Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

mer (droit international de la) (suite)

Vers un nouveau droit de la mer

La protection des espaces marins — en haute mer comme le long des côtes — contre les effets nuisibles et parfois désastreux d’une exploitation sans contrôle des libertés de la mer apparaît aujourd’hui l’objectif principal du droit international public de la mer et de son développement.

Dans le domaine des pêcheries, la conservation des ressources biologiques de la haute mer justifia, à la conférence de Genève (1958), la discussion et le vote d’une convention spéciale, la troisième, entrée en vigueur le 20 mars 1966, ratifiée par la France le 18 septembre 1970, qui approuve à la même date la convention de Londres du 1er juin 1967 sur l’organisation de la pêche en Atlantique Nord destinée, dans un cadre régional, à en améliorer les règles d’application.

À Genève, la conservation en haute mer des ressources animales, mises en danger de disparition par une exploitation intensive, est confiée, sous le contrôle éventuel d’un arbitrage réglementaire, à l’État riverain, appelé de ce chef à tenir le rôle d’un gardien de la mer et de ses richesses.

Dans le domaine du transport, la catastrophe du Torrey Canyon, pétrolier géant dont la rupture en haute mer (mars 1967) provoqua sur les côtes de la Manche une pollution* considérable, détermina la signature à Bruxelles, le 29 novembre 1969, d’une convention dont le régime d’application laisse le rôle principal à l’intervention de l’État victime ou menacé.

L’escalade de l’internationalisation se précise lorsque, le 15 décembre 1969, la résolution no 2580 de la XXIVe Assemblée générale de l’O. N. U., adoptée par 100 voix contre 0 et 11 abstentions, prie le secrétaire général de s’enquérir des vues des États membres sur l’opportunité de convoquer à une date rapprochée une conférence sur le droit de la mer qui serait chargée de revoir les régimes de la haute mer, du plateau continental, de la haute mer territoriale, de la pêche et de la conservation des ressources biologiques de la haute mer.

De nombreuses conférences relatives à la mer (Caracas, 1974 ; Genève, 1975 ; New York, 1976) aboutissent à un droit de la mer qui, de toute façon, paraît, de nos jours, en pleine évolution.

P. L.

➙ Littoral / Navigation.

 G. Gidel, le Droit international public de la mer (Sirey, 1932-1935 ; 3 vol.). / Actualités du droit de la mer, colloque de la Société française pour le droit international (Pedone, 1973).

mercure

Corps simple liquide métallique.


Il était connu plusieurs siècles avant l’ère chrétienne et s’appelait argent liquide (hydrargyros) ; on l’utilisait pour amalgamer des métaux tels que l’or. Dans l’alchimie arabe, il apparut avec le soufre et l’arsenic comme un élément et incarna un principe métallique par son éclat et sa pesanteur ; le « mercure des philosophes » est « froid, passif » et « mâle ». Ce n’est qu’au xviiie s. qu’on observa sa solidification.


État naturel

On trouve de très faibles quantités de mercure à l’état libre, à l’état d’amalgame ou dans des composés halogénés, mais l’unique minerai important est le sulfure HgS, appelé cinabre, rouge ou noir. Le mercure est rare et ne constitue que 10–4 p. 100 de la lithosphère.


Atome

L’élément a le numéro atomique 80, et la structure électronique de l’atome dans l’état fondamental est 1s2, 2s2, 2p6, 3s2, 3p6, 3d10, 4s2, 4p6, 4d10, 4f14, 5s2, 5p6, 5d10, 6s2. Le rayon atomique est 1,44 Å et le rayon du cation Hg+2 1,10 Å. Les énergies successives d’ionisation sont respectivement 10,4 eV et 18,6 eV.


Corps simple

C’est le seul métal liquide à la température ordinaire ; il se solidifie à – 39 °C et sa température normale d’ébullition n’est que de 357 °C, d’où sa volatilité élevée pour un métal ; sa vapeur est très toxique.

Il s’allie avec certains métaux, qu’il dissout en donnant des « amalgames », en particulier avec le sodium, le potassium, le magnésium et l’or. On connaît des solutions liquides de ces métaux et aussi des composés définis intermétalliques. Ces propriétés particulières ont été à la base du rôle important qu’il a joué dans les spéculations des alchimistes.

Le mercure est peu réactif ; il ne s’oxyde pas à la température ordinaire, mais s’oxyde à chaud avec l’oxygène de l’air (ce qui est à la base d’une célèbre expérience de Lavoisier).

On le retire du cinabre par grillage selon la réaction (obtenue par chauffage à l’air)
HgS + O2 → Hg + SO2.


Principaux dérivés

On connaît l’oxyde mercurique HgO soit avec une couleur jaune, lorsque cet oxyde est obtenu par voie humide, soit avec une couleur rouge, lorsqu’il est obtenu par voie sèche. On connaît aussi un oxyde mercureux Hg2O, qui se décompose très facilement en mercure et oxyde HgO.

On connaît ainsi deux familles de dérivés du mercure : les dérivés mercureux (plus exactement dimercuriques), avec le groupement atomique (Hg—Hg)+2, et les dérivés mercuriques, avec Hg+2. Les potentiels normaux d’oxydoréduction des couples Hg2+2/Hg et Hg2+/Hg sont très voisins ; on a ainsi :

La proximité de ces potentiels fait que la réduction d’un sel mercurique ira généralement plus loin que le stade mercureux et donnera du mercure libre. L’équilibre de dismutation :

est favorable à l’ion mercurique ; en conséquence, les sels mercureux solubles dans l’eau auront tendance à se dismuter avec libération de mercure, et cette transformation sera totale si l’ion mercurique Hg+2 s’élimine par précipitation ou formation d’un complexe.

Le chlorure dimercurique, ou caloruel Hg2Cl2, est extrêmement peu soluble dans l’eau ; le chlorure mercurique, ou sublimé corrosif HgCl2, est nettement plus soluble dans l’eau chaude que dans l’eau froide.

Un sulfure noir se forme par action de l’hydrogène sulfuré sur une solution de sublimé corrosif. Ce sulfure HgS devient rouge (vermillon) par sublimation.

On connaît de nombreux sels complexes de mercure, en particulier des complexes halogénés tels que le réactif de Nessler (iodomercurate de potassium K2HgI4), qui permet de caractériser l’ion ammonium par formation d’une coloration brune.

On connaît aussi des complexes ammoniés. Les organomercuriques comme les organozinciques et les organocadmiens sont connus sous forme de dérivés symétriques R—Hg—R et mixtes R—Hg—X, et on connaît aussi des organomercuriques à radicaux différents R—Hg—R′.

On réalise facilement la réaction :
2 RI + Hg + 2 Na → 2 NaI + RHgR.
Par action réversible du sodium, les organomercuriques sont à la base de la préparation la plus générale des dérivés sodés :
R2Hg + 2 Na ⇄ Hg + 2 RNa.

L’état liquide du mercure conduit à divers usages en physicochimie dans la construction de redresseurs électriques, dans l’emploi d’amalgames.

Le cyanure de mercure Hg(CN)2 est encore utilisé dans le traitement de la syphilis.

Le fulminate de mercure [cyanate mercurique Hg(OCN)2] sert de détonateur. Le mercure et la plupart de ses dérivés sont nettement toxiques.