Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mexico (suite)

Les classes aisées et riches ont construit des quartiers de villas principalement à l’ouest de la ville (Lomas de Chapultepec) et au sud (Pedregal de San Angel), dans les secteurs au relief varié et bien aérés. D’anciens villages qui avaient accueilli au xixe s. des villas de vacances sont maintenant habités en permanence et modernisés (Coyoacán et Tlalpan au sud, San Jerónimo et San Angel au sud-ouest). Au nord-ouest, un ensemble moderne de type californien s’est édifié à Ciudad Satélite ; tous ces quartiers, bien desservis par autoroutes, ont les plus vastes centres commerciaux modernes.

Les classes moyennes occupent de vastes secteurs au centre ouest et au centre sud, mais aussi une marqueterie de lotissements (colonias) dont le standing dépend surtout de l’âge et de l’entretien, jusqu’à ce que la dégradation des immeubles conduise, si le prix du terrain est élevé, à une démolition pour reconstruire des immeubles à étages. Ceux-ci ne sont apparus qu’après 1960, tant pour l’habitat de luxe que pour les niveaux moyens, formant en général quelques blocs isolés dans le tissu des villas basses, à l’exception de l’ensemble de Nonoalco-Tlatelolco, où blocs et tours occupent au nord de la vieille ville l’emplacement de l’ancienne gare de triage. À ces quartiers aussi s’associent de vastes centres commerciaux ceinturés de parcs à voitures.

Pendant longtemps, l’habitat populaire n’a pas occupé une surface majoritaire dans l’agglomération : dès la fin du xixe s., les anciens quartiers de palais et de couvents (ces derniers vendus comme biens nationaux après 1860) se dégradent, les édifices coloniaux sont transformés en logements exigus et l’on construit d’autres logements collectifs misérables où chaque famille n’a qu’une pièce, la vecindad. La montée du prix du terrain, la dégradation des taudis, dont les loyers sont légalement bloqués, amènent des rénovations surtout après 1950, mais l’habitat populaire prédomine toujours autour du marché de la Merced. Dès les années 1940, les classes pauvres ont cherché à se loger sans subir la spéculation immobilière : à la périphérie de la ville, mais aussi dans les vides du tissu urbain, les squatters s’organisent et construisent des maisons improvisées de type rural, formant des bidonvilles (les ciudades perdidas) généralement dépourvus de services au départ. Cet habitat occupe d’anciennes carrières (ouest de la ville), les pentes trop fortes (nord et ouest), des coulées de laves (Pedregal de San Angel au sud). Mais l’administration du District Fédéral freine la construction tant pour les usines que pour l’habitat : la croissance se reporte dès avant les années 1960 dans l’État de Mexico, où de très vastes lotissements populaires sont autorisés, au nord de l’agglomération, mais surtout à l’est de celle-ci dans les terrains bordant le lac de Texcoco, où le seul municipe de Netzahualcóyotl a accueilli plus d’un million de personnes en dix ans, dans des marécages dont l’urbanisation reste très rudimentaire : ces colonias proletárias n’ont pas un habitat très supérieur aux ciudades perdidas.

Mexico, par son poids démographique et économique, par son dynamisme politique centralisateur, par son rôle majeur dans le métissage culturel mexicain, est un élément essentiel de l’originalité d’une nation, entre la tradition paysanne indigène et l’influence des États-Unis.

L’urbanisme à Mexico

La rapidité de la croissance démographique explique à la fois l’immensité de l’aire urbanisée de Mexico et le bouleversement de sa structure. La construction de la cité universitaire (1949-1954), l’exécution d’un programme de quinze mille logements sous la présidence d’Adolfo López Mateos, les réalisations spectaculaires liées aux jeux Olympiques de 1968 se sont révélées d’éclatantes réussites tant sur le plan de l’architecture que sur celui de l’urbanisme. Fonctionnalisme de la structure, hérité du Bauhaus*, réminiscences précolombiennes, baroque espagnol, réalisme social du décor font de la cité universitaire une œuvre extrêmement originale. Les plus importants architectes mexicains furent associés à la construction de cette ville satellite comprenant quatre-vingts édifices, primitivement destinée à 30 000 étudiants : Mario Pani et Enrique del Moral (plan-masse), Juan O’Gorman (bibliothèque), Jorge González Reyna (pavillon de la recherche cosmique). Ce dernier s’associa l’ingénieur Félix Candela, spécialiste des voiles de béton, auteur notamment de l’église Santa María Milagrosa et de la Bourse de Mexico. Les mosaïques de pierre qui couvrent la bibliothèque, la fresque de David Alfaro Siqueiros, associant peinture, sculpture et mosaïque, qui orne le rectorat, celles de José Chávez Morado (auditorium et grande cour centrale) représentent les symboles de la culture et les sources de la civilisation mexicaines.

L’architecture et l’urbanisme de Mexico sont étroitement unis. Les immenses quartiers de la périphérie, la restructuration du centre ont contribué à américaniser sa physionomie. Mais la générosité des structures, le respect des couleurs et des matériaux, l’audace des compositions personnalisent pleinement toutes les opérations d’urbanisme : la cité-jardin du Pedregal de San Angel, le Centre national de médecine, la tour latino-américaine et ses 43 étages, la place des Trois-Cultures, qui rassemble étrangement en un seul espace une pyramide indienne, une église baroque et des immeubles récents. Autour de cette place s’étend l’important ensemble de logements sociaux de Nonoalco-Tlatelolco.

La cité Olympique a été bâtie près de l’université et constitue maintenant un nouvel ensemble d’habitations. C’est l’architecte Pedro Ramírez Vázquez qui dirigea les différentes opérations. Le stade de l’université a été agrandi à cette occasion pour accueillir 100 000 personnes (stade Aztèque). Une fresque en pierres de couleurs variées, due à Diego Rivera, raconte l’histoire des sports au Mexique. Le palais des sports a été construit par Antonio Peyrí et Félix Candela ; sa coupole haute de 43 m est constituée d’une armature métallique recouverte de bois. Devant ce palais s’élèvent les sept colonnes de la Grande Ourse conçues par Mathias Goeritz, auteur du Manifeste de l’architecture émotionnelle (1953), qui fut à l’origine du mouvement antifonctionnaliste et marqua profondément les architectes et urbanistes mexicains.

M. M. F.