Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
D

demi-solde,

officier de la Grande Armée qui est placé en non-activité et ne touche plus que la moitié de sa solde. Ils sont 20 000 en 1815.

La démobilisation a ainsi rendu à la vie civile des officiers dont l'existence était vouée au métier militaire, partagés entre l'aventure des campagnes et un train de vie aisé durant les rares périodes de paix. C'est pourquoi certains ont choisi l'exil et repris du service dans des armées étrangères. Quelques-uns se complaisent dans une bohème militaire, dépensant leur solde réduite dans le jeu et la boisson. Assignés à résidence sur leur lieu de naissance, nombreux sont ceux qui se réinsèrent dans la vie civile en reprenant une exploitation familiale ou en complétant leur demi-solde par l'exercice d'une profession souvent libérale. Ainsi, le chirurgien en chef et baron Larrey se reconstitue une clientèle pour entretenir son ménage. Toutefois, Jean Vidalenc a démontré que l'image du demi-solde bonapartiste et éternel conspirateur relève largement de la légende. Le groupe compterait finalement un nombre restreint d'opposants à la monarchie restaurée. Du reste, ils ne sont plus que 5 400 en 1823, bien des officiers généraux ayant été finalement réintégrés, tandis que des royalistes trop zélés ont été placés en demi-solde en 1818.

démocratie chrétienne,

courant politique inspiré du catholicisme libéral de Félicité de Lamennais et de l'encyclique Rerum novarum (1891), dans laquelle le pape Léon XIII condamne le socialisme, les excès du capitalisme, et définit la doctrine sociale de l'Église.

Les abbés démocrates, tels l'abbé Trochu ou l'abbé Lemire, élu député d'Hazebrouck en 1893, implantent ce courant dans les terres de la chrétienté rurale. En 1896, l'Association catholique de la jeunesse française fonde à Reims le Parti démocratique chrétien, combattu par les catholiques traditionalistes. L'inorganisation du parti et l'intervention du pape désireux d'éviter la division des catholiques vouent cette tentative à l'échec. Marc Sangnier est confronté à la même opposition : son journal et mouvement, le Sillon, qui a pour but de réaliser la république démocratique, tenue pour le régime politique chrétien par excellence, est condamné par Pie X en 1910. Sangnier s'incline et lance, sans référence à l'Église, la Jeune République, qui végète.

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, Champetier de Ribes et Raymond Laurent fondent le Parti démocrate-populaire et le Petit Démocrate, journal qui tire à 20 000 exemplaires. Le parti n'obtient que 2 à 3 % des voix, et une vingtaine de députés, qui participent aux majorités de droite, s'opposent au Cartel des gauches en 1924 et au Front populaire. Hostiles aux accords de Munich, puis au maréchal Pétain, les démocrates-chrétiens sont présents dans la Résistance à travers le mouvement Combat, où se retrouvent Georges Bidault, François de Menthon, Pierre-Henri Teitgen. En 1944, ceux-ci comptent parmi les fondateurs du Mouvement républicain populaire (MRP), qui s'impose comme l'une des composantes du tripartisme aux côtés de la SFIO et du PCF, et remporte 25,9 % des suffrages en novembre 1946. Après 1947, le MRP devient le pivot des majorités de troisième force, et défend ardemment la construction européenne à travers l'action de Bidault et de Robert Schuman. Mais, face à la concurrence gaulliste, il voit son audience s'effriter. Ce déclin s'accentue sous la Ve République : le MRP disparaît, en 1966, au profit du Centre démocrate, mené par l'antigaulliste Jean Lecanuet. Ce dernier fonde en 1976 le Centre des démocrates sociaux (CDS), qui participe à la création de l'UDF en 1978. Formation d'opposition en 1981, le CDS participe ensuite aux gouvernements de cohabitation. En 1996, François Bayrou transforme le CDS en Force démocrate, ultime métamorphose qui masque mal les difficultés d'implantation de la démocratie chrétienne dans une France laïque où elle ne parvient pas à former un grand parti du centre.

Denain (bataille de),

bataille décisive de la guerre de la Succession d'Espagne, remportée le 24 juillet 1712 par les troupes françaises.

Depuis 1708, celles-ci ont accumulé les revers sur le front du Nord. Chef des coalisés, le prince Eugène de Savoie veut, lors de la campagne de 1712, enfoncer la ligne de défense française et marcher sur Paris. Après la prise du Quesnoy le 6 juillet, Landrecies, sur la Sambre, est le dernier verrou qui lui résiste. Pour l'assiéger, il a été contraint d'étirer ses lignes ; entre son camp de Marchiennes, sur la Scarpe, au nord, et Landrecies, Denain contrôle le passage sur l'Escaut et la voie du ravitaillement. Sur les avis d'un magistrat de Douai, Robert Lefebvre d'Orval, le maréchal de Villars met au point une audacieuse manœuvre. Le 23 juillet, des attaques de diversion font croire que les Français veulent dégager Landrecies. Mais, dans la nuit, Villars entreprend une marche de vingt kilomètres avec le gros de ses troupes qui, au matin, le mène sur l'Escaut. Le prince Eugène sous-estime le danger, et, quand l'attaque se déclenche, il est trop tard. L'infanterie française enlève le camp de Denain au prix de quelque 500 morts. Eugène doit se retirer, laissant 2 000 morts et 3 000 prisonniers. Dans la foulée, Marchiennes est emportée. La « surprise de Denain » sauve la France de l'invasion, et ouvre la voie à la reconquête de la Flandre. Surtout, elle survient à un moment où l'Angleterre décide d'abandonner la coalition contre la France, et hâte la marche vers la paix, scellée l'année suivante par le traité d'Utrecht.

départements,

unités territoriales, administratives et électorales créées en 1789.

Avant cette date, la division administrative de la France est caractérisée par la multiplicité et l'enchevêtrement des différentes circonscriptions, par la variété de leur taille, de leur statut, de leurs privilèges, de leur droit (coutumes) et de leurs institutions. Les esprits éclairés du XVIIIe siècle prônent une réforme unificatrice, mais seule la rupture révolutionnaire permettra une refonte totale du système : en quelques mois, les constituants en définissent un nouveau, qui, dans ses grandes lignes, demeure le nôtre aujourd'hui.