Homme modeste et réservé, Henri Laurens est sans histoire. Né à Paris en 1885, il y est mort brusquement en 1954. En 1911, il se lie avec Braque d'une amitié qui durera toute sa vie.

Le cubisme de Laurens dépasse les principes théoriques du mouvement, et par cela même échappe à toute systématisation. « Avant d'être une représentation de quoi que ce soit, a dit Laurens, ma sculpture est un fait plastique et, plus exactement, une suite d'événements plastiques, de produits de mon imagination, une réponse aux exigences de la construction. » Et le miracle, c'est que, partant d'une pure construction abstraite, Laurens arrive à donner à la forme une sensibilité et une puissance expressive qui vont de pair avec une sensation de force et d'élégance.

L'art de Laurens reste monumental dans les œuvres de plus petites dimensions ; il est dégagé de toute anecdote comme de tout détail accidentel, il possède une puissance comme ramassée sur elle-même, et une grâce pleine d'évidence et de sensibilité.

200 sculptures, terres cuites, dessins, gravures et livres illustrés seront, après Paris, présentés à New York et à Tokyo, avant d'intégrer définitivement nos collections nationales. Elles sont à l'image de leur créateur, qui prétendait qu'une œuvre d'art « est l'expression de la qualité humaine de l'artiste ».

Exposition Dada
(30 novembre - 30 janvier)
Marcel Duchamp et Duchamp-Villon
(Juin - 2 juillet, musée national d'Art moderne)

L'exposition Dada, organisée en coproduction entre le Kunsthaus de Zurich et le musée national d'Art moderne de Paris, ainsi que l'hommage à Marcel Duchamp, présenté uniquement en ce dernier musée, sont venus à point nommé. Ces deux expositions nous ont rappelé historiquement ce que fut la grande aventure dada, et nous ont montré tout ce que nous lui devons encore aujourd'hui, tout en spécifiant les différences d'esprit qui peuvent exister entre Duchamp, Picabia, Man Ray et leurs compagnons, et ceux que nous appelons aujourd'hui les « Nouveaux réalistes », dont on a dit qu'ils faisaient resurgir l'esprit de Dada.

L'exposition dada a été conçue comme un vaste panorama, révélant l'étendue d'un mouvement né simultanément à Zurich, à New York et à Paris, dès 1915, et se propageant à travers bien d'autres pays. Certes, tout n'était pas dada dans cet important ensemble, où manifestes, poèmes, revues, tracts et déclarations péremptoires se mêlaient aux objets, collages, assemblages, etc. Selon les pays, l'expressionnisme chevauche Dada, mais l'important est de retenir l'esprit subversif et nihiliste qui anima au même moment des créateurs indépendants désirant faire table rase des conventions. C'est ainsi que les noms de Arp, Richter, Crotti, Schwitters ou Janco se joignent ici à ceux de Man Ray, Picabia, Marcel Duchamp et Max Ernst, aux côtés de ceux de Tzara, Ribemont-Dessaignes, Breton et Aragon.

Quant à l'exposition Marcel Duchamp, elle montra, avec quelques objets rarissimes, la suprématie de celui dont la vie entière fut à l'image de l'insolite et de la négation. Il était présenté au musée national d'Art moderne à côté de son frère, Duchamp-Villon, sculpteur ayant apporté au cubisme d'importants prolongements.

L'art brut
(Avril - juin, musée des Arts décoratifs)

La Compagnie de l'Art brut, dont les origines remontent à 1945, s'est fixé pour but de réunir en un musée privé des œuvres émanant d'autodidactes, primitifs, enfants, aliénés, asociaux condamnés par la justice, tous représentatifs d'un art brut que Jean Dubuffet, initiateur du groupe, oppose à ce qu'il appelle l'art culturel, produit de la conscience, de l'étude, du métier, etc.

En un très beau texte intitulé Place à l'incivisme, Dubuffet plaide pour ces œuvres créées en marge des professionnels.

Parmi les 5 000 sujets environ, répertoriés au musée de l'Art brut, près de 700 peintures, dessins, sculptures, objets ont été groupés. Ils forment un véritable défi à l'art des peintres culturels, montrant par leur invention le caractère naïf ou le plus souvent angoissé qui s'en dégage, que le talent ou le génie, tout comme le sens plastique, peuvent jaillir spontanément chez un créateur que rien ne semblait prédisposer à l'art.

Lumière et mouvement
Art cinétique
(18 mai - 24 août 1967, musée d'Art moderne)

Ceux qui fréquentent les expositions d'avant-garde connaissaient l'existence depuis une dizaine d'années de différentes recherches dans le domaine de l'art cinétique. Mais c'est la première fois que des énergies dispersées, nais convergentes, sont réunies dans un musée, prouvant l'importance et la cohésion d'une des tendances les plus intéressantes et les plus vivaces de l'art contemporain.