Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
R

référendum, (suite)

Rompant avec l'usage gaullien du référendum, Georges Pompidou en 1972 et François Mitterrand en 1992 (le référendum de 1988 sur la Nouvelle-Calédonie revient davantage à l'initiative du Premier ministre Michel Rocard) n'engagent pas leur responsabilité par le référendum ; ils se contentent de soumettre un texte aux électeurs, n'obligeant pas ces derniers à se déterminer par rapport à l'auteur de la question.

Le Parlement, réuni en Congrès le 31 juillet 1995, entérine une révision constitutionnelle qui élargit le champ référendaire prévu par l'article 11 aux « réformes relatives à la politique économique et sociale de la nation et aux services publics qui y concourent ». Les Français seront-ils ainsi mieux associés aux décisions importantes, au profit d'une démocratie plus vivante réconciliant les citoyens avec la politique ? Ou bien, l'extension de l'usage référendaire par le président de la République amplifiera-t-elle l'affaiblissement du Parlement, le déséquilibre des pouvoirs au détriment de ce dernier étant souvent considéré comme un défaut des institutions de la Ve République ?

Réforme (la),

mouvement religieux, apparu au XVIe siècle, qui soustrait à l'obédience du catholicisme une partie des chrétiens et donne naissance aux Églises protestantes entre le XVIe et le XVIIIe siècle.

La France n'est pas restée à l'écart des troubles qui agitent l'Empire depuis la rédaction par Luther des 95 thèses contestant les indulgences pontificales. La Sorbonne, dès 1521, condamne le réformateur allemand, dont les propositions théologiques et ecclésiales - justification par la foi seule, médiation unique de Jésus-Christ, autorité de l'Écriture, négation du sacrement ex opere operato, sacerdoce universel - se répandent dans la société cléricale et dans diverses strates du monde laïc, recoupant les intuitions évangéliques d'un Lefèvre d'Étaples. L'unité religieuse du royaume de France ne tarde pas à se briser. Il faudra plus de deux siècles et demi pour qu'enfin, par-delà l'intermède du régime de l'édit de Nantes, la dissidence réformée soit acceptée.

Espérances et vicissitudes au xvie siècle.

• C'est en 1534 (17-18 octobre), que s'ouvre une période de crise religieuse, à l'occasion de l'affichage, dans plusieurs villes, de placards dénonçant la messe romaine. En mars 1536, à Bâle, intervient la publication d'une première version latine de l'Institution de la religion chrestienne. L'auteur, Calvin, qui a dû fuir la France, organise à Genève, à partir de 1540, une vie de l'Église et de la cité conforme à la volonté divine telle qu'il la conçoit, et met en action, dès 1552-1554, un processus missionnaire qui vise à contourner la répression royale : des ministres du culte sont envoyés vers les communautés clandestines de prières, des églises sont dressées (Paris, 1555), tandis qu'une confession de foi et une organisation synodale sont adoptées selon le modèle genevois (1559). Il semble que, même si les élites urbaines se trouvent surreprésentées parmi les calvinistes, la Réforme exerce un attrait sur tous les groupes sociaux, à l'exception du monde rural. En 1560, on estime à quelque deux millions le nombre de croyants qui adhèrent aux idées nouvelles ; dynamisés par la mort d'Henri II, ils réclament la liberté de conscience, n'hésitant pas à occuper des églises pour y célébrer leur culte. Parmi eux apparaissent des figures de la haute noblesse - le prince de Condé et l'amiral de Coligny -, derrière lesquelles la Réforme se constitue en groupe de pression politique. À l'issue d'une période de troubles (conjuration d'Amboise en 1560, iconoclasme en 1561) et de négociations (colloque de Poissy en 1561, édit de janvier en 1562), les réformés tentent par trois guerres civiles de desserrer l'emprise du catholicisme et de prendre le contrôle de l'État royal au nom de la liberté de culte (mars 1562-mars 1563, et septembre 1567-mars 1568, septembre 1568-août 1570). Mais ils ne parviennent pas, malgré d'indéniables succès militaires, à faire pencher le sort des armes en leur faveur.

Le massacre de la Saint-Barthélemy (24 août 1572) clôt cette phase ascendante de la Réforme, entraînant exils et abjurations, qui réduisent, surtout au nord de la Loire, la puissance et l'assise des Églises réformées. Il conditionne l'élaboration d'une théorie du pouvoir anti-absolutiste et la constitution d'une organisation politique qui, appelée par les historiens « les Provinces unies du Midi » (assemblée de Millau, 1573), entame la lutte en s'alliant avec les catholiques modérés du maréchal de Damville, puis du duc d'Alençon. C'est en s'appuyant sur cette force dont il est reconnu le « protecteur » qu'Henri de Navarre (futur Henri IV) amorce la stratégie de conquête du royaume de France à partir de 1585. Henri III, avec lequel il conclut au Plessis-lez-Tours un accord pour lutter contre la Ligue, le reconnaît sur son lit de mort comme son légitime successeur (1er-2 août 1589), et la Réforme, avec les victoires militaires du Béarnais, paraît retrouver la dynamique conquérante du milieu du siècle. Mais, face à l'intransigeance du parti ligueur, Henri IV abjure à Saint-Denis, et poursuit une pacification du royaume qui marginalise peu à peu les réformés, les contraignant à accepter l'édit de Nantes (13 avril 1598), qui leur accorde la liberté de conscience et de culte.

Stabilisation et ambiguïté du premier xvii• e siècle.

Au cours des années 1598-1660, la Réforme semble en recul en France. La mise en place du régime de l'édit de Nantes entend déterminer le culte calviniste de manière quasi immuable sur des bases restrictives et concède aux réformés des privilèges judiciaires, politiques et scolaires tout en leur imposant des devoirs (acceptation du rétablissement du culte catholique, observance des jours festifs du calendrier). On estime qu'il y aurait alors un peu plus d'un million de calvinistes - environ un vingtième des habitants du royaume - dont quelque 80 % sont installés au sud de la Loire (Poitou, Saintonge, Guyenne, Cévennes, Béarn, Quercy, Vivarais, Dauphiné) ; de nombreuses villes de ces régions - Millau, Nîmes, Die - ont une population très majoritairement calviniste, tandis que, dans le Nord, les calvinistes sont nettement minoritaires.