À ce dernier point de vue, il n'est que justice de signaler qu'en mars, lors d'une reprise de Pelléas et Mélisande par l'Opéra-Comique, on semble enfin avoir trouvé deux artistes de qualité exceptionnelle pour incarner le fameux couple. Il y a des années que l'on cherchait une bonne Mélisande et un bon Pelléas : Nicole Menut et Michel Llado paraissent répondre à de telles exigences et ont donné une série de représentations qui ont connu un succès vif et mérité, grâce à la qualité de leur voix et de leur interprétation.

Les jeunes et Messiaen

À côté de ces différentes formes d'activités, il convient de signaler aussi une expérience réalisée en février par la Maison de la culture de Thonon, de création toute récente (juin 1966). René Jauneau (qui s'est adjoint la collaboration de Camille Roy pour les questions musicales), a organisé une semaine Olivier Messiaen avec le concours du compositeur lui-même. Professeur et compositeur dont le rayonnement s'étend dans le monde entier, Olivier Messiaen a donné ici des cours, des conférences et des séminaires, participé à des concerts d'œuvres modernes (Debussy, Schönberg, Berg, Webern, Béla Bartok, etc.) qui ont attiré nombre de jeunes compositeurs français et étrangers, et mis le public de cette région en contact avec les réalités de la musique de notre temps de façon extrêmement efficace. La Maison de la culture de Thonon est la première de celles qui existent actuellement en France à avoir axé ainsi son action sur la musique (et sur la musique vivante) — les autres établissements de ce genre préférant s'en tenir aux activités théâtrales et cinématographiques, ou n'abordant la musique qu'en des manifestations de caractère plus traditionnel.

Au titre des faits musicaux dignes d'attention s'inscrit la publication, pour la première fois dans le monde, d'un fac-similé du manuscrit de la partition intégrale du Don Giovanni de Mozart, document d'un intérêt inestimable et qui a été réalisé par les éditions Maisonneuve de Metz.

Le concours Olivier-Messiaen

Un concours d'un style très particulier, le seul de son genre en France, a été créé en 1967, au festival de Royan : le concours international d'interprétation pianistique, consacré uniquement aux œuvres de musique moderne. Il porte le nom du compositeur Olivier Messiaen et prend place à côté des grands concours traditionnels, qui ont lieu à Paris, Genève et Munich, Bolzano, Bucarest, Moscou et Varsovie.

Quinze concurrents se sont présentés cette année, venus de différents pays.

Un Français, Michel Beroff, remporte la première place, devant Kaori Kimura (Japon) et deux Françaises : Rose-Marie Cabestany et Laurence Allix.

Le chant en France

L'école de chant français traverse actuellement une crise.

La langue française, avec son absence d'accents toniques, n'est pas la langue idéale de la musique lyrique. Mais la France n'en a pas moins connu, entre 1900 et 1939, quelques très bons chanteurs, doués de voix splendides. Si nous en avons encore, c'est en petit nombre. Combien d'artistes de classe internationale, à côté d'une Régine Crespin ?

La qualité moyenne des voix naturelles des débutants est bonne. Il n'y a pas là de défaillance alarmante. Le plus inquiétant est ce que l'on fait des voix, dans l'enseignement, dans l'usage professionnel et l'exercice du métier d'artiste lyrique.

Le travail d'école est certainement le premier responsable. Les méthodes de l'enseignement officiel ou privé sont évidemment à l'origine de ces émissions serrées, de ces aigus chevrotants, de ces médiums vides, si souvent déplorés.

Les carrières fondées sur la pratique de telles méthodes ne peuvent que gâter plus encore ce que l'enseignement a déjà attaqué dans les dons naturels.

Des améliorations sensibles sont cependant constatées dans de jeunes voix formées en France et qui sont ensuite allées se faire traiter par des méthodes milanaises ou viennoises. Mais rares sont les artistes français qui admettent la supériorité de ces dernières, ou qui ont la possibilité matérielle de s'offrir de telles cures.

Gilbert Amy, compositeur et chef d'orchestre, est le nouveau directeur du Domaine musical. Il succède à Pierre Boulez, fondateur des concerts du Domaine musical en 1954, qui a abandonné ses fonctions en mars 1967.