À partir de 1900, la psychanalyse devient le thème majeur des lettres. L'amitié pour Jung, la confiance enthousiaste et la déception se succèdent. Dissensions et dissidences ébranlent une équipe dont Freud reste l'intransigeant animateur.

Le pessimisme foncier de Freud se renforce d'année en année. Il juge amèrement les rigueurs du destin sans cesser de porter à ses correspondants une attention inlassablement généreuse. À Pfister, venu à la psychanalyse par souci éducatif, Freud exprime des pensées de la plus grande importance pour un usage éclairé de ses théories. Il les conçoit particulièrement profitables « là où on n'en a pas besoin, chez les gens normaux ». Il insiste sur l'urgence d'en informer les éducateurs. Il n'y trouve aucun motif de faiblesse ; il défend expressément une fermeté trop méconnue par des zélateurs inconsidérés, en récente voie de réhabilitation.

Cela est un trait entre beaucoup de l'actualité d'une publication où la pensée s'exprime sans appareil doctrinal, avec la forte et chaleureuse spontanéité de cet « esprit si puissant ».

Rencontre psychiatrique Est-Ouest à Madrid

Au quatrième congrès mondial de psychiatrie qui s'est tenu à Madrid (septembre 1966), une table ronde a mis en présence, pour la première fois depuis l'avènement du régime soviétique, des spécialistes venus d'URSS et des pays occidentaux.

Les psychiatres soviétiques n'admettent pas la psychologie des profondeurs, le retour aux abîmes, le souci d'identifier tardivement et avec précision les causes anciennes des névroses et des inhibitions. Le vrai problème, pour eux, n'est pas de savoir pourquoi on en est là, mais comment on va en sortir.

L'évocation des démons

Le dérèglement qui amorce la maladie mentale se situe au niveau physiologique. Les facteurs d'environnement ont une importance essentielle dans l'altération progressive et la dégradation. Le premier souci doit être de stimuler le malade et son entourage pour restaurer les conditions de la santé mentale.

Cette attitude est évidemment fort éloignée de la neutralité bienveillante du psychanalyste, de sa patiente attente d'une maturation psychologique, fruit tardif de ces reviviscences que Freud lui-même a un jour qualifiées d'évocation des démons.

Ces divergences foncières n'ont pas été soulignées à Madrid au cours de discussions abstraites : les participants de la table ronde ont considéré ensemble le cas d'un malade et confronté à son propos leurs conceptions psychiatriques. Même si, dans l'immédiat, le dialogue qui s'est institué n'a donné que des résultats limités, il prépare peut-être le retour de la psychiatrie au rang ordinaire des thèmes de travail en commun : débarrassées des servitudes doctrinales ou politiques, les expériences pourront être confrontées avec profit.

Pharmacologie

Avons-nous trop de médicaments ?

On consomme toujours davantage de médicaments. Dans tous les pays évolués, le progrès des sciences et des techniques médicales entraîne une augmentation constante de la consommation pharmaceutique.

Des enquêtes récentes révèlent que cette évolution n'est guère différente selon les niveaux socio-économiques : l'achat de médicaments entre dans les budgets familiaux comme une dépense incompressible.

Antibiotiques

À la gamme déjà étendue des antibiotiques, plusieurs substances nouvelles sont venues s'ajouter.

La rubidomycine, déjà isolée en 1963 par des chercheurs français, est maintenant expérimentée avec succès à l'hôpital Saint-Louis comme médicament antileucémique. C'est un antimitotique, c'est-à-dire qu'elle bloque la division cellulaire. Des rémissions importantes ont été obtenues dans des cas de leucémies lymphoblastiques aiguës sur lesquels les autres drogues restaient sans effet. L'action se manifeste dès le dixième jour après l'injection.

D'un champignon microscopique du sol brésilien, des chercheurs italiens ont isolé un antibiotique qui — fait exceptionnel — serait actif à la fois sur des tumeurs et sur des virus (poliomyélite, variole). Ce produit est actuellement expérimenté sur l'animal et sur des cultures embryonnaires humaines.