Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mollusques (suite)

Physiologie sensorielle

Il existe un certain parallélisme entre l’état de développement du système nerveux et le degré de perfection des récepteurs sensoriels. Effectivement, ceux-ci sont plus différenciés et plus sensibles chez les Céphalopodes* qu’ailleurs. Les récepteurs tactiles consistent en neurones bipolaires dont l’extrémité distale se prolonge souvent au-delà du tégument. Disséminés ou groupés sur les tentacules céphaliques, les siphons, les osphradies, ils abondent sur le bord des ventouses des Céphalopodes, en des zones connues pour être très sensibles aux contacts et aux pressions.

Les statocytes, vésicules à paroi interne ciliée, pleines d’un liquide où baignent des concrétions, deviennent chez les Pieuvres des appareils très complexes, à zones ciliées orientées dans les trois dimensions de l’espace. Outre leur fonction fondamentale d’équilibration, ils doivent, dans ce dernier cas, percevoir les vibrations de basse fréquence.

La distinction entre l’odorat et le goût est bien malaisée chez les Mollusques aquatiques. La perception des odeurs (chémoréception à distance) est effective en certaines régions des tentacules, des rhinophores, des siphons, du pied. L’organe subradulaire, situé dans la cavité buccale de plusieurs catégories de Mollusques, a sans doute des fonctions gustatives (chémoréception de contact).

Les photorécepteurs forment une gamme d’appareils d’une grande variété localisés sur la tête ou en divers points du corps. C’est à la face dorsale des plaques des Chitons, à l’extrémité de filets nerveux qui les traversent que se différencient des petites papilles sensorielles, les esthètes, et des formations semblables, mais à pigment interne ou externe où se voient une cornée, un cristallin et une cupule oculaire. Un même Chiton peut porter plus de 8 000 organes de ce type sur les plaques de son test. La fonction exacte de ces yeux n’est pas connue ; toutefois, il ne semble pas douteux qu’ils soient sensibles aux variations d’intensité lumineuse.

Les yeux des Bivalves n’existent que dans un nombre réduit de genres, mais ils forment une série de complexité croissante. L’absence de la tête peut être la cause de leur répartition sur le bord du manteau, à la base du premier filament branchial ou sur les papilles des siphons. Sous leur état le plus simple, ces yeux sont des vésicules ouvertes à fond garni de cellules à pigment et à cavité remplie d’une masse de sécrétion. Un cristallin peut compliquer cette formation. Les Arches possèdent des yeux composés qui peuvent réunir près de 250 ommatidies. Enfin, l’œil à cavité close des Pectens ou des Cardium, pédonculé, atteint une grande perfection.

Une série de même valeur s’observe chez les Gastropodes, mais, jusqu’ici, seul l’œil des Escargots a fait l’objet d’études très poussées. Les cellules sensorielles y sont prolongées par des faisceaux très denses de microvillosités orientées selon l’axe de pénétration de la lumière.

De dimensions beaucoup plus grandes, les yeux des Pieuvres ont une constitution très comparable à celle des yeux de Mammifères ; ceux du Nautile, toutefois, sont ouverts et dépourvus de cristallin.

Il est difficile de savoir dans quelle mesure les Mollusques perçoivent la forme des objets ainsi que leur couleur, mais il est certain que les yeux des Gastropodes permettent à ces animaux d’apprécier la direction de la lumière, car, en maintes circonstances, c’est par rapport à elle qu’ils s’orientent.

La constitution de l’œil des Céphalopodes doit permettre la vision des formes, voire de certaines couleurs. Les pupilles se contractent sous l’influence de la lumière, ce qui, à n’en pas douter, influe sur la netteté de l’image rétinienne. La fente pupillaire, horizontale en vive lumière chez la Pieuvre, doit signifier que l’œil est astigmate dans ces conditions et que l’image est floue dans le sens horizontal.


Chromatophores et glandes tégumentaires

Le tégument de la plupart des Céphalopodes est sujet à d’assez brusques changements de teinte, provoqués par l’étalement ou la contraction de petites poches intradermiques chargées de grains de pigment. Ces poches, ou chromatophores, sont sous contrôle nerveux ; leur dilatation, qui produit l’état foncé de l’animal, constitue une réponse à un stimulus lumineux. La fin de la stimulation occasionne la relaxation des muscles, qui n’étalent plus les chromatophores, de sorte que le tégument pâlit. Le Nautile ne possède pas de chromatophores.

D’assez nombreux Gastropodes sont dotés de glandes bien caractérisées de plusieurs types, où sont élaborées des substances dont le rôle physiologique n’est pas toujours très apparent. La glande hypobranchiale des Murex, des Pourpres, des Mitres émet une substance muqueuse chargée d’un chromogène photosensible, qui engendre, sous l’effet de la lumière, des pigments indigoïdes bleus ou rouges ; c’est là l’origine de la pourpre recherchée dans l’Antiquité. L’odeur nauséabonde de la sécrétion provient de mercaptans qui accompagnent le chromogène.

La pourpre rejetée par l’Aplysie a une autre origine ; elle contient des chromoprotéines à groupements prosthétiques du type des bilines.

Plusieurs glandes logées dans le tégument de Gastropodes élaborent des sécrétions acides ; celles du Pleurobranche, tubuleuses, se ramifient beaucoup au plancher de la cavité palléale. Les sécrétions acides semblent être des sécrétions défensives.


Organes lumineux

Outre des formations glandulaires très diversifiées, le tégument de plusieurs Mollusques contient des zones luminescentes ou des zones où sont engendrées des substances qui deviennent luminescentes après extrusion. Dans les premières, la production de lumière résulte d’aptitudes particulières de photocytes, où se déroulent des phénomènes biochimiques mal connus, et parfois aussi de la présence de Bactéries lumineuses dans de petits organes bien individualisés.

Phylliroe, Gastropode pélagique sans coquille, au corps transparent, scintille la nuit, car certaines cellules de son tégument, dites « cellules de Müller », qui sont souvent groupées en petits massifs où parviennent des filets nerveux, ont la propriété de devenir luminescentes. Quelques autres Gastropodes possèdent des photocytes qui s’éclairent lorsqu’ils sont stimulés ; toutefois, Diakia, forme terrestre, devient spontanément lumineux.