Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Rambuteau (Claude Philibert Barthelot, comte de),

administrateur et homme politique (Charnay, près de Mâcon, 1781 - château de Rambuteau 1869).

C'est Napoléon Ier qui donne à ce jeune homme d'ancienne noblesse ses premières responsabilités préfectorales, à partir de 1811. Destitué en 1815, il se retire dans ses terres où il s'adonne à l'agriculture sans s'occuper de politique. Pourtant les électeurs de l'arrondissement de Mâcon le choisissent pour les représenter en 1827 ; à la Chambre, il soutient discrètement l'opposition libérale. Partisan convaincu de Louis-Philippe et de la politique de « résistance », il obtient en 1833 la préfecture de la Seine, poste stratégique qu'il conserve jusqu'en 1848. Ce pilier du régime est fait pair de France en 1835, grand officier de la Légion d'honneur en 1844. Même si son œuvre est éclipsée, dans les mémoires, par celle du baron Haussmann, il imprime déjà un élan décisif à la modernisation de la capitale. Il substitue l'action de l'État à l'initiative privée pour donner aux Parisiens « de l'air, de l'eau, de l'agrément » : élargissement ou percement de voies nouvelles dans des quartiers centraux menacés d'engorgement, aménagement de boulevards, remaniement ou construction de plus de cent kilomètres d'égouts, décuplement du nombre des fontaines, plantations d'arbres. À son actif figurent aussi l'achèvement de l'Arc de triomphe, l'érection de l'obélisque de Louqsor sur la place de la Concorde, la construction du pont Louis-Philippe, l'agrandissement de l'Hôtel de Ville, les premiers grands chantiers ferroviaires.

Ramus (Pierre de La Ramée, plus connu sous le nom latin de),

philosophe, mathématicien et théologien (Cuts, Vermandois, 1515 - Paris 1572).

Tour à tour platonicien, contre l'aristotélisme universitaire, et calviniste « hétérodoxe », contre la majorité genevoise, cet esprit encyclopédique témoigne de l'effervescence humaniste de son époque.

En 1543, les Dialecticae institutiones et les Aristotelicae animadversiones le rendent célèbre dans le milieu intellectuel parisien. Le jeune maître ès arts reproche aux partisans d'Aristote de dispenser une morale ignorant le salut chrétien. Un arrêt du Conseil du roi lui interdit alors de professer la philosophie. En 1545, Ramus récidive dans le Songe de Scipion : il y défend la conception platonicienne de l'âme mais en attribuant la cause du mouvement spirituel à Dieu. Henri II réhabilite l'humaniste, qui obtient, en 1551, une chaire au Collège royal. La Dialectique (1555) propose une nouvelle logique « naturelle », à partir de laquelle Ramus fonde une rhétorique particulièrement adaptée aux textes antiques. En 1561, il se convertit au calvinisme. Il affronte par la suite le « cléricalisme » de Théodore de Bèze, qui encourage un contrôle étroit de la Compagnie des ministres sur le choix des pasteurs. Sa conception de la discipline promeut, au contraire, la liberté d'élection et de prophétie. Mais les synodes de La Rochelle (1571) et de Nîmes (1572) condamnent ses thèses et le menacent même d'excommunication. Les massacreurs de la Saint-Barthélemy l'assassinent le 26 août 1572 devant sa table de travail du collège de Presles, alors qu'il achevait une Exhortation à la paix entre les chrétiens.

Raoul,

roi des Francs de 923 à 936 ( ? - 936).

Fils aîné du duc de Bourgogne Richard le Justicier, Raoul succède à son père en 921. En épousant Emme, fille du roi Robert Ier, il entre dans le cercle d'alliance des Robertiens. La royauté est alors disputée par les Carolingiens, très affaiblis, et les Robertiens, de plus en plus puissants. Mais le pouvoir du roi est soumis au bon vouloir des ducs et des barons. Les Robertiens s'engagent donc très prudemment dans l'aventure royale, afin de préserver leur puissance territoriale. C'est ainsi qu'après la mort de Robert Ier (roi des Francs depuis 922), tué lors d'un combat contre le Carolingien Charles III le Simple, près de Soissons (juin 923), Hugues le Grand, son fils, renonce à la royauté car il est le seul adulte de sa génération. Raoul, beau-frère d'Hugues le Grand, peut, lui, compter sur son frère Hugues le Noir, auquel il confie le duché de Bourgogne. Il est élu et sacré à Saint-Médard de Soissons, le 13 juillet 923. Sa situation est périlleuse : Charles le Simple est prisonnier du puissant comte Herbert II de Vermandois, qui dispose ainsi d'un moyen de pression sur le nouveau souverain. Raoul, dont les intérêts en Neustrie sont mineurs, doit jouer l'équilibre entre Hugues le Grand et Herbert II de Vermandois.

Après la mort de Charles le Simple en 929, Raoul s'allie à Hugues le Grand contre Herbert de Vermandois, qui fait lui-même appel au roi de Germanie Henri l'Oiseleur, inaugurant ainsi les interventions des rois de Germanie dans le royaume. En 935, Herbert II fait la paix avec le roi Raoul, qui meurt l'année suivante. La royauté franque souffre alors d'une telle perte de prestige qu'Hugues le Grand renonce à la couronne et fait appel au Carolingien Louis IV d'Outremer.

Rashi (rabbi Salomon ben Isaac, dit),

rabbin et exégète du judaïsme médiéval (Troyes 1040 - 1103).

La région natale de Rashi, le comté de Champagne, possède, à l'époque médiévale, de très nombreuses communautés juives. Après des études à Worms et à Mayence, Rashi revient à Troyes, où il vit de son travail de vigneron et de son enseignement dans la communauté juive locale. Il rédige alors un commentaire des Écritures et un commentaire du Talmud, dont l'exhaustivité, la simplicité et la rigueur lui assurent un prestige immédiat. Il fonde une école talmudique, appelée « école des tossaphistes », qui contribue au rayonnement de sa pensée sur tout le judaïsme de la moitié nord de la France et de Rhénanie jusqu'à la fin du XIIIe siècle.

L'œuvre de Rashi est progressivement connue en Provence, en Languedoc et en Orient, et finit par s'imposer comme le fondement de toute exégèse talmudique. Son influence s'étend même aux auteurs chrétiens. Au XIIe siècle, Bernard de Clairvaux s'en inspire pour son Commentaire du Cantique des cantiques. Au XVe siècle, des ouvrages de Rashi sont traduits en latin par le franciscain Nicolas de Lyre, ce qui permet à de nombreux clercs, dont Martin Luther, d'en avoir connaissance. Il n'est ainsi guère étonnant qu'en 1475 le Commentaire du Pentateuque du célèbre rabbin soit le premier livre imprimé en langue hébraïque.