Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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La Rochejaquelein (Henri du Vergier, comte de),

général contre-révolutionnaire (Saint-Aubin de Baubigné, Deux-Sèvres, 1772 - Nuaillé, Maine-et-Loire, 1794).

Né dans la propriété familiale de La Durbelière, d'où son père, issu d'une vieille famille de noblesse d'épée, jouit d'une grande influence dans le Poitou, il est destiné à la carrière des armes et se retrouve sous-lieutenant dans le régiment paternel à l'âge de 13 ans. En 1792, il est admis dans la garde constitutionnelle de Louis XVI, puis défend le roi aux Tuileries le 10 août après la dissolution de ce corps. Il se réfugie ensuite dans sa province, alors que son père et ses frères ont émigré, noue des relations étroites avec son cousin, Louis-Marie de Lescure (lui-même futur chef contre-révolutionnaire), venu également de Paris avec sa jeune femme (elle-même future mémorialiste de la Vendée). En avril 1793, les paysans de sa région, connaissant ses sentiments, lui demandent de diriger leur insurrection : il accepte aussitôt et se retrouve dans l'état-major de la grande Armée catholique et royale, où il se fait remarquer par sa fougue - notamment lors de la prise de Thouars (5 mai). Après la disparition de Jacques Cathelineau et la blessure de d'Elbée, il est proclamé généralissime, sa jeunesse et son ardeur devant souder l'armée catholique divisée quant à ses objectifs ; il se charge de la « virée de Galerne », qu'il mène à bien jusqu'à Granville (14 novembre). Au retour, il parvient à franchir la Loire et reconstitue des bandes dans les Mauges, où il est tué par un soldat républicain qu'il allait faire prisonnier.

La Rocque (François de Séverac, comte de),

homme politique (Lorient, Morbihan, 1885 - Paris 1946).

Saint-cyrien, envoyé au Maroc alors que Lyautey est résident général, puis en 1917 sur la Somme, il devient membre de l'état-major de Foch après 1918. Il quitte l'armée dix ans plus tard avec le grade de lieutenant-colonel, et entre à la Compagnie générale d'électricité d'Ernest Mercier. Ce dernier et le parfumeur Coty appuient son ascension au sein des Croix-de-feu, qu'il préside à partir de 1931 et qu'il transforme avec succès en un véritable mouvement de masse. En 1934, dans Service public, il affirme vouloir « servir » et non « se servir », condamnant le communisme et le totalitarisme, les « deux cents familles », les monopoles et le « capitalisme irresponsable », déplorant enfin la « décadence » du pays, à laquelle il oppose le « culte de la tradition ». Dans les domaines économiques et sociaux, il défend l'aide aux familles nombreuses, le corporatisme, les limites au droit de grève, un salaire minimum garanti, la défense de la main-d'œuvre nationale par la limitation de l'immigration, et, au niveau politique, le vote familial, l'octroi de vrais pouvoirs au président de la République et un rapprochement avec l'Italie. S'expriment ici un traditionalisme tempéré par un catholicisme social, un conservatisme mâtiné d'un « esprit scout », bien davantage que le fascisme d'un « aspirant dictateur », tel que le dénonce alors la gauche avec virulence. Au contraire, La Rocque, qui aspire à gagner le pouvoir par les voies légales, est vilipendé par les vrais fascistes, et joue le jeu de la démocratie parlementaire par le truchement du Parti social français (PSF), qui succède aux Croix-de-feu en 1936. S'il est maréchaliste en 1940, il s'oppose à la politique de collaboration, entre ensuite dans la Résistance, avant d'être arrêté et déporté en Allemagne en 1943.

La Rouërie (conspiration de),

complot contre-révolutionnaire organisé dans l'Ouest. Sous-lieutenant des gardes françaises, le marquis Armand-Tuffin de La Rouërie prend part à la guerre d'Indépendance américaine après une jeunesse agitée, puis se retire en Bretagne.

Envoyé à Paris pour défendre les « antiques libertés de la nation bretonne » que Louis XVI et Lamoignon mettent à mal, il est jeté à la Bastille en juillet 1788. Après 1789, il se met en rapport avec le comte d'Artois qui, en 1791, approuve l'idée d'une « association bretonne » rassemblant des affidés pour faciliter le débarquement d'émigrés et de troupes. L'association, étendue à l'Ouest et liée à la conspiration du Midi, est soutenue par les nobles restés sur place, les prêtres réfractaires et les ruraux déçus ; des armes sont cachées dans les châteaux, des rassemblements organisés : à partir de 1792 les autorités s'en alarment. Des révoltes éclatent durant l'été, menées notamment par Jean Cottereau, dit Jean Chouan, en relation avec les conjurés. La conspiration est cependant éventée, et Danton en orchestre la répression. Des conjurés sont arrêtés, quelques-uns guillotinés, et le soulèvement général est remis sur ordre des princes. La mort de La Rouërie, en janvier 1793, porte un coup fatal à l'« association ». Si l'échec immédiat est indéniable, du moins cette conspiration - encore mal connue - a-t-elle créé un réseau qui a servi de soutien aux révoltes populaires et fourni les bases à la future contre-révolution vendéenne et chouanne.

La Salle (René Robert Cavelier de),

explorateur et fondateur de la Louisiane (Rouen 1643 - Louisiane 1687).

Issu d'une famille de riches négociants rouennais, il entre à l'âge de 16 ans chez les jésuites. Après avoir quitté la Compagnie de Jésus en 1667 sans avoir reçu les ordres majeurs, il part faire du commerce de fourrures dans la Nouvelle-France (Canada). Ses talents commerciaux et son don pour l'apprentissage des langues indiennes lui permettent de satisfaire son goût pour l'exploration. Dès 1669, il parcourt la région de l'Ohio dans le but de découvrir un passage vers l'Orient. Pour le récompenser de son courage et de sa participation à la construction de forts (fort Frontenac), Louis XIV l'anoblit en 1675. En 1678, il reçoit le droit d'explorer les territoires de l'Ouest. Il est le premier à descendre le Mississippi jusqu'à son delta (golfe du Mexique), et, en l'honneur de son roi, baptise cette région « Louisiane » (9 avril 1682). En annexant toute la vallée du Mississippi, il étend considérablement l'emprise de la France en Amérique du Nord. Après un rapide séjour à Versailles, au cours duquel il présente au roi ses découvertes, il repart avec quatre cents colons et soldats. Mais il se perd dans les marécages et ne retrouvera jamais « sa » Louisiane. En effet, épuisés par les longues recherches et par les exigences excessives de leur chef, des hommes de l'expédition se mutinent et assassinent Cavelier de La Salle le 19 mars 1687. Les possessions françaises en Amérique ont alors atteint leurs limites ; elles ne feront que diminuer par la suite.