Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mésopotamie (suite)

Donc, si chaque spécialiste construit sa chronologie personnelle, les ouvrages de grande diffusion ont intérêt à employer la chronologie donnée pour chaque grande aire culturelle par les œuvres savantes les plus répandues (par exemple, la nouvelle édition de la Cambridge Ancient History, ou le Proche-Orient asiatique de Paul Garelli). On pourra particulièrement consulter les articles « Datenlisten » (1934) et « Eponymen » (1938) par A. Ungnad dans le Reallexikon der Assyriologie (Berlin-Leipzig, vol. II, p. 131-194 et 412-457) et le fascicule « Chronology » [1964] par William C. Hayes et M. B. Rowton de la Cambridge Ancient History.

G. L.

➙ Achéménides / Akkad / Alexandre le Grand / Anatolie / Assyrie / Babylone / Cyrus II / Darios Ier / Écriture / Élam / Hammourabi / Hittites / Hourrites / Iran / Iraq / Kassites / Mari / Mèdes / Mitanni / Mithridate Ier / Ninive / Our / Ourarthou / Ourouk / Parthes / Sassanides / Séleucides / Sumériens / Suse / Xerxès Ier.

 A. L. Oppenheim, Ancient Mesopotamia. Portrait of a Dead Civilization (Chicago, 1964 ; trad. fr. la Mésopotamie, portrait d’une civilisation, Gallimard, 1970). / P. Garelli, le Proche-Orient asiatique, des origines aux invasions des peuples de la mer (P. U. F., coll. « Nouv. Clio », 1969). / G. Lafforgue, les Métamorphoses de l’humanité. La protohistoire de 7000 à 3000 av. J.-C. (Planète, 1969).


Archéologie et civilisation de la Mésopotamie

Employé pour la première fois, semble-t-il, par l’historien grec Polybe au iie s. av. J.-C., le terme de Mésopotamie, loin de désigner la totalité du bassin, ne dénommait alors que le territoire compris entre l’Euphrate et le Tigre au nord de la Babylonie centrale ; ce n’est que très progressivement, et essentiellement à une époque très récente, qu’il a été employé pour désigner la totalité de la région.

Que connaissait-on de la Mésopotamie avant les premières fouilles ?

Au moment où l’Orient commence à livrer ses premiers secrets, essentiellement en raison de l’intérêt porté par les Européens à la route des Indes, la Mésopotamie antique n’était connue que par des sources marginales et souvent tardives. La première, mais non la moindre puisqu’elle est encore maintenant à l’origine de la curiosité suscitée par cette région antique, provient des textes bibliques qui rendent compte des relations du peuple d’Israël avec l’Assyrie, Babylone et les Perses (v. Iran). Les renseignements ainsi obtenus sont épisodiques et souvent empreints de partialité. Cette connaissance était nuancée par les particularités rapportées par certains auteurs grecs ou latins (Hérodote, Xénophon par exemple) ; mais ceux-ci n’avaient connu bien souvent qu’une civilisation mésopotamienne arrivée au terme de son évolution et parfois sclérosée ; la plupart du temps, d’ailleurs, leur connaissance du pays, de ses habitants et de leurs coutumes n’était pas directe. On possédait enfin des relations de voyageurs du Moyen Âge et surtout des temps modernes qui avaient reconnu ou visité certains sites et en avaient parfois rapporté des objets qui, tel le « caillou Michaux » (un koudourrou pourvu d’une inscription et d’une iconographie), éveillèrent intérêt et curiosité au moment même — fin du xviiie s. — où les langues orientales attiraient l’attention des chercheurs. Bref, les connaissances étaient pratiquement nulles, et c’est l’archéologie qui a permis de retrouver la civilisation mésopotamienne.


Le pays et ses contraintes

Si, à nos yeux, une unité géographique existe, commandée pour une grande part par le réseau hydrographique, si l’histoire nous semble confirmer nos vues, il convient de préciser que les hommes de l’Antiquité n’ont jamais eu une claire conscience de l’unité régionale du bassin mésopotamien ; aucun royaume, aucun empire n’a jamais tenté d’en atteindre les limites naturelles ; c’est beaucoup plus l’idée d’extension territoriale, et donc le concept de puissance, ainsi que la volonté de joindre Méditerranée et golfe Persique ou encore la nécessité de trouver des sources d’approvisionnement en matières premières indispensables à la survie du pays (bois par exemple) qui guidèrent les souverains mésopotamiens dans leurs objectifs territoriaux. Pourtant, les impératifs géographiques sont là qui dominent toute l’histoire antique, dirigent pour une bonne part la destinée du pays et assurent son originalité. Le pays est marqué tout d’abord d’une unité réelle qui n’exclut pas cependant des différences régionales. Cette unité est surtout la conséquence du réseau hydrographique ; les deux fleuves prennent leur source dans les montagnes d’Arménie et n’opèrent leur jonction que dans le Chaṭṭ al-‘Arab, delta marécageux à la configuration incertaine, dont on ne sait de façon sûre s’il existait sous la même forme dans l’Antiquité. Les limites naturelles de ce bassin sont fixées par des montagnes au nord-ouest, au nord et à l’est, que certaines vallées pénètrent profondément ; à l’ouest, une zone steppique qui se transforme en véritable désert vers le sud a formé une barrière difficile à franchir aussi longtemps que l’homme n’a pas été en possession du chameau, c’est-à-dire jusqu’au Ier millénaire, mais que l’on contourne aisément grâce au parcours de l’Euphrate, qui, au nord-ouest, permet de rejoindre par Alep les pays méditerranéens. Cette issue et celle qui, au sud-est, débouche sur le golfe Persique font de la Mésopotamie une sorte de trait d’union entre l’Inde et la Méditerranée ; sans que ce rôle ait été déterminant, semble-t-il, durant la période qui nous occupe, il ne faudrait pas pour autant le sous-estimer. Au relief et à l’hydrographie vient s’ajouter comme facteur d’unité la pauvreté en matières premières ; hormis l’argile, partout présente à profusion et qui, alliée à l’eau, qu’il convient de domestiquer, devient source de richesse agricole et matériau de base de la vie quotidienne, on ne trouve pratiquement aucune ressource importante ; le bassin lui-même ne possède pour ainsi dire aucune pierre, sauf dans le Nord, et très peu de bois en dehors du palmier, arbre qui joue un grand rôle tant qu’il est vivant et fournit ombre et dattes, mais de peu d’importance en tant que bois d’œuvre en raison de sa constitution fibreuse et peu homogène ; le roseau, s’il est très utilisé, ne peut remplacer les arbres. La seule ressource minérale est constituée par le bitume, qui suinte parfois à la surface du sol et qui connaît très tôt de nombreux usages.