Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

confrérie, (suite)

Des confréries de métiers...

• Ce sont elles les plus nombreuses, qui organisent la vie religieuse de leurs membres, renforçant ainsi la cohésion de ces groupes qui reposent sur une activité économique commune. Cependant, les deux structures ne se superposent pas strictement : certains métiers comportent plusieurs confréries, certaines confréries sont ouvertes à plusieurs métiers. Dans tous les cas, la confrérie - qui, à l'instar du métier, est plus ou moins intégrée aux rouages du gouvernement urbain - est investie, dès le XIIIe siècle, par les membres du patriciat urbain, et devient un instrument de contrôle social. Elle garde, jusqu'à l'époque moderne, une dimension politique plus ou moins explicite. En effet, les confréries se donnent pour projets d'assurer la concorde entre leurs membres, et de désamorcer tous les conflits. Le moment essentiel dans la vie confraternelle est souvent, au Moyen Âge, le repas pris en commun, qui constitue un rituel de paix. Certaines confréries ne se manifestent véritablement qu'une fois l'an : on revêt la tenue du groupe, on participe au banquet (souvent financé par les notables), on assiste à la messe solennelle, on célèbre le saint patron, et on s'adonne à divers rites d'initiation et de sociabilité. D'autres encadrent plus strictement la vie religieuse des laïcs, mais la vérité intime du mouvement confraternel s'exprime peut-être dans les statuts de la confrérie du Saint-Sacrement de la paroisse de Coësmes, dans le diocèse de Rennes : « Malheur à celui qui est seul, car s'il tombe personne ne sera là pour le relever. » La confrérie est une famille de substitution, qui permet de se prémunir contre les maux du temps. Pendant la grande crise démographique du XIVe siècle, ce rôle d'assistance morale et matérielle aux pauvres, aux malades, aux veuves et aux orphelins devient central. Certaines confréries - par exemple, dans la région d'Avignon, aux XIVe et XVe siècles - développent essentiellement une fonction d'encadrement de la mort : on paie les funérailles des confrères, on prie pour eux, leur assurant ainsi la certitude d'une « bonne mort ».

...aux confréries spiritualistes.

• C'est sous le strict contrôle de l'autorité ecclésiastique que les confréries connaissent, à partir de la Contre-Réforme, une seconde jeunesse. Elles demeurent fondamentalement des sociétés de secours mutuel, mais revêtent, sur le plan spirituel, les formes les plus variées. Tandis que les confréries des Agonisants se concentrent sur leur rôle funéraire, celles de Charité - en Normandie, par exemple - prennent en charge les pauvres et les indigents. Plus troublante pour l'Église officielle apparaît la spiritualité baroque des pénitents de Provence, qui, encapuchonnés, défilent en procession et mettent en scène leur exaltation mystique. Les confréries de l'Immaculée Conception ou du Rosaire développent le culte marial, tandis que celles du Saint-Sacrement, souvent fondées par des jésuites, rassemblent les dévots du Christ. Ces derniers peuvent tenter de jouer, plus ou moins clandestinement, un rôle politique, comme c'est le cas de la compagnie du Saint-Sacrement, officiellement dissoute en 1666. Le relâchement de la dynamique confraternelle, à la fin du XVIIIe siècle, constitue un indice assez sûr de déchristianisation, ce qui n'empêche évidemment pas que les confréries forment encore, pour le christianisme contemporain, un cadre essentiel de la vie religieuse des fidèles.

Congo français,

colonie française de 1886 à 1946, devenue territoire d'outre-mer (1946-1958), puis République autonome (1958-1960), avant la proclamation de l'indépendance en 1960.

La constitution de la colonie.

• La pénétration française dans le bassin du Congo s'effectue à partir du Gabon, où les premiers établissements sont fondés sous la monarchie de Juillet, puis notablement étendus sous le Second Empire. Mais le véritable fondateur de la colonie est Pierre Savorgnan de Brazza : après avoir remonté l'Ogooué sans pouvoir atteindre le fleuve Congo (1875-1878), il est chargé en 1879 d'une nouvelle mission par l'Association internationale africaine. En février 1880, il fonde la station de Franceville, puis atteint le Congo à la hauteur du Stanley Pool. Le 10 septembre, à Nduo, il conclut un traité avec le makoko, chef des Batékés, qui cède à la France de vastes territoires situés sur la rive droite du fleuve. Cette prise de possession, qui est suivie de la détermination du site de Brazzaville, est reconnue en 1885 par l'Association internationale du Congo, fondée par Léopold II de Belgique, souverain à titre personnel de l'État indépendant du Congo implanté sur la rive gauche du fleuve. De 1887 à 1897, Brazza, nommé commissaire général au Congo, se consacre à la délimitation et à l'organisation de la colonie, qui porte le nom de Gabon-Congo de 1888 à 1891, puis celui de Congo français (1891-1904). Le Congo et le Gabon formeront ensuite deux colonies distinctes. À partir de 1910, le Congo, devenu le Moyen-Congo, est inclus dans la fédération d'A-ÉF, et Brazzaville devient le siège du gouvernement général.

La mainmise des compagnies concessionnaires.

• À partir de 1899, 90 % du territoire sont attribués à quarante compagnies bénéficiaires d'une délégation de souveraineté, qui vont commettre les pires abus au détriment des autochtones. Seules les deux plus importantes bénéficient d'une relative prospérité, qui leur permet de survivre, en dépit d'agissements souvent dénoncés : la Likouala Mossaka (Compagnie française du Haut-Congo), concessionnaire de 13 000 kilomètres carrés, et la Ngoko-Sangha (Compagnie forestière Sangha-Oubangui), qui exploite le caoutchouc. Pour pallier la pénurie de main-d'œuvre et assurer la rentrée de l'impôt, l'administration elle-même exerce une répression terrible : en 1904, la prise en otages de femmes et d'enfants à Mongoumba, afin de contraindre les hommes à verser l'impôt, provoque la mort d'environ cinquante personnes. Ce type de scandale est à l'origine d'une mission d'enquête, qui est confiée en 1905 à Savorgnan de Brazza. Celui-ci meurt d'épuisement sur le chemin du retour. Mais ces pratiques se perpétuent : la construction du chemin de fer Congo-Océan (511 kilomètres de Pointe-Noire à Brazzaville) est menée à bien, de 1914 à 1934, au prix de la vie de milliers de travailleurs... La voie ferrée, puis l'emploi des camions vont toutefois mettre fin aux scandales du portage. L'ignominie du travail forcé sera dénoncée par André Gide dans son Voyage au Congo (1927), relation d'un voyage de plusieurs mois entre l'embouchure du Congo et le lac Tchad.