Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Naples (suite)

Le paysage urbain est le résultat d’une longue évolution historique. Ancienne cité grecque, puis romaine, pendant tout le Moyen Âge, Naples est enfermée dans les murs érigés au Bas-Empire, avec un faubourg important vers la mer. Le choix de Naples comme capitale par les Angevins apporte la prospérité, et la ville commence à prendre un aspect monumental. La période espagnole est marquée par de nombreuses constructions. Sous les Bourbons, les embellissements de la ville vont de pair avec un processus d’industrialisation assez vif. Mais les conséquences économiques de l’Unité sont graves pour Naples. En dépit de dispositions visant à améliorer la situation de l’emploi, le problème chronique de cette ancienne capitale devient celui du chômage, auquel il faut ajouter un déficit permanent de logements.

Les destructions liées à la guerre aggravent les difficultés. Depuis, de gros progrès ont été réalisés. Le nombre d’habitants par pièce est tombé de 2,11 en 1951 à 1,49 en 1961, 1,10 en 1971. L’ampleur des constructions a modifié la physionomie des quartiers et crée, par manque de concertation, d’inextricables problèmes de circulation. En arrière du port, jusqu’à la place Dante, s’étend le vieux noyau citadin. Il se signale par la densité des constructions et la pluralité de ses fonctions. On y trouve l’université, les organismes judiciaires, la Bourse, les musées. De beaux palais sont enchâssés dans les taudis, avec le maintien d’habitations en rez-de-chaussée (les bassi) et une prolifération de commerces. Ce quartier se soude à l’ouest avec le nouveau quartier administratif, commercial et touristique autour de Piazza Municipio, et à l’est avec le quartier commercial de Piazza Garibaldi. Vers le port, un quartier très populaire, en cours de rénovation, montre encore des baraques nées de la guerre. Sur les pentes des collines de San Martino et Capodimonte, la résidence modeste l’emporte, alors que sur celles du Vomero, du Posillipo, de Santa Lucia, Chiaia et Mergellina les belles demeures s’étalent face à la mer. Plus loin vers l’ouest, dans la plaine de Fuorigrotta et Bagnoli, les industries, quelques services (exposition d’Outre-Mer) et les habitations sociales voisinent. De grands quartiers autonomes ont été bâtis sur le revers du Vomero et vers Capodimonte. Quant à la partie est de l’agglomération, elle est également marquée par l’alternance de complexes industriels et d’unités résidentielles, dans la plaine formée par le Sebeto (Ponticelli, Barra, San Giovanni a Teduccio), et elle se relie sans solution de continuité à Portici, Torre del Greco ou Casoria. L’extension se continue rapidement. Ces agrandissements sont le reflet du peuplement intense de la région napolitaine. En 1861, Naples comptait 447 000 habitants, elle était alors la ville la plus peuplée d’Italie ; elle le resta jusqu’en 1921. Mais, si la population a triplé en un siècle, son accroissement est plus lent que celui des autres grandes métropoles italiennes. Cela est dû aux caractères de l’évolution démographique. C’est l’accroissement naturel qui concourt à la montée de la population. Naples a conservé de forts taux de natalité (supérieurs à 24 p. 1 000) face à des taux de mortalité très faibles (moins de 9 p. 1 000), en dépit d’une très notable mortalité infantile. L’excédent naturel est donc élevé, plus du double de la moyenne nationale. Par contre, l’apport migratoire n’a cessé de s’amenuiser. Il a été de 52 000 personnes de 1930 à 1938, de près de 12 000 personnes de 1951 à 1961. La situation s’inverse de 1961 à 1971, puisque l’excédent naturel a été durant cette décennie de 183 075, mais le bilan migratoire a été négatif (– 133 013). Aux nombreux migrants venus des provinces plus méridionales, qui transitent à Naples, s’ajoutent les départs des Napolitains eux-mêmes en direction du nord de l’Italie. C’est là une situation urbaine originale. Elle s’explique par la précarité des conditions économiques. En 1971, il n’y a que 24 p. 100 de la population totale qui soient des actifs. Cette importance de la population non active est en partie liée à l’extrême jeunesse de la population, qui ne peut toutefois cacher le nombre élevé de chômeurs, dont le reflet est l’abondance des petits métiers, le caractère sordide de certaines rues. Le sous-prolétariat napolitain est toujours une réalité.


Les fonctions

Parmi les activités existantes, le secteur tertiaire l’emporte. À côté du rôle administratif et culturel, Naples a une fonction commerciale et financière importante, mais les pouvoirs de décision n’appartiennent pas à Naples, ils sont concentrés à Rome ou Milan. La fréquentation touristique n’est pas négligeable. Outre la visite de la ville, Naples est le point de départ d’excursions vers la péninsule de Sorrente (Positano, Amalfi), vers les îles de Capri et Ischia, vers les sites archéologiques de Pompéi, Herculanum, Cumes, vers le Vésuve. Mais l’activité tertiaire principale est celle qui est liée au port. Organisé au xviiie s., agrandi au xixe s., il s’est développé d’ouest en est, protégé par deux digues parallèles au rivage (pour les pétroliers, un port et une île flottante ont été construits plus récemment). Il est complété par cinq autres ports (Pouzzoles [Pozzuoli], Portici, Torre del Greco, Torre Annunziata, Castellammare di Stabia). Le trafic portuaire global (dans lequel on inclut l’activité de l’annexe de Bagnoli) est de 14 Mt pour les marchandises. Les importations l’emportent nettement (12 Mt), dont un quart pour les seuls produits lourds arrivant à Bagnoli et destinés à la sidérurgie. À Naples même, ce sont les hydrocarbures qui constituent l’essentiel du trafic. Le trafic des passagers s’est transformé et a régressé. Le temps des grandes migrations internationales n’est plus, et Naples a donc perdu ce rôle de port de départ. Mais le mouvement des voyageurs subsiste (plus de 2,6 millions par an), notamment pour le trafic touristique vers les îles. La grande faiblesse du port de Naples est de s’appuyer sur un hinterland vaste, mais peu développé. Il est vrai que l’industrialisation du Mezzogiorno doit lui ouvrir de nouvelles perspectives. En attendant, le port dessert les industries locales.