Obrenović (suite)
Un événement imprévu met fin au régime milaniste. Profitant d’une absence de son père, Alexandre annonce son mariage avec Draga Mašin (1866-1903), ex-dame d’honneur de la reine Nathalie, femme de dix ans son aînée et dont le passé prête à critique. Milan, furieux de cette union morganatique, s’éloigne, tandis que la Russie — qui applaudit au mariage (août 1900) — redevient la protectrice officielle des Serbes.
En avril 1901, Alexandre signe une constitution assez libérale qui abaisse le cens électoral et crée un sénat. Mais le jeune roi, de physionomie ingrate, d’allure gauche, au caractère soupçonneux, déçoit son entourage ; d’autre part, le peuple est sensible au fait que la reine Draga s’avère dans l’impossibilité de donner un héritier à la dynastie. Les adversaires des Obrenović — milanistes, austrophiles et autres — entament alors une campagne injurieuse contre la souveraine. Au début de 1902, un agent de la dynastie rivale des Karadjordjević, Radomir Milinković Alavantić, essaie même de soulever une garnison : il est abattu. Ulcéré, humilié par le report perpétuel de son voyage à Saint-Pétersbourg, Alexandre revient à une politique autoritaire ; il forme en novembre 1902 un ministère de gouvernement personnel (avec Dimitrije Cincar-Marković [1849-1903]), avant de dissoudre la Chambre (janv. 1903) et de suspendre la constitution (avr.). La rupture avec le Parti radical est totale quand le roi paraît disposé à désigner comme héritier l’un des frères de la reine. Au lendemain des élections législatives du 1er juin 1903 — marquées par le boycottage des radicaux et de fortes pressions administratives —, une conjuration militaire se trame qui aboutit, le 11 juin au lever du jour, au massacre du roi, de la reine, de ses frères et des principaux ministres.
Ainsi s’éteint la dynastie des Obrenović. L’heure des Karadjordjević a de nouveau sonné.
P. P.
➙ Karadjordjević / Serbie.
B. S. Cunibert, Essai historique sur les révolutions et l’indépendance de la Serbie depuis 1804 jusqu’à nos jours (Frank, 1855 ; 2 vol.). / C. Mijatović, A Royal Tragedy (Londres, 1906). / M. Gavrilović, le Prince Miloš Obrenović (en serbo-croate, Belgrade, 1908-1912 ; 3 vol.). / S. Jovanović, le Règne d’Alexandre Obrenović (en serbo-croate, Belgrade, 1929-1931 ; 2 vol.).