Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
E

Éloi, (suite)

Le culte d'Éloi se répand très vite dans les campagnes de la Gaule, et il est bientôt considéré comme un saint. Saint patron des orfèvres, des forgerons, des bijoutiers, des maréchaux-ferrants et des charretiers, il a donné son nom à nombre de communes de France. Il est fêté deux fois dans l'année : le 1er décembre, date de sa mort, et le 25 juin, où l'on commémore la translation de ses reliques à la cathédrale de Noyon, en 1066.

Élysée (palais de l'),

palais situé à Paris, à l'angle de la rue du Faubourg-Saint-Honoré et de l'avenue de Marigny, résidence du président de la République depuis 1873.

Construit en 1718, le palais est restauré après son acquisition par Mme de Pompadour en 1753. Revenu au roi en 1764, acheté par un financier en 1773, il est acquis par Louis XVI en 1786. Pour peu de temps : la Révolution en fait une propriété nationale, et il devient un lieu de divertissements publics sous le nom de « Hameau de Chantilly ». En 1805, Napoléon l'offre à sa sœur Caroline Murat. Restitué trois ans plus tard par celle-ci, habité temporairement par Joséphine, et par Napoléon, qui y signe sa seconde abdication le 22 juin 1815, il est ensuite donné par Louis XVIII au duc de Berry. Sous Louis-Philippe, on y accueille les hôtes étrangers du monarque, avant qu'il ne devienne, durant l'éphémère IIe République, la demeure du président. Remanié et agrandi sous le règne de Napoléon III, il devient en 1873 la résidence officielle du président de la République.

Le palais a subi, au cours du dernier siècle, divers réaménagements. L'histoire du lieu s'efface aujourd'hui derrière sa fonction institutionnelle et son rôle symbolique. Dans les commentaires politiques, le mot désigne désormais la présidence et l'ensemble de ses services. Depuis l'avènement de la Ve République, l'Élysée polarise les stratégies de conquête du pouvoir des différents partis ; mais il symbolise également - comme l'ont prouvé les périodes de cohabitation et les fréquents antagonismes entre l'Élysée et Matignon - l'exigence nationale d'une autorité transcendant les partis.

émigrés,

Français exilés entre 1789 et 1814, à cause de la Révolution.

Considérés comme des ennemis et des traîtres à la patrie, les émigrés, volontiers confondus avec les aristocrates, symbolisent, dans la France révolutionnaire, l'Ancien Régime et la Contre-Révolution, et sont combattus par une législation de plus en plus répressive, jusqu'à la politique d'apaisement du Consulat. Contrairement à une idée reçue, les émigrés, dont on estime le nombre à environ 150 000 - soit 0,6 % de la population -, appartiennent surtout au tiers état (51 %), le clergé ne représentant que 25 % de l'ensemble, et les nobles 17 %. Phénomène hétérogène, socialement et politiquement, l'exode, qui croît par vagues successives de l'été 1789 à l'été 1794, connaît deux phases principales, dont la ligne de partage correspond à la chute de la monarchie, en août 1792.

La première émigration.

• Avant l'été 1792, l'émigration, motivée par la volonté de combattre la Révolution ou de fuir les troubles, est surtout nobiliaire. Elle s'organise autour des frères de Louis XVI, et, dans un premier temps, du comte d'Artois, futur Charles X, qui s'exile dès le 16 juillet 1789. Suivi par les principales personnalités de la cour, il complote pour soulever le pays et obtenir l'intervention étrangère, d'abord en Italie, avec le comité de Turin, puis en Rhénanie, à Coblence. Rejoint en 1791 par le comte de Provence, futur Louis XVIII, il supervise la formation d'une armée composée d'officiers de l'armée royale mais aussi de roturiers. Le 9 novembre 1791, l'Assemblée nationale, qui s'est d'abord montrée indulgente, somme les émigrés de rentrer en France sous peine de mort, une peine qui est annulée par le veto royal. Le 8 avril 1792, à la veille de la guerre, elle vote la confiscation de leurs biens, futurs biens nationaux, tandis qu'une liste officielle des émigrés commence à être dressée.

Cause de la guerre en 1792, cette émigration contre-révolutionnaire, favorable à une restauration monarchique intégrale, turbulente, futile et divisée, est un échec : tenue à l'écart lors de la campagne militaire de 1792, l'armée émigrée est dispersée après la bataille de Valmy. Dès lors, une partie des émigrés se met au service des coalisés, tente des opérations dans l'Ouest, complote ou espionne, tandis que nombre d'entre eux errent à travers l'Europe.

La deuxième émigration.

• Après août 1792, dans une période où le nombre d'exilés double, les départs sont surtout forcés et concernent toutes les classes de la société. Dans un climat de guerre et de troubles intérieurs, et à la suite de la radicalisation politique et de la Terreur, toutes sortes d'opposants ou de proscrits, aux options politiques divergentes, quittent la France : prêtres réfractaires menacés de déportation par le décret du 26 août 1792, girondins, vendéens, habitants des frontières, paysans, bourgeois et suspects divers. Le décret du 25 octobre 1792 prévoit leur bannissement ou leur condamnation à mort ; il est ensuite renforcé par celui du 28 mars 1793, qui impose l'exécution immédiate des exilés de retour en France, et par la « loi des suspects » du 17 septembre, qui frappe leurs parents.

L'apaisement.

• Si la chute de Robespierre et la fin de la Terreur portent un coup d'arrêt à l'exil massif et entraînent des retours clandestins, la législation punissant de mort les émigrés reste en vigueur sous le Directoire, en butte au péril royaliste. Toutefois, ce régime autorise dès février 1796 les demandes de radiation de la liste des émigrés. Sur l'impulsion de Bonaparte, soucieux de rallier les révolutionnaires modérés et l'ancienne noblesse, le Consulat adopte une politique de réconciliation nationale. En octobre 1800, une série d'arrêtés permettent de radier la moitié des noms de la liste officielle et de restituer des biens saisis non vendus. Puis le Concordat de 1801 entraîne le retour des prêtres exilés. Enfin, le sénatus-consulte du 6 floréal an X (26 avril 1802) accorde une amnistie générale - à l'exception des auteurs d'opérations militaires contre la France -, provoquant des retours massifs. Seuls restent exilés quelques irréductibles, ultras et fidèles, qui ne rentrent qu'à la Restauration. Quant à la question très débattue des biens nationaux, dont la vente est garantie par la charte de 1814, elle est définitivement résolue par la loi d'indemnisation - le « milliard des émigrés » - du 27 avril 1825.