Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Marie Ire Stuart (suite)

La chute et la captivité

Bothwell n’ayant pu réunir une force capable de s’opposer à l’aristocratie révoltée, Marie se rendait aux rebelles à Carberry Hill (15 juin 1567) et abdiquait en faveur de son fils, Jacques VI, Moray devenant régent. Emprisonnée à Lochleven, Marie s’échappa : mais, n’ayant pu rassembler ses partisans, elle se réfugia auprès d’Élisabeth, en Angleterre. Cette dernière souhaitait observer la plus stricte neutralité dans les affaires d’Écosse. Pourtant, elle cessa bientôt de tenir la balance égale entre le parti de Marie et celui du régent lorsque les événements d’Angleterre (révolte des catholiques du nord de l’Angleterre au nom de Norfolk, 1569 ; complot Ridolfi, 1571) et de France (massacre de la Saint-Barthélemy, 1572) lui révélèrent le danger que présentaient les partisans catholiques de Marie. Celle-ci, après avoir traversé une période « anglicane », se rejetait d’ailleurs vers un catholicisme intransigeant et commençait des négociations avec les puissances catholiques. Élisabeth se refusait cependant à la poursuivre ; c’est sir Francis Walsingham (v. 1530-1590) qui, en l’amenant à participer à un complot qu’il avait monté de toutes pièces, causa sa perte. Marie Stuart fut exécutée le 8 février 1587, sans que son fils ait sérieusement essayé de dissuader Élisabeth, pourtant hésitante, jusqu’au dernier moment, de la laisser exécuter.

J.-P. G.

➙ Écosse / Élisabeth Ire / Stuarts.

 A. I. Labanoff, Lettres, instructions et mémoires de Marie, reine d’Écosse (Londres, 1844 ; 7 vol.). / T. F. Henderson, Mary, Queen of Scots (Londres, 1905 ; 2 vol.). / J. Knox, History of the Reformation in Scotland (Londres, 1949). / G. Donaldson, Scotland. James V to James VII (Édimbourg, 1965). / A. Fraser, Mary, Queen of Scots (Londres, 1969).

Marie-Thérèse

(Vienne 1717 - id. 1780), impératrice (1740-1780).


« Jamais je ne négligerai les devoirs que je dois remplir en qualité de souveraine chrétienne envers mes sujets » : cette phrase qu’écrivait Marie-Thérèse au prince stathouder de Hollande en 1744 la dépeint tout entière. Sens de ses devoirs, fermeté d’âme quand elle est aux prises avec les périls extérieurs et les difficultés intérieures ou familiales, volonté opiniâtre d’assurer le bonheur de ses sujets et de préserver l’héritage des Habsbourg, tels sont les traits que l’on s’accorde à reconnaître à la reine de Hongrie (1741) et de Bohême (1743), impératrice germanique, mère de seize enfants, qui partage après 1765 le pouvoir avec son fils Joseph, en qualité de corégent. Des travaux récents modifient cette image traditionnelle : c’est à Marie-Thérèse que revient, en grande partie également, le mérite de la transformation de l’Empire en État moderne, sinon dans le domaine culturel, où l’emporte son esprit religieux, tout au moins dans le domaine économique, où l’Autriche s’ouvre aux premières réalisations de la révolution industrielle.


Naissance et éducation

Au moment de la mort de son père, l’empereur Charles VI*, le 20 octobre 1740, Marie-Thérèse, jusque-là tenue à l’écart des affaires, attend son quatrième enfant. Née le 13 mai 1717, elle a épousé en 1736 François de Lorraine, fils du duc Léopold, qui vit depuis quinze ans à la cour de Vienne et qui, au traité de Vienne mettant fin à la guerre de la Succession de Pologne (1738), a reçu la Toscane dont il avait pris possession dès 1737, en échange de la Lorraine. Jeune et manquant d’expérience politique, la nouvelle souveraine est confrontée immédiatement avec les problèmes les plus graves : ceux-là mêmes de l’existence de la monarchie et de son droit à recueillir la succession paternelle.


L’héritage autrichien : diversité et contestation

Faire reconnaître par les puissances l’ordre de succession établi par la pragmatique sanction, qui modifie les dispositions arrêtées en 1703 par l’empereur Léopold Ier en faveur de ses filles, telle a été la préoccupation constante de Charles VI lors des dernières négociations de paix. Rédigée en 1713, la pragmatique sanction substitue, à défaut d’héritiers mâles, la descendance féminine de l’empereur régnant (en l’occurrence Marie-Thérèse) à celle de son frère. Loi de l’État et non plus seulement convention familiale, élément de droit international, le texte de Charles VI apparaît comme le fondement du droit public qui doit assurer l’indivisibilité des États des Habsbourg.

Ces États dont hérite Marie-Thérèse forment un ensemble étendu, hétérogène, dispersé. Du Rhin au Danube, de la mer du Nord à l’Adriatique, ce sont : un tiers de l’Italie, reçu en 1714 au titre de l’héritage espagnol, avec Milan, Naples, les ports de Toscane ; la Sardaigne, qui sera échangée contre la Sicile (1718) ; au nord, les Pays-Bas, avec Ostende ; au centre, les trois Autriches, supérieure, inférieure et intérieure ; à l’est, les pays de la couronne de Bohême, ceux de la couronne de Saint-Étienne (la Hongrie) et la Valachie occidentale. Ces différents territoires n’ont ni la même culture, ni les mêmes institutions, ni les mêmes traditions ; tous, à des moments divers, ont reconnu la loi de succession des Habsbourg, qui, depuis des siècles, reçoivent, par élection, la couronne impériale, donnée par les Électeurs réunis à Francfort en vertu de la Bulle d’or (1356).

Source de force par les possibilités diverses d’intervention pour une grande politique européenne, mais également source de faiblesse par leur dispersion même, les domaines des Habsbourg ont connu sous l’impulsion du Prince Eugène les effets d’une grande politique : celle de la lutte contre les Turcs et de la communion dans la victoire. Le Prince Eugène disparu (1736), restent à la mort de l’empereur Charles VI une administration centrale corrompue et routinière, un Conseil intime où se retrouvent six vieillards sages et fatigués, une armée dispersée, des finances ruinées, une insouciance généralisée des classes dirigeantes, face aux intrigues d’une maison de Bavière prétendant faire valoir ses droits à la succession qui vient de s’ouvrir et face aux ambitions déguisées d’un jeune souverain aux dents longues et à l’esprit prompt, monté également sur le trône en 1740 et que l’Europe ne connaît pas encore, Frédéric II*, roi de Prusse.