Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Nara

V. du Japon (Honshū), 156 000 hab.


Sous le nom de Heijō-kyō, elle fut capitale impériale du Japon de 710 à 784, résidence de la cour de 710 à 794 (époque Tempyō).

Cherchant à briser l’emprise politique des familles du district d’Asuka sur la ville de Fujiwara-kyō, l’impératrice régnante Gemmyō transfère en 710 la capitale plus au nord, sur le site de Nara. Sept empereurs, dont les sépultures jalonnent encore les hauteurs de la ville, s’y succèdent jusqu’en 784. Les échanges avec la Chine des Tang (T’ang) sont alors multiples et fructueux, introduisant au Japon les coutumes du continent par l’intermédiaire des missions politiques et des voyages religieux.

À partir de 784, l’empereur réside à Nagaoka, avant de fixer la capitale à Heian-kyō (auj. Kyōto*) en 794. Après un siècle d’activité intellectuelle et artistique intense, Nara, privée de ses prérogatives impériales, reste pour quelque temps un centre spirituel actif, puis elle devient une petite ville provinciale, à laquelle la sobriété majestueuse de ses temples confère, aujourd’hui encore, un charme inoubliable.


Le plan à la chinoise

Heijō-kyō, comme plus tard Heian-kyō, s’inspirait du plan en damier de la métropole chinoise de Chang’an (Tch’ang-ngan). Les rues s’y coupaient à angle droit, déterminant un vaste quadrilatère d’environ 5,7 km du nord au sud sur 4,4 km d’est en ouest. Cependant, les principes de l’urbanisme chinois furent adaptés au système de division des terres préexistant au Japon, si bien que les îlots d’habitation (bô) — 8 îlots est-ouest, 9 îlots nord-sud — étaient de plan carré et non pas rectangulaire comme à Chang’an. L’ancienne route axiale de la vallée du Yamato devint l’artère principale, qui séparait la ville en deux parties égales, pourvues chacune d’un marché. Cette avenue pénétrait par la porte sud (Rashōmon) et aboutissait, au nord, au palais (dairi), près duquel étaient rassemblés les artisans. Les nobles et les religieux logeaient en ville, mais le peuple habitait les alentours. La population (env. 200 000 personnes) comprenait une majorité d’hommes, car beaucoup de fonctionnaires venaient seuls de la campagne pour accomplir leur charge gouvernementale.

Peu après sa fondation, la ville fut agrandie de 12 îlots dans le secteur oriental, ce qui créait une irrégularité dans le plan. L’actuelle Nara, située dans la partie est de cette extension, n’englobe donc pas la plupart des temples de la ville ancienne : Daian-ji, Hokke-ji (couvent des nonnes), Yakushi-ji, Tōshōdai-ji, Saidai-ji.


Les grands temples

L’adoption du bouddhisme comme religion d’État entraîne l’établissement de nombreuses sectes dans la région de Nara. Sous le patronage de la famille impériale et des aristocrates, les temples se multiplient. Ils sont décorés par les ateliers de la cour, dont les artisans copient et illustrent les sūtras (Kalo Genzai Inga-kyō, « Sūtra des Causes et des Effets », 735, Kyōto). Au Hōryu-ji, construit à l’ouest de Nara au début du viie s. et augmenté de nouvelles structures comme le Yumedono (salle des rêves), s’ajoutent ainsi le Kōfuku-ji, le Yakushi-ji, le Tōdai-ji et le Tōshōdai-ji. La construction du Tōdai-ji, temple majeur des fondations de province, nécessita plus de vingt ans de travail. Outre le gigantesque Daibutsu-den (salle du Grand Bouddha), qui abritait une statue en bronze de 17 m de haut, témoin de l’habileté des fondeurs de Nara, le monastère comprenait deux pagodes de sept étages (aujourd’hui disparues), des portes gigantesques (seul demeure le Nandaimon) et de nombreuses annexes. Malheureusement, cet ensemble, comme beaucoup de temples de Nara, fut détruit par des incendies au cours des guerres civiles (fin du xiie s.) et des luttes entre les différentes sectes. Reconstruit chaque fois avec des variantes dans le style comme dans la technique, il a perdu sa grandeur d’origine. Le Shōsō-in, prototype des structures en bois destinées à contenir les trésors des temples, abrite encore les collections de l’empereur Shōmu, offertes par sa veuve en 756 au Tōdai-ji : laques, textiles, miroirs, instruments de musique, paravent décoré de « beautés sous des arbres » ont été exécutés pour la plupart, sur place, par des émules des artisans chinois.

Le kondō (temple d’or) du Tōshōdai-ji, monastère fondé vers 759 par le moine chinois Ganjin, offre un des rares exemples bien conservés de l’architecture en bois de la fin du viiie s. : toits bas largement débordants, piliers massifs, supports entre les consoles. Dans l’atelier de ce temple furent créées de superbes sculptures en bois massif, imitées des œuvres Tang, mais attestant l’habileté grandissante des praticiens japonais. Le grand art de la statuaire de Nara, dont on peut suivre l’évolution depuis le Yakushi-ji et le Kōfuku-ji, sera une source d’inspiration nouvelle pour les sculpteurs du xiiie s. comme Unkei* et Tankei.

F. D.

➙ Japon / Pagode.

Narbonne

Ch.-l. d’arrond. de l’Aude ; 40 543 hab. (Narbonnais).


Petite sous-préfecture de l’Aude, Narbonne est un carrefour routier et ferroviaire vers l’Aquitaine et la Catalogne, dans la basse plaine marécageuse entre les massifs des Corbières et de la Clape, en plein vignoble languedocien.

Dans une région aux fortes densités humaines, sur un site préalablement occupé par divers peuples, en 118-117 av. J.-C., est fondée Narbo Martius, première colonie romaine en Gaule et future métropole languedocienne. Capitale de la province, puis de la Narbonnaise, elle bénéficie : d’une situation privilégiée sur l’isthme qui permet (par l’Aquitaine) de gagner l’Atlantique ; de l’existence d’un port actif relié à la mer par le canal de la Robine ; de la présence d’un nombre important de marchands ; de la concentration d’un monde de fonctionnaires attirés par la cour du gouverneur de la province. La densité des découvertes archéologiques permet à peine d’imaginer toute l’importance d’une ville extrêmement vivante et grouillante d’activité. L’archevêché ne sera supprimé qu’à la fin de l’Ancien Régime, les comtes de Toulouse conserveront en Gothie le titre de ducs de Narbonne, la ville sera définitivement rattachée au royaume de France en 1507 seulement.

Le partage des pouvoirs civils et religieux de jadis se projette encore sur la physionomie de la ville : au sud, le Bourg, administré par le vicomte ; au nord, la Cité, sous la dépendance de l’archevêque.