré beaucoup plus longtemps que celle du premier. D'abord parce qu'elle n'a pas été faite, comme la première, en partie sous la menace d'un bulldozer, ensuite parce que ses responsables, le professeur Leroi-Gourhan et M. Brézillon, l'ont voulue encore plus minutieuse : l'emplacement des moindres esquilles de silex devait être mesuré et noté avec la plus grande précision ; enfin, parce qu'elle a posé des problèmes plus délicats.

L'espace et le temps

Le premier ensemble avait révélé trois foyers alignés, entourés de nappes de silex et de débris divers, et l'on voyait bien qu'il s'agissait des restes d'un même campement, d'un seul édifice à trois cellules associées. Le sol mis au jour par les fouilleurs était celui d'une seule époque, d'un seul campement.

Le second a bien révélé lui aussi trois foyers. Telle était du moins la situation fin juin 1967. Mais ces trois foyers n'ont pas appartenu au même campement. Ce sont les restes d'établissements implantés presque au même endroit, mais à des époques différentes.

Chacun, avec les nombreux vestiges qui l'entourent, constituait le centre d'un édifice indépendant. Il n'y a peut-être eu que quelques années entre chacun de ces établissements. Il n'y en a peut-être eu qu'une seule. Mais cette distance et cette proximité, à la fois dans l'espace et dans le temps, posent sur le terrain des problèmes de stratigraphie très difficiles.

Quoi qu'il en soit, cette fouille n'apparaît pas moins riche que la première ; et l'on sait désormais que la première a énormément appris aux préhistoriens.

La publication de ses résultats dans la revue Gallia-Préhistoire a montré qu'elle avait fourni encore plus que l'on en attendait. Cela est dû à la fois à la précision de la fouille elle-même et à la minutie des études qui ont suivi.

Un puzzle de 80 éclats

Partant d'un nucleus de silex (la pièce mère d'où étaient tirés les éclats et les lames), il a été possible de reconstituer presque intégralement le rognon originel, celui que les habitants avaient apporté eux-mêmes depuis les bancs situés sur l'autre rive de la Seine. Il a suffi pour cela, pour ce puzzle en trois dimensions, de rechercher, parmi les milliers de pièces présentes, les 80 éclats et les 10 petites esquilles qui s'adaptaient au nucleus.

Cela a permis, d'abord, de retrouver comment s'était fait le débitage — de retrouver même les essais malheureux et les échecs de l'exécutant. Ensuite, connaissant l'emplacement de tous les fragments, il a été possible de découvrir où le nucleus avait été débité. L'opération s'était faite en deux temps et en deux endroits : d'abord près d'un foyer, après quoi les déchets avaient été jetés au-dehors, puis près d'un autre où le nucleus avait été abandonné.