Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Meurthe-et-Moselle. 54 (suite)

La régionalisation naturelle ne correspond pas à la régionalisation économique et fonctionnelle. À ces derniers points de vue, trois types de régions peuvent être distingués. Le sud, aux influences vosgiennes, reste très rural, avec des industries disséminées dans les petites communes. Au centre domine l’agglomération Nancy-Toul-Lunéville. La fonction de passage fait de cet ensemble un important carrefour qui a attiré l’industrie, le commerce et les activités culturelles. Le nord, ou Pays Haut, est le pays minier et sidérurgique. L’agriculture, tout en occupant encore des espaces considérables, ne joue plus qu’un rôle secondaire. Les ouvriers-paysans sont rares. Les étrangers sont très nombreux dans les anciens villages devenus communes-dortoirs.

Le déséquilibre régional se reflète à travers la répartition de la population. Si la population départementale s’est accrue approximativement des trois quarts de 1876 à 1975, l’évolution par arrondissement est plus significative. Ainsi, l’arrondissement de Toul a décliné (56 359 hab. en 1975). Celui de Lunéville a reculé aussi (78 500). Par contre, celui de Nancy a vu sa population plus que doubler (395 593 en 1975). Mais c’est le nord industriel qui a connu l’expansion proportionnellement la plus importante, l’arrondissement de Briey passant, de 1876 à 1975, de 63 400 à 192 135. Ce chiffre est cependant en retrait sur celui de 1962 (205 300), illustrant les conséquences de la crise de la sidérurgie. L’agriculture ne compte plus que 8 000 exploitations. Seulement 50 p. 100 exploitent plus de 20 ha, mais utilisent 90 p. 100 de la superficie agricole utile. Dans le Pays Haut, la superficie moyenne par exploitation est de 46 ha ; dans le Toulois, elle n’est que de 10 ha. Là, la vigne connaît une certaine renaissance (400 ha). L’industrie sidérurgique marque profondément le département. Celui-ci fournit jusqu’à 27 Mt de minerai de fer, 5 Mt de fonte et 6 Mt d’acier. Mais le regroupement de la sidérurgie se faisant au profit du sillon mosellan, le Pays Haut traverse une crise grave. La reconversion est trop lente pour empêcher l’exode des travailleurs. Les soudières de Meurthe-et-Moselle commercialisent en moyenne 800 000 t de carbonate et de soude caustique. L’agglomération de Nancy*, aux activités diversifiées, est la zone la plus prospère, constituant la partie sud de la « métropole lorraine », qui s’allonge de Thionville à Nancy en passant par Metz.

F. R.

➙ Lorraine / Nancy.

Meuse. 55

Départ. de la Région Lorraine ; 6 220 km2 ; 203 904 hab. (Meusiens). Ch.-l. Bar-le-Duc. S.-préf. Commercy et Verdun*.


La Meuse est le plus rural et le moins peuplé des quatre départements lorrains. Physiquement, il correspond à la partie orientale du Bassin parisien. Son axe naturel principal est la vallée de la Meuse, qui le traverse du sud au nord, mais à l’ouest des Côtes (ou Hauts) de Meuse. Contrairement aux Côtes de Moselle, il n’y a pas de cours d’eau au pied des Côtes de Meuse. La grande voie de passage est reportée plus à l’ouest, c’est la vallée mosane proprement dite. On peut distinguer plusieurs régions constituées en bandes longitudinales parallèles. À l’est, les marnes et argiles du Callovien et de l’Oxfordien constituent la Woëvre. La faible pente du relief rend l’écoulement des eaux difficile. De ce fait, les étangs sont nombreux. Tous, cependant, ne sont pas d’origine naturelle. Les Côtes de Meuse sont la réplique des Côtes de Moselle, avec, cependant, quelques différences. La dénivellation est ici nettement moins importante. En l’absence d’un cours d’eau subséquent, l’érosion n’a pu affouiller les couches d’une manière aussi efficace que ne l’a fait la Moselle ; ainsi, on n’a pas une véritable dépression subséquente engendrant la fonction de passage. Les villages des Côtes de Meuse sont beaucoup plus isolés que ceux des Côtes de Moselle. Le plateau est constitué par le prolongement de la côte. Aussi les calcaires durs formant la corniche de la cuesta donnent-ils des plateaux aux surfaces peu ondulées. Quelques vallées entaillent les plateaux. Lorsque les calcaires sont à peine altérés, ils sont occupés par des forêts.

La vallée de la Meuse est le grand accident géographique traversant le département. Le plus souvent, le cours d’eau s’est encaissé au contact des deux types de calcaire. La rivière décrit de nombreux méandres, déterminant ainsi des sites pittoresques (falaises de Saint-Mihiel), utilisés souvent à des fins défensives. La vallée à fond plat, d’une largeur pouvant localement dépasser le kilomètre, est occupée par des prés, alors que le plateau est tourné vers la céréaliculture et les plantes sarclées. Vers l’ouest s’annonce l’Argonne, constituée par la gaize, ou grès calcarifère renfermant de la silice. Sa disposition méridienne entraîne une limite assez nette. Aussi les vallées franchissait l’Argonne ont-elles joué un rôle stratégique important.

La Meuse a été l’axe vital de l’Empire carolingien, et sa décadence n’en paraît que plus sensible. À cette époque, les voies nord-sud étaient essentielles. Dans le cadre français, par contre, ce sont les relations ouest-est qui l’emportent. Région profondément rurale, agricole, la Meuse, ne possédant, outre le calcaire, aucune richesse naturelle notoire, n’a pas connu la révolution industrielle, contrairement aux autres départements lorrains. Parmi les facteurs favorables, il faut citer la voie ferrée Paris-Bar-le-Duc-Strasbourg. La plupart des industries sont liées aux activités rurales : laiteries, fromageries, aliments composés pour le bétail, cimenteries, petites usines de la métallurgie de transformation. Rarement ces établissements ont plus de 200 ouvriers, dont la mentalité est plus rurale qu’industrielle. Les seuls centres industriels sont les villes : Verdun, Saint-Mihiel et surtout Bar-le-Duc, qui a pourtant beaucoup de difficultés à maintenir son potentiel industriel. Aussi n’est-il pas étonnant que la population n’ait cessé de décliner. De 294 000 en 1876, elle passe à 278 000 en 1911, 207 000 en 1921. Après une légère remontée en 1936, elle décline de nouveau en 1954 (207 000) ; 1962 semblait amorcer une reprise, qui n’a pas été confirmée par les recensements de 1968 et de 1975. Cette évolution entraîne le vieillissement de la population et illustre l’exode qui touche les régions les plus rurales, la situation étant moins mauvaise dans les villes. Les petites communes sont plus sensibles à l’exode et au vieillissement. Or, en 1968, guère plus de 6 p. 100 des communes comptaient plus de 500 habitants. Sur une population active de 78 000 personnes, l’agriculture en regroupait le cinquième ; l’industrie, plus de 41 p. 100.

L’agriculture est le fait d’exploitations de moyenne importance : 46 ha dans la Woëvre, une quinzaine d’hectares dans les villages de la côte, où subsiste un peu de vigne. L’élevage, souvent mixte (lait et viande), assure plus de 80 p. 100 des revenus.