Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

archéologie (suite)

• La sonde photographique. Cette méthode a été mise au point par l’ingénieur Carlo Lerici. Les nécropoles étrusques de Tarquinia et de Cerveteri posaient un problème : les tombes repérées étaient si nombreuses qu’il était nécessaire, avant d’en commencer la fouille, de savoir lesquelles étaient vides et lesquelles méritaient d’être étudiées. La sonde photographique permet de s’en rendre compte avant la fouille et d’éviter les travaux inutiles : une sonde portative fore au-dessus de la chambre funéraire un trou de petite dimension à travers le plafond de la tombe. Un appareil photographique muni d’un flash est ensuite introduit dans le forage et permet, par rotation et clichés successifs, d’avoir une image exacte de l’ensemble de la tombe, de l’emplacement du couloir d’accès, de l’état du contenu.

La prospection sous-marine

L’étude des fonds marins à proximité des côtes a offert récemment à l’archéologie un nouveau champ d’action assez prometteur. L’archéologie sous-marine est une science aujourd’hui en plein essor. Les techniques modernes de plongée en scaphandre autonome (scaphandre Cousteau-Gagnan) permettent une exploration variée.

Les premières fouilles sous-marines furent effectuées à partir de 1907, avec des scaphandriers professionnels, sur la côte orientale de la Tunisie, au large de Mahdia : des pêcheurs d’éponges avaient repéré des « canons de frégate engloutis », qui étaient en réalité des colonnes de marbre. La curiosité aidant, ils découvrirent des statues de marbre et de bronze. Le Service des antiquités de Tunisie, alerté, reprit les fouilles à son compte jusqu’en 1913. L’exploration, interrompue par la guerre, recommença en 1948. Ces travaux permirent de retrouver la cargaison d’un bateau antique, parti d’Athènes au début du ier s. av. J.-C. avec un chargement d’œuvres d’art à destination de l’Italie.

D’autres épaves englouties restituèrent aux archéologues des œuvres d’art qui, sans cela, auraient disparu dans un four de fondeur (Zeus d’Histiaia). Mais l’étude d’une épave apporte également des données économiques : « L’ensemble d’une cargaison est toujours un document de première importance pour l’histoire des industries et des échanges » (G. Charles-Picard). Enfin, les variations du niveau marin ont parfois lentement submergé des constructions antiques. C’est souvent le cas des anciens ports (Tyr, Saida), que l’archéologie sous-marine permet, non sans difficulté, de reconstituer.

La fouille subaquatique est une opération très complexe, qui nécessite un appareillage perfectionné. Toutefois, cette branche de la technique archéologique se développe fort rapidement. Le premier Congrès d’archéologie sous-marine a eu lieu en 1955.

La photographie aérienne

La photographie aérienne s’est surtout développée après la Première Guerre mondiale. Par-delà l’intérêt présenté par la vue directe depuis l’avion, qui restitue à la perfection un grand monument dans son cadre, la photographie aérienne offre plusieurs avantages : « Elle permet de fixer une réalité que l’on analyse à loisir sous le stéréoscope ; on peut comparer plusieurs clichés, constituer des séries, ce qui est impossible sur le terrain. Surtout la photographie aérienne enregistre des détails que l’œil humain remarque difficilement, comme dans les régions malaisées à scruter, telles les montagnes boisées, ou même des détails que l’œil ne voit pas » (R. Chevallier).

Les principes sur lesquels se fonde l’interprétation d’une photographie aérienne sont simples : il s’agit de retrouver sur le terrain les traces, les vestiges plus ou moins estompés des paysages anciens. Des constructions très difficilement décelables, même totalement enfouies dans le sol ou complètement arasées, peuvent révéler leur présence grâce à une série de signes, qu’il faut interpréter.

Les ombres portées (« shadow-marks ») : si une ruine affleure à peine, au point de n’attirer même plus l’attention de l’observateur au sol, elle sera cependant décelée sur une photographie aérienne prise le soir, en éclairage rasant, qui allonge les ombres. La photographie aérienne, qui saisit ainsi ces faibles reliefs, met en évidence le plan des bâtiments enfouis. C’est ainsi que l’ancien limes romain dans le désert de Syrie a été mis en valeur par des recherches du P. Antoine Poidebard (1878-1955).

La végétation (« crop-marks ») fournit un repère inestimable, son aspect variant selon la nature des vestiges sous-jacents. Puits ou fossés font pousser les plantes plus haut, car la profondeur de terre arable est plus grande. L’endroit prend donc sur la photographie un aspect plus sombre. À l’inverse, des fondations de murs ralentissent la croissance des plantes et seront révélées, sur la photographie, par des lignes plus claires. Dans tous les cas, ces anomalies apparaissent nettement sur la photographie aérienne, qu’il reste à interpréter.

La couleur du sol (« soil-marks ») elle-même intervient : le travail humain peut faire remonter à la surface des matériaux issus de couches de nature, donc de couleur, différente. On peut citer à ce sujet le cas des tumulus des nécropoles étrusques qui ont été élevés au-dessus de la tombe grâce aux déblais retirés du fossé circulaire : les fossés se sont comblés, et les tumulus furent arasés ; mais les matériaux jadis extraits du sous-sol et en partie demeurés en surface ont laissé, visibles sur la photographie aérienne, des marques blanchâtres qui ont permis de les découvrir.

L’interprétation de tels documents est difficile et ne peut être faite par l’archéologue. C’est une opération technique nécessitant des stéréoscopes puissants. C’est surtout une étude complexe, nécessitant un travail d’équipe, car elle fait appel à des sciences fort diverses : archéologie, géographie, géologie, toponymie...


La fouille

Quelles que soient les possibilités des méthodes de prospection, le travail essentiel de l’archéologue demeure la fouille, cette technique qui assure l’unité de l’archéologie. Les documents fournis par une fouille ne sont, la plupart du temps, pas datés. Le principal but de la recherche est d’établir s’ils sont contemporains ou successifs, c’est-à-dire de reconstituer la chronologie relative du site. Où que ce soit, un site présente toujours les mêmes caractères : époque après époque, différents niveaux d’occupation se sont succédé et différentes couches, ou « strates », se sont superposées.