Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

national-socialisme (suite)

Dans les Länder, les nazis n’obtiennent pas toujours la majorité. Ils ne l’ont ni en Bavière ni en Prusse. Dès lors, conformément à la Constitution, Hitler nomme des commissaires du Reich dotés de pouvoirs importants. En même temps apparaissent les premières mesures antisémites. On épure la presse et l’on commence à contrôler l’édition. Le 13 mars, Paul Joseph Goebbels (1897-1945) devient ministre de la Propagande. Deux premiers camps de déportés sont créés : à Oranienburg, près de Berlin, et à Dachau, près de Munich. Dès le mois d’avril, on y trouve 30 000 déportés politiques, socialistes ou communistes. Le 1er mai 1933, Göring fonde la police secrète d’État prussienne, dont la fusion, sous la direction de Heinrich Himmler (1900-1945) et de Reinhard Heydrich (1904-1942), avec les autres organisations policières allemandes donnera naissance à la Gestapo (Geheime Staatspolizei).

Le 21 mars, dans la Garnisonkirche de Potsdam, a lieu une cérémonie extraordinaire. Devant les plus hautes autorités du pays, en présence du Kronprinz, Hitler dénonce le traité de Versailles et invite les partis à s’élever « au-dessus de l’étroitesse d’une pensée doctrinaire et partisane ». Le 24 mars, le Reichstag vote à la majorité des deux tiers les pleins pouvoirs à Hitler pour quatre ans (Ermächtigungsgesetz). Seuls les sociaux-démocrates ont voté contre. Le centre, dont les voix sont indispensables, car une majorité des deux tiers s’impose, fait confiance à Hitler, sans doute contre la promesse d’un concordat auquel Hitler fait allusion dans son discours. Le chancelier demande aussi que le Parlement accepte de ne plus être consulté régulièrement, il réclame et obtient pour le gouvernement qu’il préside des pouvoirs considérables. Dès lors, avec la bénédiction des Églises, en particulier de l’Église catholique, Hitler est le maître absolu du Reich.

Les partis politiques estiment pouvoir continuer leur action et « s’abandonnent, dit l’historien allemand Hans Rothfels, à l’illusion de la possibilité d’une opposition politique ». On voit même dans le Wurtemberg le parti social-démocrate inviter les municipalités socialistes à soutenir la politique du gouvernement. Mais, le 22 juin, le parti socialiste est dissous. Le 4 juillet, le Zentrum se dissout de lui-même. Le 14 juillet, le parti nazi devient le seul parti du Reich.

Le gouvernement ne se contente pas de supprimer les partis : le 2 mai, il a dissous les syndicats. Après avoir invité leurs chefs à une grandiose fête du Travail, il fait occuper leurs sièges berlinois et emprisonner leurs chefs. Tous les syndicats sont alors incorporés dans le Front allemand du travail (Deutsche Arbeitsfront [DAF]). Ainsi, la prise en main annoncée par Goebbels dessine « les lignes normales d’une Allemagne dans laquelle il n’y aura qu’une seule opinion, un seul parti, une seule conviction ».

La Gleichschaltung, cette mise au pas hitlérienne, arrive peu à peu à ses fins. Le 1er décembre 1933 est promulguée la loi pour la garantie de l’« unité du parti et du Reich ». À la tête du parti vient Hitler, aidé par un état-major de dix-sept personnes, dirigées par le lieutenant du Führer, Rudolf Hess (né en 1894). En dessous, des Gaue (régions), menées par des Gauleiter. Les Gaue sont divisées en Kreise (cercles), groupes locaux (Ortsgruppen), et ceux-ci en cellules (Zellen). Partout une hiérarchie stricte, que complètent les organisations parallèles : SA (Sturm Abteilung), SS (Schutzstaffel), HJ (Hitlerjugend), DAF (Deutsche Arbeitsfront), associations féminines, universitaires. Tout cela contribue à faire de l’Allemagne une machine bien huilée, surveillée, contrôlée et endoctrinée.


Réforme de l’enseignement et de l’Administration

Les hitlériens complètent leur propagande par une réorganisation de l’enseignement et une mise au pas des universitaires. Hitler proclame : « Dans un État national-socialiste, l’enseignement doit tendre non pas à entasser des connaissances, mais à obtenir des corps physiquement sains. »

Les professeurs opposants sont remerciés, qu’ils soient communistes, juifs ou simplement hostiles au régime. Il est vrai que Hitler peut s’appuyer sur une bonne partie du corps enseignant : 30 p. 100 des instituteurs, 35 à 40 p. 100 des professeurs du second degré, plus de la moitié des professeurs du supérieur sont proches du parti. Dès 1933, on réorganise la formation des maîtres. Les Hochschule für Lehrbildung prennent les élèves-maîtres pour quatre ans d’internat, et maîtres et élèves doivent aller aux cours en uniforme du parti. Directeurs et professeurs sont à la fois fonctionnaires de l’État et chefs de la HJ. Le but est que l’instituteur soit à la fois dans sa commune un maître, un instructeur politique et un officier de réserve. En 1939, l’association nationale-socialiste des enseignants fournit 7 Gauleiter, 78 Kreisleiter et 2 668 Ortsleiter ; 18 000 instituteurs et institutrices encadrent la Jeunesse hitlérienne. L’objectif est une politisation de l’enseignement, qu’on veut au service de la nation, de la défense et de la politique. Il faut inculquer aux enfants l’idée de race, de supériorité des peuples germaniques, la conviction que le destin de l’Allemagne est à l’Est et que l’armée est la force éternelle du Reich.

En même temps sont instaurées des écoles de formation politique, les Nationalpolitische Erziehungsanstalten (NAPOLA). Leur but est de « préparer par une solide éducation nationale-socialiste des jeunes gens au service du Reich, du peuple et de l’État ». Il faut fournir des diplômés conscients de l’unité des caractères physiques et mentaux de leur race, sûrs d’eux, fidèles, sérieux, entreprenants, physiquement forts, intellectuellement armés. Pour la formation des maîtres du parti sont créés des Adolf Hitler-Schulen et des Ordensschulen, centres supérieurs de formation des cadres.

La Jeunesse hitlérienne, qui groupe 1 million de membres en 1932, en compte 8 millions en 1939. Il est vrai qu’après 1936 le mouvement est devenu obligatoire.