Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Fronde (suite)

Les affrontements militaires donnèrent à la Fronde des allures de guerre civile. Au temps de Richelieu, les soldats n'avaient eu à affronter que des paysans lors des révoltes populaires ; pendant la Fronde, au contraire, ce furent des troupes organisées qui s'opposèrent. L'engagement alla très loin, puisque Condé sollicita l'aide de l'ennemi espagnol.

Pourtant, la Fronde ne fut pas une révolution. La monarchie ne fut jamais remise en cause, et aucune transformation institutionnelle ne s'imposa. Mazarin fut le bouc émissaire et ce fut sur lui que portèrent les attaques. Par ses deux exils, Mazarin sut jouer de cette réalité. Il sut également utiliser les uns contre les autres les frondeurs, qui ne furent pas durablement unis, du fait de leurs intérêts très divergents.

Ces divergences empêchèrent l'expression d'un programme clair qui eût pu trouver un soutien plus unanime. En effet, derrière des proclamations audacieuses, il s'agissait surtout de conserver des avantages anciens face aux entreprises de la monarchie administrative. La Fronde regardait en arrière plutôt qu'en avant.

L'absence d'unité et de projet clair explique que le mouvement n'ait jamais touché réellement toute la population. Les campagnes s'étaient révoltées contre les impôts nouveaux, mais elles ne se reconnurent pas longtemps dans l'agitation urbaine des privilégiés. Les parlementaires parisiens ou la grande noblesse ne purent s'appuyer sur des couches sociales susceptibles d'entraîner les Français, à l'instar de la gentry anglaise au temps de Cromwell. Aucune idéologie et aucun idéal ne permirent une mobilisation générale contre la régence, alors que Charles Ier d'Angleterre s'était aliéné une partie des protestants.

Les troubles provoquèrent rapidement la lassitude du plus grand nombre. Les excès, la violence, les affrontements militaires, firent désirer un retour à l'ordre.

La Fronde fut bien une réaction collective à un changement continu de la monarchie, toujours plus autoritaire, plus centralisée, plus administrative. Les frondeurs souhaitaient, pour leur part, le retour à un âge d'or mythique, à une monarchie contrôlée par sa noblesse et ses officiers. L'échec final de la Fronde fut un encouragement pour une monarchie dans laquelle le roi allait dorénavant affirmer plus hautement encore son autorité, imposer ses exigences financières, œuvrer à sa gloire à l'intérieur et à l'extérieur du royaume, demandant à ses sujets d'y travailler avec lui.

frontières naturelles,

frontières dont le tracé correspond à un obstacle géographique.

L'expression recouvre en fait une idée politique selon laquelle les territoires nationaux posséderaient des limites fixées par la nature. L'historiographie du XIXe siècle a largement admis que la politique extérieure de la Révolution française aurait eu comme objectif - de même que celle des rois capétiens - la conquête des « frontières naturelles » de la France (Pyrénées, Alpes, Rhin). Cette thèse, l'historien Gaston Zeller l'a définitivement réfutée en 1933 et 1936, en montrant que la politique d'annexion de la monarchie n'était fondée sur aucune idéologie des frontières, mais reposait sur des impératifs stratégiques changeants. Néanmoins, le thème des frontières naturelles est ancien. En effet, aux XVIIe et XVIIIe siècles, les historiens diffusent l'hypothèse d'une filiation entre la Gaule et le royaume de France. Par ailleurs, les philosophes des Lumières cherchent à établir des causalités rationnelles à la politique extérieure des États. L'idée que la nature semble avoir imposé des limites à l'expansion territoriale des nations séduit l'opinion éclairée, sans qu'il s'agisse en rien d'une justification d'une politique de conquête ; au contraire, elle est utilisée, le plus souvent, pour appuyer une conception défensive de la politique extérieure.

Dans les trois premières années de la Révolution, les frontières naturelles sont à l'arrière-plan du débat politique ; mais la guerre déclarée en avril 1792 et, surtout, l'entrée des troupes françaises en Savoie, en Rhénanie et en Belgique, en septembre, donnent une nouvelle actualité au thème, particulièrement présent en octobre et en décembre 1792. Ainsi, l'abbé Grégoire l'utilise-t-il - avec d'autres arguments - dans son rapport du 27 novembre 1792 qui conclut à la nécessité de réunir la Savoie à la France. Pourtant, on ne saurait mettre sur le même plan son maniement par tous les orateurs révolutionnaires. Il est particulièrement important chez Cloots, mais il n'est qu'un argument parmi d'autres pour Danton, Carnot ou Brissot ; en revanche, il est à noter que les révolutionnaires opposés à la guerre de conquête (Robespierre, Desmoulins...) évitent d'employer ce type de rhétorique. Pendant la période thermidorienne et directoriale, la frontière du Rhin devient un sujet capital dans le débat qui oppose partisans de la paix et des anciennes limites (Barthélemy, Carnot...), et partisans de la conquête (Reubell, Sieyès...). Le thème des frontières naturelles apparaît donc non pas comme une « théorie » achevée des relations entre les peuples, mais plutôt comme un argument chargé de sens différents, voire contradictoires.

Front national,

principal support de la résistance politique communiste de 1941 à 1945.

En mai 1941, la direction du Parti communiste charge Georges Marrane de constituer un « Front national de lutte pour l'indépendance de la France ». Sur le modèle des fronts antifascistes de l'avant-guerre, il s'agit de fédérer les oppositions à Vichy. Mais l'entrée en guerre de l'Union soviétique, en juin 1941, change les données du problème : le Front national devient le principal élément de la résistance politique du PCF contre l'occupant.

L'organisation du Front national par corporations permet au Parti communiste de pénétrer des milieux jusqu'alors hostiles : se créent ainsi des fronts des médecins, des avocats, des écrivains (sous la houlette d'Aragon, qui organise le Centre national des écrivains). Le Front national diffuse une presse abondante, aussi bien régionale (la Marseillaise) que corporatiste (le Palais libre). Séduites par l'activisme communiste, des personnalités aussi différentes que Georges Bidault, Jacques Debû-Bridel, Louis Marin et même Mgr Chevrot rejoignent le Front national. Pourtant, derrière ce faux œcuménisme, les communistes contrôlent les postes de direction.