Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

orage magnétique et aurore polaire (suite)

L’observation visuelle des aurores remonte à la plus haute antiquité. (Par leur biais, on a cherché récemment à recouper — par l’étude d’anciens documents — certains résultats d’« archéomagnétisme ».) Elle a fait d’énormes progrès pour aboutir aux enregistrements spectrographiques actuels. On double ceux-ci par des observations radio-électriques, ce qui permet de constater que les mécanismes auroraux peuvent se produire de jour, mais — comme les sous-orages — qu’ils sont surtout fréquents la nuit. Nous ne reviendrons pas sur les relations, déjà signalées, entre les aurores et les orages polaires, ni sur les mécanismes primaires (magnétosphériques) qui paraissent leur être associés. Par contre, nous porterons notre attention sur la morphologie du phénomène lui-même et les mécanismes qu’elle suggère.

Au cours du déroulement d’une aurore polaire, on peut observer des arcs, des raies, des draperies, des rideaux ainsi que des luminosités non structurées. L’aurore débute souvent par des arcs lumineux de formes simples, orientés perpendiculairement au méridien magnétique local. Puis des phases plus actives se manifestent subitement : des rayons apparaissent parmi les arcs, eux-mêmes animés de fluctuations rythmiques rapides (aurores pulsantes), dont le synchronisme avec les pulsations magnétiques du sous-orage a été plusieurs fois observé. Des formes plus compliquées peuvent ensuite se manifester, avant de se fondre dans une luminosité générale, qui disparaît peu à peu. L’analyse spectrale de ces manifestations lumineuses montre la présence des principales raies d’émission des composants de la haute atmosphère, notamment la raie double 6300-6364 Å (rouge), la raie 5577 Å de l’oxygène ainsi que de nombreuses raies de l’azote et de certains de ses oxydes. Ces émissions ont lieu à des altitudes situées entre 100 et 600 km. Elles sont le résultat des interactions entre les particules électrisées (notamment les électrons) qui déferlent sur l’ionosphère et la haute atmosphère, et les molécules neutres qu’elles y rencontrent. On a aussi trouvé des raies de l’hydrogène, notamment Hα (6563 Å) et Hβ (4861 Å), dans ce que l’on a appelé des aurores à protons.


Phénomènes auroraux

On désigne ainsi des manifestations optiques — parfois de luminosités très faibles — rappelant celles des aurores, mais de formes et de localisation géographique différentes. Signalons en particulier les « arcs rouges » de Daniel Barbier, qui forment une double ceinture mondiale de part et d’autre de l’équateur magnétique, à faible latitude.

E. S.


Deux savants


Kristian Birkeland,

physicien norvégien (Oslo 1867 - Tōkyō 1917). Il a élucidé le mécanisme des aurores polaires et développé une théorie cosmogonique fondée sur le magnétisme solaire.


Earl Størmer,

physicien norvégien (Skien 1874 - Oslo 1957). Il a étudié le mouvement des particules électrisées dans le champ magnétique terrestre et édifié une théorie mathématique des aurores polaires.

 S. I. Akasofu, Polar and Magnetospheric Substorms (New York, 1968). / A. Omholt, The Optical Aurora (Berlin, 1971).

Oran

V. d’Algérie, sur la Méditerranée.



Population et histoire

Deuxième ville d’Algérie, chef-lieu de wilaya (département), Oran est une des plus importantes métropoles du Maghreb. Elle comptait 325 000 habitants au dernier recensement en 1966. Actuellement, sa population doit avoisiner 400 000 habitants.

Comme celle de presque toutes les villes du littoral méditerranéen, l’histoire d’Oran semble liée autant aux influences de l’extérieur qu’à celles de la région à laquelle elle s’adosse. Fondée au xe s., la cité a été à plusieurs reprises sous tutelle espagnole avant 1792 ; c’était un préside, un point d’appui militaire et commercial des Ibériques au-delà de la Méditerranée. De la fin du xviiie s. jusqu’à la conquête française, la ville fut la capitale du beylik turc de l’Ouest, gouvernant de loin un territoire s’étendant des rives de la Méditerranée au Sahara. Soumise aux Français dès 1831, elle devint alors le principal point d’appui de la colonisation dans l’ouest de l’Algérie. D’une modeste cité de moins de 30 000 habitants, elle se mua très rapidement en une imposante métropole, dont la population bondit de 33 000 habitants en 1866 à 106 000 en 1906, à 205 000 en 1936, à 312 000 en 1954, à la veille de la guerre d’indépendance, et à environ 450 000 en 1962. Le peuplement européen joua un rôle prépondérant pendant plus d’un siècle. Depuis la conquête jusqu’en 1954, la population européenne fut constamment supérieure à celle d’origine algérienne, et, à la veille de l’indépendance, Oran comptait encore plus de 200 000 Européens parmi ses habitants. Dans ce peuplement européen se retrouvait l’influence de l’Espagne, toute proche. Les Espagnols, en effet, fournirent une partie importante des effectifs de l’émigration vers Oran et l’Oranais. Oran se trouve à moins de 200 km des côtes d’Espagne. La plus européenne des métropoles de l’Algérie française se parait souvent de couleurs et d’accents ibériques. En un singulier mouvement de retour, le départ des Européens en 1962 a contribué à la création autour d’Alicante, en Espagne, d’une colonie de rapatriés de l’Oranais. Longtemps insouciante des réalités de l’Algérie contemporaine, la ville d’Oran subit avec rage et passion les dernières secousses de la guerre d’indépendance, l’affrontement sanglant des communautés européenne et musulmane ainsi que la mutation la plus importante depuis sa fondation avec le départ massif des Européens.

Cependant, elle ne fut jamais exclusivement européenne dans la composition de sa population. L’immigration de travailleurs ou de ruraux déracinés a constamment élevé la proportion de la population algérienne. Les Algériens n’étaient que 3 000 en 1866 (moins de 10 p. 100 des effectifs de la ville) ; ce taux n’a cessé de progresser, jusqu’à 24 p. 100 en 1936 (50 000 Algériens), 42 p. 100 en 1954 (130 000) et plus de 50 p. 100 à la veille de l’indépendance (plus de 200 000). Ainsi, par l’afflux des pauvres en provenance des campagnes, par la population des quartiers périphériques des Planteurs, de la Nouvelle Médina, de Médioni, de Lamur, des bidonvilles, dont le dénuement contrastait avec les spéculations orgueilleuses du centre européen, par l’investissement de la cité par la cité elle-même, Oran, avant l’indépendance, était-elle déjà devenue une ville algérienne. La rupture de 1962 n’a fait que précipiter une évolution déjà dessinée. La vitalité démographique de la population musulmane, associée à la puissance de l’immigration intérieure, a presque comblé les vides laissés par les Européens. Cependant, à la différence d’Alger, Oran n’a pas encore retrouvé les chiffres de population de 1960-1962 (de 430 000 à 450 000 habitants).