Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
S

Sept Ans (guerre de), (suite)

Un dénouement défavorable à la France.

• La décision va venir de la mer et des colonies. Les Anglais, qui ont capturé 6 000 matelots sur les navires marchands, bloquent les ports français. La flotte de Toulon, partie rallier Brest en vue d'un débarquement en Angleterre, est vaincue au large du Portugal, à Lagos (18-19 août 1759) ; puis, c'est le tour de l'escadre de Brest devant Quiberon (novembre 1759). L'Angleterre est maîtresse des mers. Au Canada, d'abord vainqueur, Montcalm, sans secours, recule ; il meurt dans Québec assiégé (1759) et Montréal se rend en 1760. La Guadeloupe et la Martinique tombent en 1759 et en 1762. En Inde, Lally-Tollendal s'est aliéné les princes favorables à la France ; enfermé dans Pondichéry, il capitule au début de 1761.

La situation semble se modifier lorsque Choiseul, ministre des Affaires étrangères depuis 1758, rallie à la France les Bourbons de Madrid, de Naples et de Parme (pacte de Famille, 15 août 1761). Mais cet apport se révèle inefficace. Cependant, ayant atteint ses objectifs, le nouveau roi d'Angleterre, Georges III, est prêt à négocier. Il écarte l'intraitable Pitt en octobre 1761. À l'impératrice Élisabeth de Russie succède en 1762 Pierre III, admirateur de la Prusse, avec laquelle il signe une paix séparée en mai 1762. Marie-Thérèse doit renoncer à vaincre Frédéric II. La paix est signée à Paris et à Hubertsburg (10 et 15 février 1763). L'Allemagne revient au statu quo ante, mais la Prusse s'impose comme une nouvelle puissance continentale. La France perd ses colonies : le Canada - ces « arpents de neige » moqués par Voltaire ; la Louisiane, donnée à l'Espagne pour la dédommager de la cession de la Floride à l'Angleterre ; l'Inde, sauf cinq comptoirs ; le Sénégal, sauf Gorée. Mais Choiseul a sauvé les Antilles sucrières. Amputée de sa marine, avec une armée à réformer, la France traverse alors une crise morale, dont témoignent notamment l'attentat de Damiens (1757) et la contestation des parlements, et doit trouver les voies de son redressement.

Septembre (massacres de),

tueries perpétrées dans les prisons parisiennes du 2 au 6 septembre 1792.

Dans l'histoire de la Révolution, ces massacres occupent une place spécifique. Ils sont dénoncés par les uns comme le symbole de la violence aveugle d'un peuple bestial, manipulé par des dirigeants sanguinaires ; ils sont « gênants » pour les autres, qui adoptent parfois la formule prémonitoire de Danton : « Que la justice des tribunaux commence et la justice du peuple cessera » (19 août 1792).

Les origines de l'exaspération populaire.

• Le 10 août 1792 (chute de la monarchie) est une journée sanglante : plus de 400 morts parmi les assaillants des Tuileries, sans-culottes parisiens et fédérés des départements, qui répliquent par le massacre des Suisses. Le peuple réclame vengeance pour les « victimes » et, le 17 août, est créé un Tribunal extraordinaire pour juger les « traîtres ». Toutefois, son action paraît trop lente et trop clémente, d'autant que la situation militaire est catastrophique. Le 19 août, La Fayette se livre aux Autrichiens et le territoire est envahi à l'Est : Longwy et Thionville tombent aisément. Le 30 août, les Prussiens assiègent Verdun, dernière place forte avant Paris. S'amplifie alors la rumeur d'une alliance entre ennemis de l'extérieur et de l'intérieur et, tandis que les volontaires et les fédérés quittent Paris pour défendre les frontières, naît l'idée d'un « complot des prisons ». Le 2 septembre 1792, circule l'annonce de la chute de Verdun : vers 2 heures de l'après-midi, une vingtaine de prisonniers (essentiellement des prêtres réfractaires) transférés de l'Hôtel de Ville de Paris à l'Abbaye sont tués dans la cour de cette prison. C'est le début des massacres, qui durent cinq jours et touchent neuf des onze prisons parisiennes (y compris Bicêtre).

Massacres et justice.

• L'historiographie contre-révolutionnaire a amplifié le nombre des victimes : l'abbé Barruel parle de 12 000 morts. Mais, s'appuyant sur des sources indiscutables, Pierre Caron a comptabilisé, en 1935, entre 1 090 et 1 395 personnes massacrées (soit 41 à 53 % des détenus). La majorité d'entre elles sont des « droit commun », et 28 à 32 % des « politiques » (notamment 223 prêtres réfractaires enfermés aux Carmes ou à Saint-Firmin). Les lieux de détention des « politiques » ont d'ailleurs été touchés par de plus forts pourcentages d'exécutions.

Le premier massacre est bien un phénomène de foule, mais rapidement s'organisent des « tribunaux populaires » avec un président et des juges qui lisent les registres d'écrou, appellent les prisonniers et délibèrent sur la culpabilité, punie de mort, ou la relaxe. Sauf dans le cas de la princesse de Lamballe - amie de la reine - emprisonnée à la Force, on n'observe pas de gestes de mutilation des corps : en ce sens, les massacres de Septembre sont un« événement charnière » entre l'émeute « primitive » et l'acte punitif de justice révolutionnaire.

Selon certains historiens, les massacres auraient été commandités par les autorités révolutionnaires. En fait, le Conseil exécutif provisoire (avec les ministres Danton à la Justice et Roland à l'Intérieur) et l'Assemblée législative, embarrassés par ces événements, mais surtout inquiets des risques d'invasion, ont laissé faire. On a aussi accusé la Commune de Paris d'avoir encouragé, voire « payé » les massacreurs, et on a mis en avant le rôle de Marat, qui a souvent prôné l'élimination physique des contre-révolutionnaires. Mais aucune preuve d'une organisation des massacres n'a pu être trouvée.

Ce n'est qu'après Valmy (20 septembre 1792), lors des premières séances de la Convention, que les girondins traitèrent les députés de Paris de « septembriseurs ». Ce à quoi Robespierre répondit, le 5 novembre 1792 : « C'était un mouvement populaire. » Il n'empêche : le « septembriseur », assimilé plus tard au « terroriste », appartient à la légende noire de la Révolution.

septembre 1793 (journées des 4 et 5),

journées révolutionnaires qui permettent de retraduire le « désir de terreur » surgi à la suite de l'assassinat de Marat.