Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Moscou (suite)

Les projets d’amélioration et d’extension de ce réseau visent : à décongestionner certaines lignes de métro ou gares de banlieue en intégrant les lignes de banlieue dans le réseau souterrain ; à prolonger, loin vers la périphérie, la plupart des lignes de métro, de façon que la longueur totale du réseau passe à plus de 300 km en 1980 (une nouvelle ligne nord-sud et une rocade doivent être creusées) ; à compléter ce réseau par une ligne de train sur coussin d’air qui unirait le Sud-Est à l’aéroport de Domodedovo ; à multiplier et allonger les lignes de trolley. Il faut également compter sur un accroissement de la circulation automobile privée, au moins durant les mois d’été. À cet égard, la ville présente des conditions plus favorables que les vieilles villes d’Europe occidentale : larges avenues, passages souterrains nombreux, rocades, code de conduite en ville très sévère, avec interdiction généralisée de tourner à gauche, etc. L’agglomération pourra sans grande difficulté absorber un million de voitures.

Le troisième problème est celui du ravitaillement. Celui de l’eau ne présente pas de difficultés particulières, malgré une consommation en fort accroissement. Des barrages-réservoirs, dont beaucoup sont des centres de villégiature et de sports nautiques, sont disposés sur toutes les rivières de la région du centre industriel. Les interconnexions électriques se nouent à Moscou, apportant le courant, soit des centrales thermiques du Donbass ou du bassin de Toula, qui est producteur de médiocres charbons, soit des grands ouvrages hydrauliques de la Volga. La région de Moscou n’a pas de grandes raffineries de pétrole, mais devient un carrefour de gazoducs dont le débit est passé de 10 milliards de mètres cubes en 1965 à 60 en 1970 et doit encore s’élever. Le premier, en 1948, a été tracé depuis Saratov et le Second-Bakou ; Moscou fut ensuite réunie à Dachava en Ukraine, puis à Stavropol, dans la région du Caucase du Nord, ensuite, en 1967, à Gazli, en Ouzbékistan ; enfin, en 1970, on envisageait d’y amener une partie de la production de Sibérie occidentale. Des réservoirs souterrains ont été prévus en vue du stockage du gaz dans la perspective des fortes consommations d’hiver. Ainsi, à ce point de vue, Moscou ne le cède en rien aux grandes métropoles d’Europe occidentale.

Le ravitaillement en matières premières pour l’industrie est bien assuré par les voies ferrées et les ports fluviaux, dont le trafic annuel total, le quart de celui des chemins de fer, doit s’élever entre 20 et 30 Mt. Le port nord, sur le canal Moscou-Volga, est à la fois destiné aux marchandises et aux voyageurs ; le port ouest se spécialise dans les matériaux de construction ; le port sud, dans la houille et les minerais.

Les aires d’attraction en vue du ravitaillement de la ville sont très étendues : pour le lait, par exemple, l’oblast ne fournit que la moitié de la consommation, le reste venant d’une dizaine d’autres régions. Comme dans toutes les villes des régimes socialistes, ce sont les problèmes de la distribution qui laissent à désirer. À côté du célèbre Goum (GUM), fréquenté surtout par des paysans et des provinciaux, l’agglomération compte des dizaines de « magasins universels », ou Univermag, des centres commerciaux liés aux grands ensembles ; les petits marchés appelés kolkhoziens dans les quartiers ne sont pas négligeables. Pour les denrées périssables ou de grande valeur, le trafic aérien, centré sur le nœud de plus de cent lignes intérieures que représentent les aéroports de Vnoukovo et de Domodedovo, prend une importance accrue.

Ainsi, comme l’une des grandes agglomérations mondiales, Moscou en expansion présente des traits originaux, souvent contradictoires, les uns rappelant le développement des capitales occidentales, les autres spécifiques de l’économie socialiste ou même de l’agglomération moscovite. Ainsi, l’agglomération a puisé dans les campagnes environnantes une partie de sa population ; mais à mesure que s’accroissait la population de la ville, les taux de natalité, donc d’excédent naturel, diminuaient, à tel point que, comme dans d’autres capitales du monde socialiste, ces excédents sont devenus très faibles. La capitale a concentré excessivement les services, et Nikita Khrouchtchev a été le premier à préconiser les mesures de décentralisation ; mais, malgré quelques succès obtenus, la concentration, notamment dans le secteur intellectuel, scientifique, culturel, est plus forte que jamais. Dans la ville même, on peut observer des scènes ou des personnes qui rappellent un passé typiquement russe ; on se sert de bouliers un peu partout dans les magasins, des files d’acheteurs, filets à la main, se forment spontanément devant une boutique. Mais les ambitions urbanistes sont celles d’une grande ville moderne qui vise à imiter l’Amérique en construisant les édifices les plus vastes ou les plus prestigieux et souvent d’ailleurs les mieux réussis sur le plan de l’urbanisme, comme les gratte-ciel de béton et de verre du Comecon et du ministère du Commerce extérieur.

Les services d’urbanisme du Mossoviet, qui emploient plusieurs milliers de personnes, se préoccupent du visage en l’an 2000 d’une agglomération qui risque de dépasser alors 10 millions d’habitants. On prévoit une lente rénovation des quartiers à l’intérieur de la Sadovaïa, en réduisant en particulier la population des quatre raïon centraux de 600 000 à 250 000 habitants, en dégageant la ville-musée et la city des immeubles vétustes. On envisage la reconstruction, sur place ou plus loin, des établissements industriels, dont les locaux datent souvent d’un demi-siècle ou plus. On se préoccupe du problème, généralisé à l’échelle mondiale, des grands ensembles, dont l’équipement n’est jamais achevé, n’est jamais satisfaisant pour des résidents de plus en plus exigeants, et jugé par la jeune génération monotone et ennuyeux. On s’efforce de multiplier, après la destruction de vieux quartiers, les espaces verts à l’intérieur même de la rocade, afin de les aménager en « parcs de culture et de repos ». L’achèvement des ensembles comme celui du sud-ouest dans la boucle de la Moskova et autour de l’université doivent se révéler un test et une leçon pour les urbanistes du futur. Mais, dans l’ensemble, les conditions d’un zoning de toute l’agglomération se présentent de façon beaucoup plus favorable que dans bien d’autres agglomérations multimillionnaires.