Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
F

fief,

bien assigné par le seigneur à son vassal en récompense de l'hommage que celui-ci lui prête et en rémunération des services d'aide et de conseil qu'il lui rend.

Le mot « fief » dériverait du vieux germanique feo (« bien », « objet de prix »). Il commence à se substituer au mot « bénéfice » dans le courant du Xe siècle, et, dès le XIe siècle, les chartes ne font plus de différence entre les deux notions.

Du « bénéfice » au « fief ».

• Au début des temps carolingiens, Charlemagne est parvenu à imposer à l'aristocratie l'usage de la « recommandation » (faire acte de soumission envers un protecteur) afin de consolider la structure hiérarchique de cette classe dominante. Le bénéfice est alors un don gratuit et conditionnel, qui n'est pas lié directement à l'exécution d'un service. Octroyé en toute libéralité par le seigneur, il est aléatoire, viager, et révocable à tout instant. En outre, la concession prend fin à la mort du seigneur. Le successeur de ce dernier peut la renouveler comme décider de ne pas le faire. Bien évidemment, ce renouvellement est lié à celui de la recommandation. Pour le bénéficiaire, deux problèmes généraux se posent : celui de la stabilité du bien concédé (comment être maintenu dans la jouissance de la terre ?) et, en corollaire, celui de son insertion dans le patrimoine familial (comment en faire hériter ses enfants ?).

Cependant, par divers glissements, ce bien devient, dans le courant du Xe siècle, la justification des obligations vassaliques. Dès lors, une forme de contrat s'instaure entre le seigneur et son vassal, qui suppose une parité : le service ne découle plus d'un état, la vassalité, mais de la rémunération anticipée que constitue le fief. Ce dernier n'est donc plus le résultat d'un geste de générosité du seigneur, mais un « don qui oblige ». Le bénéficiaire est contraint d'exécuter un certain nombre de prestations par le fait même qu'il a reçu la jouissance d'un bien. Le fief ne s'inscrit donc plus dans la même réalité juridique que le bénéfice.

Le détenteur d'un bénéfice n'a toujours aucun droit réel sur la terre qui lui assure son revenu ; ce bénéfice peut être remplacé au gré du seigneur et, surtout, il n'est pas héréditaire. Le droit du vassal sur le bien considéré demeure donc précaire, même si les chances de transmission aux descendants s'accroissent progressivement.

Hérédité des fiefs.

• Elle est acquise, au plus tard, au début du XIe siècle. En outre, l'attribution d'un fief devient alors irrévocable. Les vassaux ne sont cependant toujours pas pleinement propriétaires : ils n'ont que ce que les juristes appellent « un droit utile », le seigneur conservant le droit éminent. Ainsi, le vassal ne peut aliéner la terre qu'avec le consentement du seigneur, qui ne l'accorde que s'il a la garantie de la continuité du service. Et, dans la mesure où le service est dû en contrepartie d'une terre, et non d'une allégeance personnelle, il n'existe aucune objection majeure à ce qu'un vassal prête des hommages multiples et obtienne des fiefs de plusieurs seigneurs. Il y a là un élément important si l'on veut comprendre le système féodal : un même personnage peut être le vassal de deux hommes ennemis. Ces positions d'intermédiaires peuvent sembler paradoxales : en apparence, elles créent une grande instabilité et empêchent la mise en place d'une véritable organisation hiérarchique ; en réalité, elles sont garantes de la stabilité de l'ensemble, chacun ayant toujours intérêt à la pacification des conflits et, lorsque ceux-ci éclatent, à empêcher qu'ils ne s'enveniment.

À partir du XIIe siècle, et jusqu'à la Révolution, le fief est la forme normale de la propriété noble.

Fieschi (attentat de),

tentative d'assassinat du roi Louis-Philippe.

Le 28 juillet 1835, vers midi, alors qu'il passe en revue la Garde nationale sur les boulevards pour fêter, comme chaque année, l'anniversaire des Trois Glorieuses, Louis-Philippe échappe au feu meurtrier d'une machine infernale. Autour de lui sont fauchées des dizaines de personnes : dix-huit d'entre elles succombent, parmi lesquelles le maréchal Mortier, plusieurs officiers supérieurs, des gardes nationaux, des spectateurs de tous âges et de toutes conditions. C'est un aventurier corse de 45 ans nommé Giuseppe Fieschi qui, installé dans une maison du boulevard du Temple, a simultanément actionné vingt-quatre canons de fusil bourrés de mitraille, liés sur un châssis incliné. Il est arrêté, ainsi que deux complices, l'épicier Pépin et le bourrelier Morey, membres de la Société des droits de l'homme. Les trois individus sont condamnés à mort, et exécutés le 19 février 1836, sans que soit démontrée l'implication directe du parti républicain.

Ce drame donne lieu à de multiples manifestations d'attachement au roi et de fidélité au régime. Il fournit le prétexte d'un ensemble de lois, votées en septembre 1835, qui brident notamment la liberté de la presse. Il représente aussi une étape importante dans l'histoire de la monarchie de Juillet : Louis-Philippe commence à prendre ses distances par rapport à une capitale qu'il aimait parcourir à pied ou à cheval. Plusieurs autres attentats manqués, dans les années suivantes, ne feront qu'accentuer ce divorce.

Figaro (le),

périodique repris en 1854 par Hippolyte de Villemessant, et devenu au XXe siècle l'un des grands quotidiens nationaux.

Un journal à l'identité incertaine.

• Avant le Figaro existait Figaro : créé en 1826 par un chansonnier (Étienne Arago) et un vaudevilliste (Maurice Alhoy), ce bihebdomadaire s'attira, dans les dernières années de la Restauration, les foudres du pouvoir en raison de ses attaques anticléricales et de son persiflage politique ; sous la monarchie de Juillet, le journal passa aux mains du républicain Henri de Latouche, qui s'entoura de plumes de talent (George Sand, Jules Sandeau, Alphonse Karr, etc.).

En 1854, Figaro est racheté par Villemessant, jusqu'alors chroniqueur de mode et fondateur de journaux féminins. Sous sa direction, le titre - hebdomadaire, puis quotidien à partir de 1866 - devient l'un des fleurons de la presse « littéraire » : traitant, d'un style alerte et élégant, le fait divers comme la politique, ses journalistes s'attachent un lectorat bourgeois, qui s'encanaille gentiment en lisant ses « petites correspondances » : de moins de 25 000 en 1866, le tirage moyen grimpe à plus de 80 000 au début des années 1880 !