Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
L

Landru (affaire),

célèbre affaire criminelle (1919-1922).

Arrêté le 13 avril 1919, à la suite des plaintes déposées par les familles de deux femmes disparues dans des conditions similaires, Landru, marié et père de quatre enfants, auteur de nombreuses escroqueries, est bientôt découvert comme l'auteur du meurtre de dix femmes, auxquelles il avait promis le mariage, et qu'il avait dépouillées de leur fortune. Pour trouver ses victimes idéales, Landru a rencontré 283 femmes, abordées en public ou choisies sur petites annonces. Il en a méthodiquement sélectionné dix, qui furent toutes ses maîtresses. Pour préparer ses crimes, ce grand séducteur consignait tous les renseignements sur des fiches et utilisait plusieurs appartements, des garages, une voiture et deux villas. Sa stratégie consistait à se fiancer à des jeunes filles seules ou à des veuves, à les isoler progressivement de leur famille et à les dépouiller, dans la mesure du possible, de leur vivant ; ensuite, il les assassinait dans son pavillon de Gambais, faisait disparaître les corps et, enfin, récupérait leurs biens grâce à de faux documents.

Le public fut horrifié par l'incroyable logistique criminelle mise en place par cet homme, ignorée de tous, même de sa femme et de sa maîtresse, mais aussi par l'absence de motif réel, puisque les frais de son organisation étaient à peine couverts par ses gains. Les psychiatres chargés d'examiner Landru, qui nia ses assassinats jusqu'au bout, déclarèrent qu'il n'était pas aliéné mais dénué de tout sens moral. C'est donc après avoir été jugé responsable de ses crimes qu'il fut condamné à mort, et exécuté le 25 février 1922.

Langevin (Paul),

physicien (Paris 1872 - id. 1946).

Issu d'un milieu modeste fortement imprégné des valeurs républicaines, Langevin entre, à l'âge de 16 ans, à l'École de physique et chimie industrielle de la Ville de Paris, seul établissement accueillant alors ceux qui n'ont pas étudié au lycée. Sur les conseils de Pierre Curie, qui y enseigne, il se présente à l'École normale supérieure et y est reçu premier en 1893. Après sa thèse (1902), il est nommé professeur au Collège de France et succède à Pierre Curie à l'École de physique et chimie industrielle (1904), dont il deviendra directeur en 1925. Dès 1905-1906, alors qu'il élabore une théorie sur les propriétés magnétiques des corps et l'électromagnétisme, il découvre les travaux d'Einstein sur la relativité restreinte. Partisan de la diffusion d'idées nouvelles, il crée en 1911 les « congrès Solvay », réunissant des grands noms de la physique. Il fait connaître les travaux de son élève Louis de Broglie sur la mécanique ondulatoire et invite, en 1922, Albert Einstein à Paris.

Convaincu que la science et l'enseignement doivent permettre un progrès de la justice sociale, Langevin est aussi un homme de gauche. Enseignant, comme Romain Rolland et Henri Barbusse, à l'Université ouvrière, il affirme son rôle politique au lendemain du 6 février 1934. Il fonde, avec le philosophe Alain et le professeur Paul Rivet, le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes : l'animation de ce comité, qui joue un rôle important dans la formation du Front populaire, témoigne de son évolution politique qui le rapproche du Parti communiste français. Dès 1940, ses prises de position lui valent l'hostilité du régime de Vichy, qui le révoque de ses postes de professeur et le fait arrêter à plusieurs reprises. Évadé à la fin de la guerre, il adhère au PCF en 1944 pour prendre la place, dit-il, de son gendre Jacques Solomon, fusillé par les Allemands. Après la Libération, son activité reste intense : il est à la tête de la Ligue des droits de l'homme et président de la commission ministérielle pour la réforme de l'enseignement, dont le rapport, connu sous le nom de « plan Langevin-Wallon », est rendu public en 1947.

Lang Son (défaite de),

revers passager du corps expéditionnaire français face à l'armée chinoise, le 28 mars 1885, lors de la conquête du Tonkin, et qui provoqua la chute du gouvernement Jules Ferry.

Revenu au pouvoir en février 1883, Ferry assigne un nouvel objectif aux missions françaises en Indochine : il s'agit désormais de conquérir le Tonkin. Un corps expéditionnaire de 20 000 hommes, appuyé par la flotte, obtient dès 1883 la soumission de l'empereur d'Annam puis, en 1884, contraint la Chine à demander la paix. Les hostilités reprennent pourtant en 1885. La colonne du général Négrier reçoit l'ordre de pénétrer en Chine. Mais, le 22 mars, une contre-offensive chinoise force l'armée française à se replier sur Lang Son, qu'elle venait d'occuper. Les combats se poursuivent autour de la ville : le 28 mars, les Français remportent un combat à l'issue duquel Négrier est grièvement blessé. Mais son adjoint, le lieutenant-colonel Herbinger, pris de panique, évacue la place. Un télégramme envoyé à Paris par le commandant en chef Brière de l'Isle dramatise alors involontairement la situation, laissant supposer une grave défaite. Pourtant, dès le 29 mars, la situation militaire est rétablie. En juin, la Chine demandera d'ailleurs la paix. Mais la dépêche provoque un émoi considérable à l'Assemblée, et Ferry est très violemment pris à partie par les adversaires de la colonisation, menés par Clemenceau. Son gouvernement est renversé : Lang Son est ainsi l'un des rares exemples de crise ministérielle déclenchée par un événement de politique extérieure. Elle témoigne de la fragilité de la position de Ferry : une simple rumeur suffit à abattre son gouvernement alors que sa politique sera bientôt couronnée de succès.

langue d'oc,

langue romane utilisée dans les régions méridionales de l'ancienne Gaule romaine à partir des IXe et Xe siècles.

Comparée à la langue d'oïl, la langue d'oc apparaît assez tardivement. On peut expliquer ce décalage par la vigueur de la culture et de la langue latines jusqu'au VIIe siècle, ainsi que par la profonde crise de la culture écrite dans les pays méridionaux aux VIIIe et IXe siècles, dont témoigne notamment la disparition des scriptoriums monastiques. Mais la Chanson de sainte Foi (début du XIe siècle), les poèmes de Guillaume IX d'Aquitaine (1071-1127) et la rédaction des premières chartes en occitan (début du XIIe siècle) marquent la renaissance culturelle du Midi et l'avènement d'une langue et d'une littérature d'oc. Aux XIIe et XIIIe siècles, la langue d'oc apparaît comme la langue propre à une civilisation. En effet, en dépit de sa rapide subdivision en plusieurs dialectes (limousin, provençal, languedocien, gascon...), elle demeure la langue véhiculaire de tout le Midi, ce que remarque Dante, qui est le premier à utiliser l'expression lingua d'oco. La poésie lyrique et politique des troubadours promeut par ailleurs une culture laïque et aristocratique originale, fondée sur les valeurs de la courtoisie. Enfin, l'essor de l'écrit dans les sociétés méridionales fait de la langue d'oc une langue administrative, reconnue par l'administration royale française au XIVe siècle.