Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Cent Ans (guerre de). (suite)

Le 12 juillet 1346, Édouard III débarque en Normandie. L'armée anglaise envahit le Cotentin et la Picardie, et écrase les Français à Crécy le 26 août. Malgré la lourde défaite infligée à l'ennemi, Édouard III se replie vers le nord et s'empare de Calais (1347), dont il fait une base militaire anglaise sur le continent.

Des trêves sont toutefois conclues et se prolongent pendant sept ans, sans que les hostilités ne cessent tout à fait. La grande peste de 1348 - la fameuse Peste noire - fait de nombreuses victimes et interdit toute action d'envergure.

Contre le nouveau roi de France, Jean II le Bon, Édouard III pratique une efficace guerre des nerfs, menaçant la France d'un nouveau débarquement, lequel est à chaque fois différé. Il a trouvé en France un allié précieux, Charles de Navarre, petit-fils de Louis X, qui a constitué un parti nobiliaire et entrepris une lutte armée contre le roi de France.

Les attaques anglaises reprennent à partir de 1355 (Artois, Normandie, Languedoc). Durant l'été 1356, le Prince Noir, fils d'Édouard III, se lance dans une grande chevauchée qui le conduit de la Guyenne à la Loire et se termine, au retour, par la bataille dite « de Poitiers ». Le désastre français est plus complet encore qu'à Crécy, et le roi Jean le Bon est fait prisonnier.

Une sombre période commence alors pour le royaume de France, où se conjuguent une grave crise monarchique et un état de violence sociale proche de l'anarchie. La majeure partie du pays est en effet parcourue par des bandes de routiers, les « grandes compagnies », qui sont théoriquement au service du roi d'Angleterre ou du roi de Navarre, mais n'obéissent en fait qu'à elles-mêmes. Elles multiplient exactions et crimes dans les villes et les campagnes. En Beauvaisis éclate par réaction une révolte paysanne, la Jacquerie, qui est brisée par Charles de Navarre, sans intervention du pouvoir royal. C'est que le dauphin Charles, qui, depuis la défaite de Poitiers, gouverne en qualité de lieutenant du roi, n'a ni prestige personnel ni expérience politique pour asseoir son autorité. Il se trouve aux prises avec l'opposition des partisans de Charles de Navarre et avec celle de la bourgeoisie d'affaires parisienne représentée par Étienne Marcel, prévôt des marchands. Devenu régent, il ne triomphe de ses adversaires qu'en août 1358.

Après Poitiers, Édouard III n'a pas exploité militairement la défaite française, mais a tenté d'en tirer parti diplomatiquement (premier et second traités de Londres conclus avec Jean le Bon). Cette politique n'ayant pas rencontré les effets escomptés, une armée anglaise débarque à Calais en octobre 1359. Elle effectue une grande chevauchée à travers l'Artois, la Champagne, la Basse-Bourgogne et la Beauce, où un violent orage détruit une partie des équipages anglais.

Ayant manqué son but, qui était vraisemblablement de se faire couronner à Reims, Édouard III reprend des négociations qui aboutissent au traité de Brétigny, ratifié à Calais (24 octobre 1360). La libération de Jean le Bon est obtenue contre une rançon de 3 millions d'écus et la cession au roi d'Angleterre de la Guyenne et des régions voisines qui formeront la principauté d'Aquitaine. Le traité prévoit également un échange de renonciations : le roi de France est censé renoncer à toute souveraineté sur les territoires cédés, tandis que le roi d'Angleterre s'engage à ne plus revendiquer le titre de roi de France. Disposition purement formelle, puisque aucun des deux souverains ne fera un pas en ce sens.

À la mort de Jean le Bon, en avril 1364, le régent devient roi sous le nom de Charles V. Prince maladif, au tempérament plutôt intellectuel, il sait néanmoins s'entourer de bons conseillers et prendre la juste mesure de la situation. Il écarte d'abord le danger navarrais ; puis l'armée royale, dans laquelle du Guesclin joue un rôle important, élimine partiellement les bandes de routiers, dont les dernières subsisteront jusqu'en 1390.

En 1368, le comte d'Armagnac fait appel au roi de France contre le roi d'Angleterre : le Prince Noir, qu'Édouard III a placé à la tête de la principauté d'Aquitaine, accable en effet ses sujets d'impôts. Face au refus du Prince Noir de comparaître devant la cour de France, Charles V prononce la confiscation de la Guyenne en novembre 1369. Les hostilités ont repris au début de l'année 1369, et, grâce à une tactique mieux adaptée, les Français parviennent à récupérer une grande partie de la principauté d'Aquitaine. De 1369 à 1375, l'armée française reprend aux Anglais l'essentiel de leurs possessions, à l'exception de Calais, de quelques places fortes en Bretagne et de la Guyenne proprement dite. Pas plus que ses prédécesseurs, Charles V n'est en mesure d'achever la conquête.

Les problèmes internes des deux royaumes vont toutefois reléguer la guerre au second plan, et s'instaure alors une longue période de trêves, de 1388 à 1404. Des troubles sociaux, provoqués par l'augmentation de la pression fiscale, éclatent en France, tandis que l'Angleterre connaît, en 1381, un soulèvement rural d'une grande ampleur. La mort d'Édouard III et du Prince Noir, celle de Charles V et les premières crises de folie de Charles VI contribuent au climat d'instabilité générale.

La guerre civile en France et l'invasion anglaise

La reprise des hostilités, à partir de 1404, est liée aux pressions de la haute aristocratie désireuse de contrôler le pouvoir royal pour satisfaire ses ambitions et ses besoins d'argent. Tandis qu'en Angleterre le roi Richard II, autoritaire et impulsif, a été contraint à l'abdication en 1399, et remplacé par Henri de Lancastre, devenu Henri IV, la scène politique française est marquée par la folie de Charles VI : à la faveur de la défection royale se développe la rivalité entre le duc de Bourgogne, Jean sans Peur, et le duc Louis d'Orléans. Le conflit entre les deux partis prend un tour violent après l'assassinat de Louis d'Orléans en 1407, et dégénère, après 1411, en véritable guerre civile. Les ennemis des Bourguignons s'organisent alors sous la direction de Bernard d'Armagnac.