Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Napoléon III (suite)

De fait, quand il était rentré en France, venant de Londres, en 1848, Louis Napoléon Bonaparte était démuni d’argent et de prestige. De la France, il ne connaissait pas grand-chose, ayant à l’âge de sept ans accompagné sa mère, la reine Hortense, en exil. En 1832, à la mort de son cousin, le duc de Reichstadt, il s’était considéré, devant l’inaction de son père, l’ex-roi Louis de Hollande, et de ses oncles, comme le véritable prétendant Bonaparte. Mais les équipées de Strasbourg (1836) et de Boulogne (1840) ne furent que la caricature de l’épopée napoléonienne.

Six ans de prison à Ham, une fuite rocambolesque, une réputation d’homme à femmes, voire de bâtard (la frivolité de la reine Hortense était légendaire), un entourage d’aventuriers (Morny, Persigny, Mocquard, Saint-Arnaud), d’obscurs avocats de province (Baroche, Rouher) et de financiers (Fould) : voilà, chez cet homme de quarante ans, qui ne ressemble guère à la carrière fulgurante d’un certain général de trente ans sur le point de devenir consul de la République en 1799.

Mais Louis Napoléon chef de l’État va se dénouer, cultiver sa popularité personnelle, prendre du large avec ceux qui l’ont porté au pouvoir, passer sans difficulté majeure de l’Élysée aux Tuileries et s’efforcer d’entrer dans la peau d’un « Napoléon ».

« Napoléon le Petit » : l’étiquette insultante collée par Victor Hugo sur le personnage de notre second empereur n’a jamais été grattée entièrement. Sans doute, le neveu fut très éloigné du génie de son oncle, mais on souscrirait assez volontiers à la boutade de Saint-Marc-Girardin qui, en 1870, agacé par un détracteur de l’Empire, lança : « Vous ne me ferez pas croire, malgré tout, que 36 millions de Français se soient laissés gouverner pendant dix-huit ans par un imbécile. »

P. P.

➙ Bonaparte (les) / Empire (second) / République (IIe).

 P. Guériot, Napoléon III (Payot, 1933-34, 2 vol.). / R. Burnand, Napoléon III et les siens (Hachette, 1948). / M. de La Fuye et A. Babeau, Louis-Napoléon Bonaparte avant l’Empire (Éd. fr. d’Amsterdam, 1952). / A. Dansette, Histoire du second Empire (Hachette, 1961-1972 ; 2 vol.). / J. P. T. Bury, Napoleon III and the Second Empire (Londres, 1964). / A. J. Tudesq, l’Élection présidentielle de Louis-Napoléon Bonaparte, 10 décembre 1848 (A. Colin, 1965). / G. Conchon, Nous, la gauche, devant Louis-Napoléon (Flammarion, 1969). / G. Roux, Napoléon III (Flammarion, 1969). / R. Christophe, Napoléon III au tribunal de l’histoire (Éd. France-Empire, 1971). / G. Spillmann, Napoléon III, prophète méconnu (Pr. de la Cité, 1972). / A. Castelot, Napoléon III (Perrin, 1973-74 ; 2 vol.).

Une carrière, un règne

1808

20 avril : naissance à Paris de Louis Napoléon, troisième fils de Louis Bonaparte, roi de Hollande, et de Hortense de Beauharnais.

1815-1830

Hortense et ses enfants se réfugient à Aix-les-Bains (Savoie), puis errent de domicile en domicile pour s’installer finalement au château d’Arenenberg, en Suisse, sur les bords du lac de Constance.

Louis Napoléon a pour précepteur Philippe Le Bas ; il fréquente le gymnase d’Augsbourg et suit les cours de l’école militaire de Thoune.

1831

Avec son frère aîné, Napoléon Louis (qui meurt en Romagne), il participe à une insurrection libérale dans les États pontificaux.

1832

À la mort de « Napoléon II », Louis Napoléon se considère comme le chef dynastique des Bonaparte.

1836

30 octobre : échec à Strasbourg d’une tentative de prise du pouvoir.

1837

Séjour aux États-Unis ; retour en Suisse où, le 5 octobre, meurt Hortense.

1838

Installation à Londres.

1839

Publication des Idées napoléoniennes.

1840

6 août : échec d’un nouveau coup de main à Boulogne. Louis Napoléon est condamné à la détention perpétuelle au fort de Ham, où il écrira l’Extinction du paupérisme.

1846

25 mai : évasion de Ham. À Bruxelles, puis à Londres (le roi Louis de Hollande meurt le 25 juillet).

1848

À Paris ; élu dans quatre départements à l’Assemblée constituante sans avoir fait acte de candidature (juin), Louis Napoléon démissionne (juin) ; candidat, il est élu dans cinq départements (sept.) ; soutenu par le Comité de la rue de Poitiers et par l’attachement des masses au mythe napoléonien, il est élu très brillamment président de la République (10 déc.).

1848-1851

Le prince-président combat le « péril rouge », mais entre vite en conflit avec l’Assemblée législative, à majorité monarchiste.

1851

2 décembre : coup d’État du président ; un plébiscite approuve l’instauration d’un régime consulaire (21-22 déc.).

1852

La Constitution du 14 janvier maintient le président pour dix ans avec de très larges pouvoirs ; après un « voyage d’interrogation » et un nouveau plébiscite (21 nov.), il est proclamé empereur des Français (2 déc.) sous le nom de Napoléon III. S’instaure l’absolutisme à peu près sans réserve (v. Empire [second]).

1853

29 janvier : mariage de Napoléon III avec Eugénie de Montijo (Grenade 1826 - Madrid 1920).

1854-1856

Guerre de Crimée.

1856

Apogée de Napoléon III ; congrès de Paris (25 févr. - 28 mars) ; naissance (16 mars) du prince impérial Eugène Louis († au Zoulouland 1879).

1858

14 janvier : attentat d’Orsini ; loi de sûreté générale (févr.).

1859

L’empereur à Turin et Milan : campagne d’Italie. Amnistie.

1860

Traité de commerce avec l’Angleterre (23 janv.) ; annexion de la Savoie et Nice (24 mars) ; Napoléon III amorce une politique libérale.

1862-1867

L’expédition du Mexique.

1865-66

Histoire de Jules César, par Napoléon III.

1865

4-12 octobre : entrevue avec Bismarck à Biarritz.

1866

3 juillet : Sadowa ; début de la politique des « pourboires ».

1867

3 novembre : Mentana.

1870

Parlementarisation relative du régime ; ministère Émile Ollivier (2 janv.) ; plébiscite favorable à l’Empire (8 mai) ; guerre franco-allemande (juill.) ; capitulation de Sedan (2 sept.) ; déchéance de l’Empire et proclamation de la République (4 sept.) ; captivité de l’empereur à Wilhelmshöhe, près de Kassel.

1871

Napoléon III quitte Wilhelmshöhe (19 mars) et s’installe en Angleterre, à Chislehurst, avec l’impératrice et leur fils.

1873

9 janvier : mort de l’empereur.

1887

L’impératrice fait transférer les corps de son époux et de son fils au château de Farnborough Hill.