Mais on se demande s'il n'y a pas place pour un spectacle de télévision qui serait original, car le théâtre filmé n'est pas vraiment un art de télévision.

Dans le domaine des dramatiques traditionnelles, l'année n'a pas été spécialement riche. Parmi les créations, il faut citer le peu convaincant Coiffeur de Bosco Trecase, écrit spécialement pour la télévision par Félicien Marceau, Sacrés Fantômes d'Eduardo de Philippo, inégal sans doute mais finalement drôle, l'excellent Mark Twain les Aventures d'Huckleberry Finn dans l'adaptation de Claude Santelli, et loin derrière, Meurtre dans la cathédrale de T. S. Eliot, Mon cœur est dans les Highlands de Saroyan. Il faut encore mentionner le Siegfried de Jean Giraudoux, le Port-Royal de Montherlant et les Perses d'Eschyle, qui ont eu les honneurs d'une seconde diffusion.

Les Cinq Dernières Minutes, dramatique policière devenue plus rare, restent après plusieurs années le type même de l'émission qui touche à la fois le public par son intrigue et la critique par sa tenue.

Le film semble être devenu un moyen d'expression plus personnel à quelques grands réalisateurs : Michel Mitrani, Jean Prat, l'Espagnol ; Marcel Bluwal, Don Juan ; Jean Kerchbron, le Golem. Marchant sur les traces de Jean Renoir, qui tourna, voici plusieurs années, le Testament du docteur Cordelier pour la télévision, de grands metteurs en scène de cinéma font leur entrée à la télévision pour des opérations de prestige : Abel Gance (Marie Tudor), Roberto Rossellini (la Prise du pouvoir par Louis XIV), Orson Welles (l'Histoire immortelle).

D'autre part, l'année a amené une détente très nette dans les rapports télévision-cinéma. Les films présentés ne font pas tous figure de chef-d'œuvre, mais la sélection s'améliore : Ascenseur pour l'échafaud de Louis Malle, la Ciociara, l'Avventura d'Antonioni, la Femme à abattre et plusieurs Gabin sont venus rompre une monotonie de la médiocrité.

Les variétés

Certains voudraient en voir chaque soir, d'autres protestent contre leur diffusion trop fréquente. Les variétés restent le genre le plus contesté et le plus apprécié. Il en est de même pour Guy Lux, animateur à la fois le plus populaire et le plus décrié. Son Palmarès des chansons reste l'émission la plus suivie. Les Compagnons de la chanson, Georges Guétary, Jean Ferrat, Claude François, Salvador, Aznavour, Mariano, Jacques Brel, etc., tous y sont venus.

Dans les variétés d'un style moins conventionnel, pas de grande nouveauté non plus. Mis en pénitence sur la deuxième chaîne (Au risque de vous plaire) et séduit par les États-Unis, Jean-Christophe Averty tourne pour l'American Broadcasting Corporation C'est la vie, avec Maurice Chevalier, une émission que les téléspectateurs français ne verront qu'avec la couleur. Côté noir et blanc, les émissions d'Averty sont toujours jugées sévèrement. Tête de bois, tendres années réapparaît en février après huit mois d'absence, mais Albert Raisner semble bien avoir perdu la foi, et l'émission s'en ressent.

Rien de vraiment fascinant dans Tilt Magazine, de Michèle Arnaud, présenté par Michel Drucker, qui poursuit son chemin.

Le Sacha Show de Maritie et Gilbert Carpentier continue sa carrière. Sacha Distel réussit souvent à s'y renouveler.

Reportages et actualité

Les magazines qui concernent l'actualité obtiennent des indices de satisfaction moyens.

Au carrefour du reportage et de l'actualité, Cinq Colonnes à la une et Panorama sont également appréciés. Mais le public regrette que ces deux programmes fassent souvent double emploi.

L'émission de Roger Stéphane et de Roland Darbois avait la prétention d'inaugurer un genre nouveau : l'histoire racontée par ceux qui la font. La série Mémoires de votre temps veut évoquer les vingt années de la Libération à 1966, grâce aux témoignages des principaux acteurs. L'entreprise semble à beaucoup, surtout dans les premières émissions, marquée d'un souci politique qui reste étranger à la recherche historique.

Parmi les évocations historiques, Verdun obtient le prix de l'Association des critiques et informateurs de télévision. La Bataille d'Angleterre et la Bataille du désert, produites par la même équipe, sont également appréciées. Par contre, Valmy, de Jean Chérasse, est très contesté. « Contrairement à la règle qui veut qu'en matière d'histoire on ait le choix entre tromper le public ou l'ennuyer, Présence du passé cumule les deux défauts. C'est un exploit », écrit à ce propos le critique du Figaro.