Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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métamorphoses (suite)

Chez les Urodèles (Tritons, Salamandres), la métamorphose est plus discrète que chez les Anoures : les branchies externes persistent pendant toute la vie larvaire et ne disparaissent qu’au moment où les poumons deviennent fonctionnels ; les membres apparaissent tôt — les antérieurs avant les postérieurs —, puis ne se modifient guère ; la queue est conservée chez l’adulte, mais perd souvent la nageoire qui l’entoure. Chez l’Axolotl et parfois chez quelques. Tritons, la métamorphose ne se produit pas, mais la larve acquiert la possibilité de se reproduire ; on a souvent pu lier ces cas de néoténie à un dérèglement hormonal.


Poissons et Agnathes

Parmi les Poissons, les Pleuronectes et l’Anguille présentent de véritables métamorphoses.

À l’éclosion, les larves des Pleuronectes, ou « Poissons plats », sont symétriques et nagent en pleine eau ; progressivement, leur corps se comprime latéralement, et leur tête subit de curieuses modifications : l’un des yeux migre par-delà le plan médian et vient se fixer près de l’autre, sur la face qui, chez l’adulte, restera orientée vers la lumière ; en même temps, la bouche se déforme ; l’animal devient alors benthique et reste habituellement couché sur le fond sur son côté aveugle, côté gauche chez la Plie, la Sole, le Flétan, la Limande, côté droit chez le Turbot.

Au cours de sa migration, qui, en deux ans et demi, la mène de la mer des Sargasses aux côtes européennes, la jeune Anguille reste sous une forme larvaire, dite « leptocéphale » (Leptocephalus), aplatie comme une feuille et grandissant lentement, entraînée passivement par le Gulf Stream. La métamorphose commence quand elle parvient sur le plateau continental ; la larve devient cylindrique, subit une réduction de longueur de 20 p. 100 et une perte de poids de 80 p. 100 ; elle se transforme en « civelle » et pénètre dans les estuaires et les étangs littoraux. La chute brutale du poids correspond à une véritable déshydratation, sans doute sous la dépendance de la thyroïde ; le passage en eau douce deviendrait alors indispensable pour assurer rapidement une réhydratation des tissus de la civelle. La Murène, le Congre et autres Poissons apodes ont, comme l’Anguille, des leptocéphales, et leur vie larvaire s’achève par une métamorphose, mais il n’y a pas changement de milieu : tout le cycle vital se déroule dans la mer.

Chez la Lamproie (Agnathe), les œufs donnent naissance à des larves appelées ammocètes ou lamprillons, dont l’organisation, très primitive, rappelle, à certains points de vue, celle de l’Amphioxus ; elles vivent dans la vase et se nourrissent d’Algues microscopiques et de Protozoaires (régime microphage). Au bout d’un à cinq ans, selon les espèces, leur anatomie et leur biologie se transforment profondément ; l’animal devient nageur actif, capable de migrer, et carnivore ; les yeux apparaissent ; primitivement arquée, la bouche s’arrondit et se couvre de dents cornées ; le squelette, les appareils digestif et respiratoire se modifient. Voisine de la Lamproie, la Myxine ne présente pas de métamorphoses.


Insectes

La classe des Insectes offre les exemples les plus variés et les plus spectaculaires de métamorphoses, et longtemps la classification de ce groupe a distingué les Insectes à métamorphoses « complètes » (holométaboles) de ceux à métamorphoses « incomplètes » ou « progressives » (hétérométaboles) et même de ceux qui sont dépourvus de toute métamorphose (amétaboles).

Un tel clivage rend mal compte d’une réalité fort complexe, en particulier pour l’ensemble des hétérométaboles, où des subdivisions s’imposent. D’autre part, sa valeur systématique est contestable ; l’actuelle classification des Insectes ne la retient pas et repose essentiellement sur la segmentation du corps et sur la présence et la structure des ailes.


Holométaboles

Ils rassemblent la majorité des Insectes et souvent les plus évolués : Mégaloptères (Sialis), Planipennes (Fourmi-Lion), Mécoptères (Panorpe), Trichoptères (Phrygane), Lépidoptères (Papillons), Diptères (Mouches et Moustiques), Aphaniptères (Puces), Coléoptères, Strepsiptères, Hyménoptères (Fourmis et Abeilles). Les larves diffèrent considérablement des adultes ; elles n’ont jamais d’ébauches d’ailes visibles (ptérothèques), elles sont aveugles ou ont des yeux simples, leurs antennes et leurs pattes sont courtes ou nulles ; leur habitat, leur biologie n’ont habituellement aucun rapport avec ceux des imagos.

Entre la larve et l’adulte s’intercale un stade d’immobilité quasi totale, délimité par deux mues très spéciales, la mue nymphale et la mue imaginale. L’Insecte porte le nom de nymphe quand ses pattes, bien qu’inertes, sont libres et distinctes du corps (c’est le cas le plus fréquent) ; il s’appelle chrysalide quand membres et corps sont enfermés dans une enveloppe commune (Lépidoptères), et pupe quand il reste à l’intérieur de la dernière exuvie larvaire (beaucoup de Diptères).

La nymphose consiste en une élimination d’organes larvaires et une édification des organes adultes. Ce sont les organes les plus différenciés de la larve qui dégénèrent (divers muscles, les glandes séricigènes, les tubes de Malpighi), s’histolysent et sont détruits par les phagocytes ; d’autres persistent chez l’imago après avoir subi d’importants remaniements histologiques. Mais les organes propres à l’adulte, antennes, yeux composés, pièces buccales, ailes, appareil reproducteur, sont édifiés à partir de cellules groupées en disques imaginaux, isolées dès le début du développement et restées à l’état de repos durant toute la vie larvaire ; elles se multiplient et se différencient lors de la nymphose.

Quelques holométaboles présentent des hypermétamorphoses : plusieurs formes larvaires se succèdent avant la nymphose. Ce phénomène est connu chez divers Hyménoptères parasites, les Strepsiptères, les Coléoptères Méloïdés. Le Chalcidien Stibula éclôt sous la forme d’une larve « planidium » agile et poursuit son développement dans une nymphe de Fourmi à l’état de larve secondaire ; les Méloés, les Cantharides et autres « vésicants » vivent aux dépens d’Abeilles et de Criquets et montrent successivement une larve primaire (triongulin), deux larves secondaires, une pseudonymphe et une larve tertiaire avant de se nymphoser. Toutefois, le passage d’une forme larvaire à l’autre se réalise sans remaniement tissulaire ; celui-ci ne s’accomplit que chez la nymphe proprement dite.