Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Nîmes (suite)

Au moment de la crise albigeoise, Nîmes fut prise en 1207 par Simon de Montfort et en 1226 par le roi de France Louis VIII. En 1229, elle entrait dans le royaume de France, sous l’administration d’un sénéchal, et des forces royales s’installaient dans les arènes. Une ordonnance royale de 1272 fixa la composition d’un conseil de 27 membres chargé d’élire les consuls et de les assister.

Le protestantisme trouva un terrain favorable chez les bourgeois et les artisans nîmois. De graves incidents éclatèrent en 1567, et les églises furent saccagées. Cependant, le 30 août 1572, catholiques et protestants parvinrent à s’entendre pour éviter tout massacre.

Soulevée en 1621 par Dupont et Masyures, qui prirent le duc Henri de Rohan pour chef, puis en 1627 par Rochelais, Nîmes accepta finalement la paix d’Alès.

Après la révocation de l’édit de Nantes en 1685, l’intendant Bâville investit la cité. Nombre de protestants s’expatrièrent ou gagnèrent les Cévennes pour y grossir les rangs des camisards*. Quand Jean Cavalier se soumit, c’est au jardin des Récollets de Nîmes qu’il rencontra le maréchal de Villars (1704).

Au xviiie s., Nîmes participa au renouveau démographique général : de 25 000 habitants en 1730, et le passa à 42 000 en 1789.

Dans ses cahiers de doléances, Nîmes demanda au roi d’achever l’œuvre de 1787 par « la liberté complète de pensée, propriété des plus chères à l’homme, surtout en matière d’opinions religieuses ».

Un conseil permanent de 21 notables — des bourgeois protestants — se constitua dès que parvint la nouvelle de la prise de la Bastille, pour administrer la ville, qui devint chef-lieu du département du Gard. Des troubles éclatèrent en juin 1790 entre protestants et catholiques, ces derniers n’admettant pas que l’Assemblée constituante ne reconnaisse pas le catholicisme religion de l’État. Puis le Club de Nîmes accusa la municipalité de « complicité avec la réaction », et il fallut une intervention de la garde nationale de Montpellier pour arrêter le massacre, qui avait déjà fait 300 victimes.

Les bourgeois nîmois ralliés à la République girondine refusèrent de reconnaître l’autorité de la Convention et établirent un projet de nouvelle Convention qui prévoyait la formation d’une République fédérative avec les vingt-quatre départements méridionaux de Bordeaux à Lyon. Devant cette menace qui mettait en péril la « République une et indivisible », la Convention envoya 6 000 hommes dans le Gard pour briser la sécession, puis, en janvier 1794, le Conventionnel Borie constitua à Nîmes un tribunal révolutionnaire qui opéra 800 arrestations et décida de 136 exécutions.

À la chute de l’Empire, les Blancs massacrèrent des bonapartistes, et le duc d’Angoulème vint en personne rétablir l’ordre.

C’est un Nîmois, François Guizot*, conservateur, qui fut de 1840 à 1848 le chef de gouvernement de Louis-Philippe.

J. P.

➙ Gard / Languedoc - Roussillon.

 J. Vieilleville, Nîmes, vingt siècles d’histoire (Éd. de la Maison carrée, Nîmes, 1941). / R. Lhermet, Nîmes cité protestante (Impr. Chastanier, Nîmes, 1961). / Languedoc (Horizons de France, 1965). / P. Wolff (sous la dir. de). Nouvelle Histoire du Languedoc (Privat, Toulouse, 1967). / R. Dugrand et R. Ferras, Sète, Nîmes, Montpellier, une capitale linéaire (Montpellier, 1970).


L’art à Nîmes

Aucune ville française n’a gardé autant que Nîmes la marque grandiose de l’urbanisme romain.

Les célèbres Arènes datent du ier s. de notre ère. De forme elliptique, cet amphithéâtre mesure 133 m sur 101 m, et ses deux étages de soixante arcades s’élèvent à 21 m. Il est ouvert aux quatre points cardinaux. Deux taureaux sculptés soutiennent le fronton de sa porte nord. Force et harmonie caractérisent cet incomparable monument, dont les trente-quatre gradins pouvaient accueillir près de 23 000 spectateurs.

Dédié à Caïus et Lucius, « princes de la jeunesse », petits-fils d’Auguste, le temple appelé Maison carrée, dont le charme naît de l’équilibre parfait des proportions, a 26,50 m de longueur, 13,50 m de largeur et 17 m de hauteur avec son stylobate. Ses trente colonnes cannelées de style corinthien, hautes de 7,35 m, se terminent par des chapiteaux à feuille d’acanthe de 1 m ; l’entablement comporte une frise de rinceaux très élégants. Une volée de quinze marches donne accès au péristyle de dix colonnes supportant le fronton. À l’intérieur est installé un musée des Antiques, qui abrite notamment la Frise des aigles, reste de la riche décoration d’un monument disparu, la basilique plotine.

Sont également de l’époque romaine la porte d’Arles, dite « d’Auguste », la porte d’Espagne et le temple de Diane, construit sous Hadrien près de la fontaine Nemausus ; ce temple a conservé sa façade à trois portiques et une partie de sa voûte en plein cintre. De même la tour Magne, chantée par Mistral, du haut de laquelle on découvre un vaste panorama sur la mer, les étangs, la garrigue, les Cévennes, les Alpilles et les Pyrénées orientales.

À quelques kilomètres de Nîmes, l’aqueduc dit « Pont du Gard » témoigne du génie civil de Rome. Construit sur l’ordre d’Agrippa, gendre d’Auguste, pour amener à Nîmes l’eau des sources d’Eure et d’Airan captées près d’Uzès, il se compose de deux étages de grandes arcades en plein cintre surmontées d’un étage de petits arceaux portant le canal. L’ouvrage mesure 142 m sur 6 m au premier niveau, 242 m sur 4 m au niveau médian et 275 m sur 3 m au sommet ; un pont routier lui a été accolé au xixe s.

Attraction majeure de la Nîmes moderne, le jardin de la Fontaine constitue une réalisation exemplaire de l’urbanisme français du xviiie s. Il étale sur les pentes du mont Cavalier, couvert de pins et de cèdres, escaliers monumentaux, balustrades, vasques, statues d’une sobre beauté qui se reflètent dans les bassins pour l’enchantement du promeneur.

J. P.

 R. Peyre, Nîmes, Arles, Orange (Laurens, 1902). / E. Espérandieu, l’Amphithéâtre de Nîmes (Laurens, 1934). / A. Dupont, Nîmes, le pont du Gard (Alpina, 1956). / A. Michel, Nîmes et ses rues (Libr. Sources, Aix-en-Provence, 1965).