mime et pantomime (suite)
Le théâtre sous l’influence des réformateurs, dont Jacques Copeau (1879-1949), donne une place prépondérante au corps de l’acteur. C’est au théâtre du Vieux-Colombier, que fonde Jacques Copeau en 1913, et surtout dans son école (1921) que commencent les premières tentatives du mime moderne, qui naissent sous forme d’exercices préparant l’acteur à un jeu plus complet. L’improvisation, le jeu de masque, l’acrobatie y sont pratiqués, tentant là à la fois l’acteur de la commedia dell’arte et celui du nō japonais.
Étienne Decroux (né en 1898), élève de cette école, formule un art du mime dans une définition rigoureuse proche de la statuaire et donne à cet art son autonomie, en même temps qu’il le systématise dans une forme proche du cubisme. Il fonde une école. Il est intéressant de noter qu’au Bauhaus*, à la même époque, le peintre chorégraphe Oskar Schlemmer (1888-1943) réalise un mime abstrait géométrique.
Jean-Louis Barrault collabore aux recherches de Decroux en subissant fortement la magie d’Antonin Artaud*. Il inscrit le mime dans un théâtre total et lui donne sa théâtralité (Autour d’une mère, 1935 ; Numance, 1937).
Marcel Marceau, élève de Decroux, va imposer une image du mime à travers le monde avec son personnage de Bip, et lui donner une large audience. Beaucoup de jeunes mimes viendront à cet art en s’inspirant de lui. Surtout soliste, Marcel Marceau a réalisé cependant quelques mimodrames, dont le Manteau, en 1951, qui marque une date.
En 1945, Jacques Lecoq, à la suite d’expériences issues du Vieux-Colombier, commence ses recherches sur le mouvement. Il fonde une école, où son enseignement tend à libérer le mime des formalismes qui le sclérosent.
L’étranger voit fleurir bon nombre de mimes, tournés soit vers un Pierrot de seconde main, soit vers les clowns, soit vers le cabaret, et se manifestant sous forme de numéros et de sketches. Des compagnies de mimes de grande importance numérique se font jour, en particulier dans les pays de l’Est, dirigées par des chorégraphes venus de la danse et employant des mimes ex-danseurs.
Les expériences actuelles du théâtre moderne, comme celles du Living Theatre ou de Jerzy Grotowski (né en 1933), s’appuient sur le corps de l’acteur, instrument privilégié.
Le mime qui commence et celui qui finit se confondent. Le mime se situe aujourd’hui à un point de rupture d’une société et d’une autre, peut-être d’une civilisation et d’une autre, mais nous n’avons pas assez de recul sur notre époque pour en saisir l’importance.
Le mime participe de ce fait à une recherche fondamentale du langage. La psychanalyse renouvelle les idées du corps et de l’esprit. Le psychodrame se confond avec le jeu du théâtre, l’exprimer avec le créer.
Loin du masque blanc à la larme et des nostalgies du boulevard du Crime, le mime perd son nom au profit du mouvement et du cri. Du cri qu’Antonin Artaud avait déjà lancé sans être entendu. Beckett, avec Acte sans paroles (1958), apporte au mime une autre dimension dans la confusion de notre temps.
Le mime aujourd’hui s’ouvre sur une pluralité de styles et se confond avec la danse et le théâtre, qu’il ne quitte jamais complètement.
J. L.
F. H. S. L’Aulnaye, De la saltation théâtrale (Barrois l’aîné, 1790). / P. Hugounet, Mimes et Pierrots (Fischbacher, 1889). / C. Hacks, le Geste (Flammarion, 1892). / C. Aubert, l’Art mimique (Meuriot, 1901). / C. Mic, la Commedia dell’arte (Schiffrin, 1927).