Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

oratorio (suite)

Au xxe s., l’oratorio a une forme de plus en plus incertaine. Il se confond tantôt avec la cantate (avec ou sans récitant), tantôt avec l’opéra ou la symphonie. Il est plus que jamais lié à l’évolution rapide du langage musical et tend, dès l’entre-deux-guerres, à refléter plus continûment que dans le passé les convictions métaphysiques ou morales du compositeur. Aux environs de 1900 naissent des œuvres aussi dissemblables que le classique Songe de Gerontius (1900) d’Edward Elgar (1857-1934), que le Prométhée (1900) de G. Fauré* et que les Gurrelieder (1900) de A. Schönberg*. Par la suite, la diversité n’est pas moindre. Citons, sans distinction de nationalités, la Croisade des enfants (1902) de G. Pierné, Psaume XLVII (1904) de F. Schmitt*, la 8e symphonie, dite des Mille (1910), de G. Mahler*, divisée en deux parties (1o Veni Creator ; 2o dernière scène du Faust de Goethe), le Martyre de saint Sébastien (1911) de Claude Debussy*, Prométhée ou le Poème du feu (1911) d’Aleksandr Nikolaïevitch Skriabine (1872-1915), le Retour de l’enfant prodigue (1917) et le Cantique de la Sagesse (1935) de D. Milhaud*, Vidapura (1918) de Heitor Villa-Lobos* (1887-1959), San Francesco d’Assisi (1920) de Gian Francesco Malipiero (1882-1973), le Roi David (1921), Judith (1925), Jeanne d’Arc au bûcher (1935) et Nicolas de Flue (1940) d’Arthur Honegger*, le Miroir de Jésus (1923) d’André Caplet (1878-1925), Œdipus-Rex (1927), Perséphone (1934), Canticum sacrum (1955) et Threni (1958) de Stravinski*, Cantata profana (1930) de Bartók*, Das Unaufhörliche (l’Éternel, 1931) de Paul Hindemith*, Maria Egiziaca (1932) d’Ottorino Respighi (1879-1936), le Sermon sur la montagne (1936), la Passion (1942), Saint Germain d’Auxerre (1947) et la Mise au tombeau (1949) de Georges Migot (1891-1976), Litania (1933) de Karol Szymanowski (1882-1937), la Légende de la Sainte Vierge descendue en enfer (1934) de Nikolaï Nikolaïevitch Tcherepnine (1873-1945), Messe au champ d’honneur (1939) de Bohuslav Martinů*, Lucifer (1948) de Claude Delvincourt (1888-1954), In terra pax (1944), Golgotha (1948), le Mystère de la Nativité (1959) de Frank Martin (1890-1974), le Fusillé inconnu (1949) de Serge Nigg (né en 1924), Job (1950), drame sacré de Dallapiccola*, Llanto por Ignacio Sánchez Mejias (1950) et Récit de l’an zéro (1959) de Maurice Ohana*, la France au Calvaire (1956) de Marcel Dupré (1886-1971), la Vérité de Jeanne (1956) d’André Jolivet*. Signalons enfin des œuvres politiquement engagées, qui traitent le plus souvent des droits de l’homme et de la liberté, comme l’œuvre déjà ancienne Die Massnahme (la Décision, 1930) de Hanns Eisler (1898-1962), Der Grossinquisitor (le Grand Inquisiteur, 1948) de Boris Blacher (1903-1975) et Novae de infinito laudes (1962) de Hans Werner Henze*. Seul, dans la musique contemporaine, le Polonais Krzysztof Penderecki*, auteur d’une Passion selon saint Luc (1966), divisée en deux parties et comprenant un récitant, trois solistes, trois chœurs mixtes, un chœur de jeunes garçons et l’orchestre, comble, en utilisant toutes les ressources du langage musical actuel, « le fossé qui sépare la musique nouvelle de la pensée liturgique » (Hanz Heinz Stuckenschmidt).

A. V.

 F. Chrysander, Über die Moll-Tonart in den Volksgesängen und über das Oratorium (Schwerin, 1853). / O. Wangemann, Geschichte des Oratoriums (Heilbronn, 1881 ; 2e éd., Leipzig, 1882). / G. Pasquetti, L’Oratorio musicale in Italia (Florence, 1906 ; 2e éd., 1914). / D. Alaleona, Studi sulla storia dell’oratorio musicale in Italia (Turin, 1908 ; 2e éd., Milan, 1945). / A. Schering, Geschichte des Oratoriums (Leipzig, 1911). / C. S. Terry, Bach. The Cantatas and Oratorios (Londres, 1925 ; 2 vol.). / G. Pannain, L’Oratorio dei Filippini e la scuola musicale di Napoli (Milan, 1934). / F. Raugel, l’Oratorio (Larousse, 1949). / C. Gasbarri, L’Oratorio Filippino, 1552-1952 (Rome, 1957). / G. Massenkeil, Das Oratorium (Cologne, 1970). / H. Morissette, l’Oratorio français des origines à G. Migot (Montréal, 1970).

Orcagna (Andrea di Cione di Arcangelo, dit l’)

Peintre, sculpteur et architecte italien (actif à Florence de 1343 à 1368).


Célèbre de son vivant, il est le symbole de la génération qui travaille après la peste de 1348 ; celle-ci a tué plusieurs des successeurs de Giotto*, Bernardo Daddi, les Lorenzetti*, bientôt suivis dans la mort par Maso di Banco.

Orcagna est cité de 1343 à 1346 à l’arte des médecins de Florence*, seule corporation permise aux peintres à cette époque, et, en 1352, on le trouve inscrit en tant que sculpteur à l’arte des maîtres de la pierre et du bois. Il exécute trois travaux d’architecture de 1362 à 1368 et joue le rôle de conseiller artistique au dôme de Florence.

Comme sculpteur, son œuvre majeure est le grand tabernacle polychrome d’Orsammichele (1355-1359), avec le relief de la Mort et de l’Assomption de la Vierge, d’un goût complexe et d’une grande maîtrise décorative.

Comme peintre, on connaît de lui deux œuvres sûres, citées par des documents ; celles-ci tournent le dos aux innovations spatiales de Giotto. De la grande fresque du Triomphe de la Mort peinte à l’église Santa Croce, sans doute après la peste de 1348, ne subsistent que des fragments (musée de Santa Croce) [v. enfer], qui révèlent le tempérament dramatique d’Orcagna. La composition était divisée en trois parties verticales (chacune à registres) par la figuration de deux colonnes torses à incrustations et entourée d’un bandeau comprenant des médaillons à petites scènes. Quelques détails montrent le ton réaliste et terrifiant : mendiants injuriant la Mort placée au-dessus d’eux ; monstres avalant une tête de femme. L’ensemble est traité sans perspective ni point de fuite. Le polyptyque de la chapelle Strozzi à Santa Maria Novella, représentant le Christ en trône entre des saints, est signé et daté de 1357. Au centre, le Christ est isolé dans une mandorle de séraphins pour figurer avec autorité son rôle de chef de l’Église ; à ses pieds, la Vierge et saint Jean jouent le rôle d’intercesseurs. L’ensemble de l’œuvre, divisée en cinq parties sommées par autant de gables dorés de style gothique, est soumis à une volonté architecturale, et des ombres franches trahissent le métier du sculpteur.